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Tribunal administratif de Paris juge des référés, ordonnance du 25 novembre 2019 n°1924867/9. Requête présentée par 12 associations de soutien aux demandeurs d’asile et 23 personnes physiques ne parvenant pas à prendre rendez-vous en SPADA et donc à voir enregistrer leur demande d’asile. Les requérants ne peuvent avoir accès aux conditions matérielles d’accueil dont bénéficient les demandeurs d’asile, de sorte qu’ils justifient d’une situation d’urgence particulière au sens des dispositions de l’article L.521-2 du CJA + atteinte grave et manifestement illégale au droit constitutionnel d’asile. Le Tribunal enjoint au préfet de police d’enregistrer sous 10 jours les demandes d’asile des requérants, de fixer à 100 le nombre de rendez-vous pris par l’intermédiaire des SPADA dans les 12 guichets du GUDA de Paris et enjoint à l’OFii de reprendre la négociation avec l’ARCEP sous trois jours afin de mettre en place une gratuité effective des appels vers sa plateforme téléphonique

Publié le : mercredi 27 novembre 2019

Source : Tribunal administratif de Paris juge des référés

Date : ordonnance du 25 novembre 2019 n°1924867/9

Extraits :

« 6. Il résulte de l’instruction que [les requérants] ne peuvent, du fait de l’impossibilité de faire enregistrer leur demande d’asile, avoir accès aux conditions matérielles d’accueil dont bénéficient les demandeurs d’asile. Ainsi, les requérants justifient d’une situation d’urgence particulière au sens des dispositions de l’article L.521-2 du code de justice administrative, ce que d’ailleurs l’Office français de l’immigration et de l’intégration ne conteste pas. (...)

10. Il résulte de ce qui précède que tant l’Office français de l’immigration et de l’intégration, en ne répondant pas aux appels des requérants, que le préfet de police, seul compétent pour procéder à l’enregistrement à Paris d’une demande d’asile en application de l’article R. 741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, n’ont pas placé les intéressés en mesure de voir leur demande d’asile enregistrée et, par suite, examinée dans un délai raisonnable. Il s’ensuit, dès lors, qu’il y a urgence à faire cesser cette atteinte grave et manifestement illégale au droit d’asile et d’enjoindre au préfet de police, à qui il appartient de procéder à l’enregistrement des demandes d’asile dans les délais prévus par l’article L. 741-1 du code, d’enregistrer, dans un délai de dix jours à compter de la notification de la présente ordonnance, les demandes d’asile présentées par les requérants. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte. (...)

14. Les dispositions précédemment citées de l’article L. 741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, issues de la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile, transposant les objectifs de la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013, font peser sur l’Etat une obligation de résultat s’agissant des délais dans lesquels les demandes d’asile doivent être enregistrées. Il incombe en conséquence aux autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires au respect de ces délais.

15. Il ne relève pas de l’office du juge des référés de remettre en cause le choix des autorités publiques de mettre en place, en Ile-de-France, un dispositif de pré-accueil téléphonique des étrangers souhaitant demander l’asile dans le but de répartir la gestion des demandes d’asile entre les différents guichets uniques de la région Ile de-France, de rétablir l’égalité d’accès à la demande d’asile et d’éviter les troubles à l’ordre public résultant de la constitution de files d’attente devant les SPADA, ainsi que les trafics de rendez-vous. Il lui appartient en revanche d’ordonner, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, les mesures urgentes que la situation permet de prendre dans un délai de quarante-huit heures et qui sont nécessaires pour faire disparaître, à bref délai, les atteintes graves et manifestement illégales au droit de solliciter le statut de réfugié, corollaire du droit constitutionnel d’asile ainsi qu’il a été dit au point 7 de la présente ordonnance.

16. (...) Compte tenu de ce que, ainsi que l’a indiqué la représentante du préfet de police lors de l’audience publique, le nombre de demandes d’asile en région parisienne, qui représentent près de la moitié des demandes d’asile sur l’ensemble du territoire, est en croissance constante, la situation actuellement constatée à Paris ne peut que se dégrader en l’absence d’une augmentation des capacités d’accueil des GUDA. En outre, si les demandes d’asile sont enregistrées à Paris dans un délai moyen de quatre jours suivant la prise de l’appel par la plateforme téléphonique de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, les très grandes difficultés d’accès à cette plateforme constituent un obstacle au dépôt des demandes d’asile et emportent de graves conséquences pour les personnes concernées qui sont dissuadées de déposer une demande d’asile, exposées au risque de se voir opposer le non-respect du délai de 90 jours prévu par au 3° du III de l’article L. 732-2 et privées du bénéfice des conditions matérielles d’accueil réservées aux demandeurs d’asile. Ces circonstances révèlent l’existence d’une atteinte manifestement grave et illégale portée au droit de demander l’asile ainsi qu’une situation d’urgence caractérisée, justifiant l’intervention du juge des référés saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. (...)

18. (...) Les personnes qui tentent de joindre cette plateforme sont, en très grande majorité, munies de téléphones portables équipés de cartes prépayées fournies par les opérateurs téléphoniques étrangers qui facturent les appels sur postes fixes entre 15 centimes et 19 centimes la minute. Ainsi, compte tenu des difficultés d’accès à la plateforme, du temps d’attente et des appels répétés, le coût d’accès à la plateforme représente, pour des personnes étrangères récemment arrivées sur le territoire et totalement démunies de ressources, un coût particulièrement élevé qui constitue un obstacle réel et très sérieux à l’accès au dispositif d’enregistrement des demandes d’asile et porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit d’asile. L’urgence caractérisée de cette situation justifie l’intervention du juge des référés saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. »

Ordonnance disponible au format pdf ci-dessous :

TA_Paris_25112019_n°1924867/9