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Défenseur des droits - Rapport annuel d’activité 2019

Publié le lundi 8 juin 2020 , mis à jour le lundi 8 juin 2020

Source : Défenseur des droits

Date : Juin 2020

Dossier de presse à retrouver en ligne ici ou ci-dessous en format pdf :

DDD_RAA_2019_DP

Rapport à retrouver en ligne iciou en format pdf ci-dessous :

DDD_RAA_2019

Extraits :

  • «  Le droit à la protection de l’État

Bien que gravé dans les textes, l’accès à la protection de l’État de personnes vulnérables demeure pour le moins fragile, éclipsé par des considérations à la fois budgétaires et politiques.

Depuis plusieurs années, le Défenseur des droits constate que les mineurs non accompagnés migrants (dits « MNA ») peinent à bénéficier d’un accueil et d’une prise en charge par les pouvoirs publics sur l’ensemble du territoire. La CEDH l’a d’ailleurs constaté dans l’arrêt Khan c. France du 28 février 2019, qui a condamné la France, au titre de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme, pour avoir manqué à son obligation de prise en charge et de protection d’un mineur migrant qui a vécu plusieurs mois dans le bidonville de Calais. Le Défenseur des droits était intervenu dans la procédure (décision 2018-003). Faisant référence à plusieurs reprises aux analyses du Défenseur des droits, la Cour a sanctionné les carences des autorités françaises dans le déploiement de moyens suffisants et adaptés pour l’identification et la protection des MNA. Le Défenseur des droits a présenté cette année des observations devant la Cour dans une autre affaire, S.M.K. c. France, portant sur les mêmes questions, ainsi que sur l’effectivité des recours internes.

Lorsque le mineur est recueilli au titre de la protection de l’enfance, le Défenseur des droits peut être amené à constater des carences dans le dispositif d’accueil et de prise en charge, comme dans sa décision du 28 mars 2019 (décision 2019-058), dans laquelle il a formulé plusieurs recommandations sur l’évaluation, sur l’accompagnement socioéducatif des jeunes personnes en cours d’évaluation et des mineurs pris en charge, ainsi que sur la préparation à la majorité et à l’autonomie (voir décision 2019-230).

Le droit à la protection de l’État est également mis à mal par la pratique du recours aux « tests osseux » dans le cadre de l’évaluation de l’âge du mineur non accompagné sollicitant une prise en charge au titre de la protection de l’enfance.

Unanimement décrié depuis des années pour ses atteintes aux droits de l’enfant garantis par la Convention internationale relative aux droits de l’enfant (CIDE) et son absence de fiabilité, ce test est pourtant toujours utilisé. Après le Conseil constitutionnel (décision 2018-768 QPC), la Cour de cassation a été saisie des dispositions législatives autorisant le recours à cette méthode d’évaluation, notamment de leur non-conventionnalité. Elle a rendu un arrêt de rejet le 21 novembre 2019, aux termes duquel elle a estimé, contrairement à ce qui était soutenu par le Défenseur des droits, qu’eu égard aux garanties entourant le recours à cet examen, l’intérêt supérieur de l’enfant garanti par la CIDE et l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme avaient été respectés en l’espèce. Le Défenseur des droits était intervenu dans les procédures (décisions 2019-275 et 2018-296) pour faire valoir que le recours aux examens radiologiques osseux porte une atteinte disproportionnée aux droits de l’enfant, en raison de son absence de fiabilité et de son caractère inadapté, outre le fait que cette méthode d’évaluation ne respecte pas la dignité de l’enfant, son intégrité physique et sa santé.

Il a également déposé des observations au soutien de la transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité (« QPC ») relative à la création du fichier biométrique des MNA (« AEM » - Appui à l’Évaluation de la Minorité) qui, sous couvert de mieux garantir la protection de l’enfance, est tourné vers la gestion des flux migratoires, la lutte contre le nomadisme administratif et la fraude documentaire, au mépris des droits et de l’intérêt supérieur des enfants (décision 2019-104). Le 26 juillet 2019, le Conseil constitutionnel a toutefois déclaré les dispositions critiquées conformes à la Constitution (décision 2019-797 QPC).

(...)

  • L’aide juridictionnelle pour les mineurs isolés étrangers

Dans son avis 19-09 relatif à l’aide juridictionnelle, le Défenseur des droits s’est en particulier penché sur la question de l’accès à cette aide pour les mineurs isolés étrangers.

Saisi de plusieurs réclamations, le Défenseur des droits s’est inquiété des décisions d’irrecevabilité, de rejet et de retrait a posteriori opposées à des demandes formulées par des mineurs réfugiés pour exercer un recours devant le tribunal administratif, afin d’obtenir d’une ambassade à l’étranger qu’elle enregistre la demande de visa de l’un de leurs ascendants dans le cadre d’une demande de réunification familiale.

Contrairement à ce qui a pu être opposé, ces demandes d’aide juridictionnelle concernent directement le mineur puisqu’elles ont pour finalité de rendre effectif son droit à la réunification familiale. De plus, la situation particulièrement digne d’intérêt du demandeur, au sens de loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, est caractérisée puisqu’il s’agit d’un mineur isolé, et que par conséquent, elle est de nature à justifier que le bénéfice de l’aide juridictionnelle lui soit accordé en tout état de cause.

Le Défenseur des droits s’inquiète de ces entraves à l’accès à la justice de mineurs non accompagnés et préconise que soient données des instructions pour qu’une attention particulière soit apportée lors de la gestion de ces dossiers par les bureaux d’aide juridictionnelle.

(...)

  • Les défaillances de la protection de l’enfance

(...)

Le Défenseur des droits est, cette année encore, régulièrement intervenu pour défendre les droits de mineurs non accompagnés. Saisi de situations individuelles par des enfants et adolescents eux-mêmes, ou par des associations et des travailleurs sociaux, il a utilisé ses différents moyens d’intervention pour défendre leurs droits : médiation, observations devant les juridictions (décisions 2019-054 et 2019-065), recommandations individuelles et générales (décisions 2019-058 et 2019-230).

Les réclamations illustrent combien ces enfants, dans une situation de particulière vulnérabilité liée à leur parcours d’exil et à la séparation de leur famille, peinent à se voir reconnaître un statut de sujet de droit par les autorités publiques. Ils sont trop souvent d’abord considérés comme des étrangers en situation irrégulière et non comme des mineurs à protéger.

C’est dans ce contexte que le Défenseur des droits a été amené à présenter des observations devant le Conseil d’État pour contester la légalité du fichier biométrique « Appui à l’évaluation de la minorité » (décision 2019-065). Opposé au recours aux examens d’âge osseux, il a également soutenu devant la Cour de cassation le renvoi d’une question préjudicielle de constitutionnalité devant le Conseil constitutionnel (décision 2019-104).

Ce dernier, saisi par la Cour de cassation, n’a émis aucune réserve sur la législation fondant les examens d’âge osseux mais a rappelé les garanties qui doivent les entourer, reconnaissant une valeur constitutionnelle à l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant (décision 2018-768 QPC du Conseil constitutionnel du 21 mars 2019). Evoqué Partie I, conféré.

Le Défenseur des droits a par ailleurs poursuivi sa mobilisation pour l’accès aux droits Outremer et il a pu constater à nouveau lors du déplacement de ses services à Mayotte, que tous les droits des enfants qui y vivent – plus de 50% de la population de ce département - sont particulièrement malmenés, qu’il s’agisse du droit à être protégé, du droit à la santé ou du droit à l’éducation.

(...)

  • Le droit à l’exécution d’une décision de justice et le droit au recours effectif

(...)

La protection effective des droits exige qu’un juge soit accessible par l’exercice d’une voie de recours. Dans le cas contraire, les droits proclamés, aussi fondamentaux soient-ils, demeurent purement formels et illusoires.

Le Défenseur des droits a présenté des observations devant la CEDH au sujet de la situation de nombreux MNA qui ne parviennent pas à être pris en charge au titre de la protection de l’enfance. Ces derniers sont confrontés à de nombreuses difficultés, notamment liées à l’évaluation menée par le département, parfois fondée sur l’apparence, au refus de prise en charge sans justification et aux longs délais d’attente.

En l’absence d’effet suspensif de la saisine du juge des enfants suite à la décision du département mettant fin à l’accueil provisoire d’urgence, le mineur est alors privé d’une voie de recours effective. Il se trouve contraint à l’errance, confronté au risque de violences et de faire l’objet d’une mesure d’éloignement. Il est donc privé de la mise à l’abri à laquelle tout enfant a droit et de la protection continue à laquelle il peut prétendre au titre de l’Aide sociale à l’enfance jusqu’à l’obtention d’une décision de justice définitive (décision 2019-117).

(...)
 »

Voir en ligne : https://www.defenseurdesdroits.fr/f...


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