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Les départements à la peine face à l’accueil des mineurs étrangers

Publié le 11-11-2016

Source : www.lemonde.fr

Auteur : Gaëlle Dupont

« Depuis une loi de mars 2016, tous les conseils départementaux doivent contribuer à la prise en charge des jeunes migrants isolés par l’Aide sociale à l’enfance. Un effort coûteux.

Qu’adviendra-il des quelque 2 000 jeunes se présentant comme mineurs et isolés, évacués de la « jungle » de Calais ? Aujourd’hui rassemblées dans 64 centres d’accueil et d’orientation pour mineurs répartis sur tout le territoire, ils devront patienter plusieurs semaines avant de savoir si le Royaume-Uni ouvre ses portes à ceux qui affirment avoir des attaches familiales sur son territoire.

La Grande-Bretagne les ayant jusqu’à présent acceptés au compte-gouttes, une partie des mineurs non accompagnés de Calais devrait rester en France. Après vérification de leur minorité et de leur isolement familial, ils seront pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Un système d’ores et déjà saturé.

Voilà en effet plusieurs années que les départements, responsables de la protection de l’enfance, sont confrontées à un afflux de jeunes migrants. Ils étaient un peu plus de 10 000 au 31 décembre 2015, soit un peu moins de 10 % des enfants hébergés par l’ASE sur le territoire national. Début novembre 2016, 6 200 nouveaux jeunes sont entrés dans le dispositif, sans compter ceux de Calais (sachant que dans le même temps un nombre non communiqué de majeurs en sont sortis).

Depuis une loi de 2007, ils doivent bénéficier du même accompagnement éducatif, sanitaire, et social que les enfants victimes de violences ou de négligences au sein de leur milieu familial. « Les prendre en charge est un devoir légal et moral », résume Dominique Versini, adjointe (sans étiquette) à la maire de Paris chargée des affaires sociales.

(...)

« Les budgets explosent »

C’est cette péréquation nationale, officialisée dans la loi de mars 2016 sur la protection de l’enfant, qui prévaut aujourd’hui. Au début des années 2010, quelques départements étaient en première ligne face aux premières vagues d’arrivées : Paris, la Seine-Saint-Denis, le Nord, le Pas-de-Calais… « Le budget consacré aux mineurs isolés est passé de 16 millions en 2008 à 43 millions d’euros fin 2011 », relate Stéphane Troussel, le président (PS) du département de Seine-Saint-Denis. Paris accueille toujours 1 500 mineurs étrangers, sur les 5 000 enfants placés qui lui sont confiés, pour un budget de 80 millions d’euros par an.

Mais tous les départements doivent désormais y contribuer. Une cellule basée au ministère de la justice est chargée de l’orientation des entrants. Les collectivités doivent s’adapter. « Les départements font ce qu’ils peuvent, résume un connaisseur du dossier. Les budgets explosent. »

« Les mineurs non accompagnés représentent 12 % des enfants placés dans le département, explique Alexandrine Leclerc, vice-présidente (UDI) du conseil départemental du Loiret chargée de l’enfance et de la famille. Nous ne le remettons pas en cause. Nous coupons dans d’autres dépenses qui n’étaient pas obligatoires. » « Le problème principal est l’anticipation impossible des arrivées », relève-t-on dans le département de Seine-et-Marne, qui accueille désormais 450 de ces jeunes.

Certains placent ces enfants dans le système classique, mais d’autres optent pour un hébergement dans des foyers de jeunes travailleurs ou des appartements autonomes partagés, où les mineurs bénéficient d’un accompagnement de l’ASE. « En dehors des plus fragiles et des plus jeunes, on ne met pas des jeunes de 16 à 18 ans qui ont traversé la moitié du globe dans des maisons d’enfants classiques, avec des éducateurs et des surveillants de nuit », argumente un expert.

L’accompagnement de ces mineurs ne pose pas de difficulté particulière, au contraire. « Ils ont été en quelque sorte “mandatés” par leurs familles pour s’en sortir, explique Mme Versini. Ce sont des jeunes extrêmement travailleurs et résilients, même s’ils sont parfois fragilisés. »

« Ils veulent parler le français et l’écrire, apprendre un métier, gagner de l’argent », renchérit-on dans les Alpes-Maritimes. Les services de la protection de l’enfance les orientent vers des formations diplômantes courtes, afin qu’ils tentent obtenir des titres de séjour rapidement après leur majorité. Dans le Loiret, Alexandrine Leclerc évoque des « parcours remarquables », mais s’inquiète de voir arriver « des mineurs de plus en plus abîmés ».

Quel sera le profil de ceux issus de la « jungle » de Calais ? Dans l’expectative, les départements qui contribuent déjà attendent que la solidarité nationale fonctionne. « Il y a besoin en permanence que l’Etat soit ferme pour éviter l’embolie du système », affirme Stéphane Troussel. Un pari perdu d’avance, selon le département des Alpes-Maritimes, car « le flux de nouveaux arrivants ne tarit pas ». »

Voir en ligne : http://www.lemonde.fr/immigration-e...