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Le lycéen guinéen, expulsable, ramené à Angers par ses profs

Publié le 6-04-2016

Source : www.jactiv.ouest-france.fr

Auteur : Nathalie Hamon

« Cet élève de 19 ans était placé en centre de rétention administrative à Rennes, depuis jeudi. Le tribunal administratif a retoqué, lundi, la décision préfectorale. Il peut poursuivre sa formation.

Il a eu la trouille. Ses camarades et professeurs aussi. Après quatre jours d’incertitudes, Ousmane Condé, 19 ans, est sorti du centre de rétention administrative de Rennes, lundi. La justice a cassé cette décision de la préfecture du Maine-et-Loire. « Juridiquement, indique Me Élodie Praud, avocate à Rennes, c’était compliqué : le juge administratif avait les moyens de le maintenir en centre de rétention. » Mais la situation et les garanties du jeune Guinéen ont sans doute fait pencher la balance de son côté.

Ousmane Condé suit une scolarité depuis son arrivée à Angers, en 2013. Maltraité chez lui, raconte-t-il, le garçon orphelin débarque en France par avion, grâce à l’aide d’un voisin. En mars 2013, il se retrouve à la gare Montparnasse. Perdu. Il monte dans un train à destination de Nantes. Cette ville lui parle, c’est celle de son club de foot favori. Mais il descend à Angers, « par erreur ».

Durant trois mois, il appelle le 115, numéro d’urgence, pour dormir à l’abri, avant de se retrouver sous protection de l’aide sociale à l’enfance, donc du Département, en tant que mineur.

« On ne pouvait pas laisser faire ça »

Au terme d’une mise à niveau d’un an au lycée Chevrollier à Angers, il intègre le lycée professionnel privé Joseph-Wresinski, en septembre 2014. Ousmane suit une formation en CAP Maintenance des bâtiments de collectivités, dont l’examen aura lieu en juin. Après, il espère poursuivre une formation en menuiserie. « Par son sérieux et son envie de travailler, une entreprise angevine est intéressée pour le prendre en apprentissage », explique Teddy Remeau, enseignant à Joseph-Wresinski.
Ousmane a échappé à une première arrestation, mercredi. « Depuis le 8 février, je vais signer chaque jour au commissariat de police. Mercredi, on me demandait de rester, j’ai dit que j’avais des travaux pratiques à finir à l’école... » Le lendemain, au terme de sa journée de cours, le jeune homme n’est ressorti du commissariat que pour être emmené à Rennes.

Le vendredi, « on avait cours ensemble, poursuit Teddy Remeau. Balla Moussa, un élève, ami d’Ousmane, nous a mis au courant de sa situation. » Ce professeur titulaire et son homologue, Angélique Ménard, sont tombés des nues. Sous le choc. « On a compris que c’était grave. On ne pouvait pas laisser faire ça. » Informé, le directeur du lycée, Thierry Maingret, a suivi son équipe. Les contacts ont été pris avec des représentantes de la Ligue des droits de l’Homme et de la Cimade, à Rennes. « La seule chose que l’on pouvait faire était de se mobiliser. » Dès samedi, Teddy Remeau s’est rendu à Rennes pour soutenir son élève. En parallèle, Angélique Ménard a ouvert une page Facebook « pour mobiliser un maximum de monde ».
Lundi matin, à 11 h 30, une vingtaine d’enseignants et d’élèves angevins se trouvaient devant les portes du tribunal administratif de Rennes. Un soulagement pour tous : ils sont rentrés à Angers avec Ousmane. Pour autant, le lycéen guinéen reste en situation irrégulière, sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français. Toujours expulsable.

« En théorie, il est censé partir. À partir du moment où les pièces produites sont des fausses, à mon sens, c’est difficile de lui donner un titre de séjour. » La directrice de cabinet du préfet, Sandra Guthleben, fait référence à l’acte de naissance d’Ousmane, qui lui a pourtant permis d’obtenir une pièce d’identité. Une histoire de mauvais tampon, rectifie l’éducatrice qui le suit depuis trois ans, à l’Association pour la sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence : « Cela ne veut pas dire que les renseignements indiqués sont faux. C’est quelqu’un de très fiable et responsable. Ce qui lui est arrivé est injuste ! »

Son entourage ne compte pas lâcher Ousmane. Lui veut poursuivre ce qu’il a engagé. Avec, bien accroché sur les épaules, son sac bleu. Dedans : « Tous les papiers qui prouvent ma scolarité, mes stages, mes démarches administratives. » Sa vie, sa raison d’être à Angers. »

Voir en ligne : http://jactiv.ouest-france.fr/actua...