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Le principe d’égalité devant les charges publiques ne s’applique(rait) pas aux collectivités territoriales

Publié le jeudi 26 novembre 2015 , mis à jour le mardi 14 mars 2017

Source : http://www.dalloz.fr/

Auteur : Caroline Lantero, Maître de conférences en droit public

Date : AJDA 2015. 2161

« La compétence emblématique du département en matière de prestations d’aide sociale n’est plus à rappeler. Au titre des prestations offertes, le bénéfice de l’aide sociale à l’enfance (ASE), compétence exclusive du département depuis 1986, s’étend aux mineurs étrangers. De manière générale, la compétence géographique du département est déterminée par le domicile de secours du bénéficiaire, ou, à défaut, par le lieu de résidence, et, s’agissant plus particulièrement des mineurs isolés étrangers (MIE), il revient à la collectivité départementale de prendre en charge les dépenses d’entretien, d’éducation et de conduite des mineurs confiés par l’autorité judiciaire (CASF, art. L. 228-3). Seules les dépenses résultant des prestations offertes aux mineurs accueillis sur le territoire national à la suite d’une décision gouvernementale sont, en définitive, prises en charge par l’Etat, qui doit rembourser le département (CASF, art. L. 228-5).

En l’espèce, le département de la Seine-Saint-Denis se plaignait d’une augmentation considérable de la charge des MIE de 2008 à 2011 et déplorait plus de 1 000 entrées en 2011. Se prévalant d’un préjudice estimé à 35 millions d’euros, il a recherché la responsabilité de l’Etat. Devant le tribunal administratif de Montreuil comme devant la cour administrative d’appel (CAA) de Versailles, le département a soulevé plusieurs moyens fondés à la fois sur la responsabilité pour faute et sur la responsabilité sans faute de l’Etat.

Le tribunal administratif de Montreuil, dans un jugement à la motivation lapidaire, a rejeté la demande au motif que les préjudices allégués n’étaient pas établis sans cependant se prononcer sur le principe de responsabilité, laquelle peut donc, à la lecture du jugement, être regardée comme implicitement admise. On s’étonnera que les premiers juges n’aient pas fait usage de leurs pouvoirs d’instruction pour que soit précisée l’étendue de ce préjudice (CE 15 déc. 2010, n° 330867, Groupement d’intérêt économique garde ambulancière 80, LebonDocument InterRevues T. ; AJDA 2010. 2457). Ce moyen n’a pas été soulevé en cause d’appel, mais la cour de Versailles a également rejeté la requête au motif que la responsabilité de l’Etat ne peut être engagée, quel qu’en soit le fondement. On relève que l’Etat emporte ce contentieux sans même avoir produit de défense utile, puisque les écritures du ministre ont été écartées pour avoir motivé par référence ses conclusions (ce qui est admis), mais sans prendre la peine de joindre la référence (ce qui n’est pas admis) (CE, sect., 10 déc. 1965, n° 60232, Territoire des Comores, LebonDocument InterRevues 679 ; CE 3 févr. 1989, n° 88127, Association « Essor économique et social du Couserans et de l’Ariège » et Comité de défense de l’environnement du Couserans, Lebon T. 843Document InterRevues).

[...]

Quel est donc l’intérêt de ce nouvel arrêt rejetant le recours en responsabilité d’un département à l’encontre de l’Etat s’agissant des charges excessives pesant sur le premier ? Pour la première fois, une juridiction administrative juge explicitement que le principe d’égalité devant les charges publiques ne s’applique qu’aux personnes privées. Au-delà, l’affaire jugée par la CAA cristallise les crispations des départements sur la question des MIE, notamment lorsque l’arrêt est lu en miroir des condamnations que les départements subissent en la matière, et en miroir de l’arrêt du Conseil d’Etat du 30 janvier 2015 annulant partiellement la « circulaire Taubira » : crispation relative à l’entrée sur le territoire des MIE et au coût que cela représente, crispation sur la répartition entre départements. Dans un cas, comme dans l’autre, le juge estime que l’Etat n’est pas responsable. »

Plan :

I - Entrée et prise en charge des MIE : l’Etat ne paiera pas

II - Les départements ne peuvent se prévaloir d’une rupture d’égalité

Voir en ligne : http://www.dalloz.fr/


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