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Amnesty International France - Des contrôles aux confins du droit : Violations des droits humains à la frontière avec l’Italie

Synthèse de mission d’observation

Publié le vendredi 10 février 2017 , mis à jour le mardi 14 février 2017

Source  : www.amnesty.fr

Date  : Février 2017

Des contrôles aux confins du droit - Violations des droits humains à la frontière avec l’Italie
Synthèse de mission d’observation

Résumé :

« Alors que la justice française doit se prononcer le 10 février 2017 sur la situation de Cédric Herrou poursuivi pour aide à l’entrée et à la circulation d’étrangers en situation irrégulière, une récente mission d’observation d’Amnesty International France (AIF) à la frontière franco-italienne révèle que les opérations de contrôle de la frontière portent atteinte au droit d’asile, ne respectent pas la législation française applicable aux contrôles aux frontières et ne sont pas conformes à la convention relative aux droits de l’enfant.

Une mission d’observation dans les Alpes-Maritimes, réalisée du 19 janvier au 26 janvier 2017, a permis de dresser un constat précis des violations des droits humains des hommes, femmes et enfants, migrants ou réfugiés, qui franchissent la frontière franco-italienne pour rejoindre le territoire français.

À l’issue de cette mission, il est clair pour AI France que les modalités du contrôle des frontières mises en place par les autorités françaises empêchent ou dissuadent des personnes d’entrer en France, sans qu’aucune considération ne soit réellement portée au respect de leurs droits et aux garanties légales encadrant ces procédures. Dans la plupart des cas, les personnes contrôlées à la frontière se retrouvent privées de toute possibilité de faire valoir leurs droits, notamment celui de solliciter l’asile.

Les enfants non accompagnés ne font pas l’objet de l’attention requise par leur situation de vulnérabilité et les exigences de la législation française relative à la protection de l’enfance.

Cette mission a également mis en évidence le fait que ce sont précisément ces violations des droits humains commises par les autorités françaises qui ont contraint des citoyens à se mobiliser pour venir en aide aux personnes réfugiées et migrantes ; des citoyens qui, de façon paradoxale, se retrouvent, pour certains, poursuivis par l’État français.

Pour AI France, il revient donc aux autorités françaises d’appliquer et de respecter l’ensemble des règles applicables du fait du rétablissement des mesures de contrôles aux frontières.

En 2016, selon les informations rendues publiques par voie de presse, la préfecture des Alpes-Maritimes aurait interpellé près de 35 000 personnes sur l’ensemble du département des Alpes-Maritimes, ce qui représenterait une augmentation de plus de 40% par rapport à l’année 2015. La grande majorité de ces interpellations a eu lieu à la frontière franco-italienne. Selon la préfecture des Alpes- Maritimes, neuf personnes interpellées sur dix auraient été réadmises en Italie. On peut en déduire qu’au moins 30 000 mesures de non admission ont donc été prononcées en 2016 dans ce seul département, ce qui représente presque 70% de l’ensemble des mesures de refus d’entrée prononcées sur l’ensemble du territoire.

Ces quelques chiffres illustrent la situation exceptionnelle qui prévaut sur cette portion du territoire français. Il apparaît difficilement concevable de considérer que les observations et les informations collectées ne seraient que le reflet de pratiques peu courantes ou isolées, qui ne concerneraient qu’un nombre restreint de personnes.

Au cours de cette mission, AI France a rencontré plusieurs acteurs locaux, qu’il s’agisse d’organisations non gouvernementales, d’avocats, de professionnels impliqués directement ou indirectement sur ces questions, ou encore de citoyens engagés venant en aide aux personnes réfugiées et migrantes.

En revanche, ni le ministère de l’Intérieur - Direction centrale de la police aux frontières, Direction de l’asile et cabinet du ministre de l’Intérieur – ni le Préfet des Alpes-Maritimes n’ont apporté de réponse aux demandes qu’AI France a formulées en amont de cette mission. Des demandes d’informations, ainsi que des relances, ont été adressées aux autorités entre le 4 janvier et le 17 janvier 2017.

Les informations collectées sur place et les observations conduites par AI France durant la mission ont été enrichies par l’expérience des membres d’AI France engagés localement sur le terrain depuis plusieurs années.

Les modalités de contrôle de la frontière ont pour conséquence d’exacerber la situation. Déjà fortement éprouvées par des situations très difficiles dans leurs pays et par leurs parcours d’exil, les réfugiés ou migrants se retrouvent coincés entre deux frontières, dans des conditions de dénuement manifeste. Ces personnes sont placées dans une très grande précarité, sans accès à un hébergement, à l’eau, à la nourriture ou à des conditions d’hygiène élémentaires.

Les points d’entrée sur le territoire français se sont multipliés, aux risques et périls de ceux qui doivent franchir la frontière. Chaque jour, des personnes, dont des enfants, tentent désespérément de passer. La précarité de leur situation et le fait de devoir trouver d’autres moyens pour franchir la frontière ne font que nourrir les réseaux de traite et des trafics qui s’enrichissent de part et d’autre de celle-ci.

Les résultats de cette mission doivent être lus en lien avec le rapport qu’Amnesty International a publié au mois de novembre 2016 sur le traitement des demandeurs d’asile en Italie dans le cadre de l’approche des « hotspots ». Au cours de cette précédente mission, les renseignements collectés avaient mis en évidence, côté italien, les conséquences des pratiques françaises de contrôle de la frontière.

AI a également documenté plusieurs cas de réfugiés et de migrants renvoyés de force en Italie par la France et la Suisse via des procédures frontalières "simplifiées" ou sans procédure du tout. Il en ressortait une absence d’évaluation des situations individuelles ; en particulier, l’absence d’évaluation des risques liés à un retour en Italie, du fait des mauvais traitements infligés dans le cadre de la prise des empreintes digitales des demandeurs d’asile, et l’absence d’évaluation des risques de refoulement depuis l’Italie vers un autre État, comme le Soudan. »

Rapport disponible ci-dessous au format pdf :

Voir en ligne : https://www.amnesty.fr/refugies-et-...


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