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Mort d’un mineur isolé : "Une plainte pour que Denko ne soit pas mort pour rien"

Publié le 29-03-2017

Source : www.lexpress.fr

Auteurs : RESF Marne et LIDH Mali, édité par Emilie Tôn

« La famille de Denko Sissoko, un Malien de 16 ans qui s’est défenestré du 8e étage de son foyer à Châlons-en-Champagne, a porté plainte pour homicide involontaire. D’après le RESF Marne et la LJDH Mali*, cette démarche contribue à mettre en lumière le traitement subi par les mineurs isolés étrangers.

Denko Sissoko, 16 ans, est arrivé seul du Mali en octobre 2016. Après avoir traversé plusieurs pays d’Afrique et la Méditerranée dans des conditions dangereuses, il a mis les pieds en France en possession de documents témoignant de son âge. En tant que mineur isolé étranger, il a été confié par le Procureur de la République à l’Aide Sociale à l’Enfance de la Marne et hébergé dans un foyer.

Cependant, le 5 janvier 2017, en dehors de tout cadre officiel procédural, le jeune homme a appris au commissariat que, sa minorité n’étant pas reconnue, sa prise en charge allait s’arrêter. Le 6 janvier, l’adolescent s’est jeté du 8e étage du foyer. D’après son entourage, il voulait échapper à la police. Denko disposait pourtant de papiers authentiques et n’avait pas menti sur son âge.

Vendredi 17 mars, les parents de Denko, des cultivateurs de Dindanko au Mali, ont saisi le Tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne. Ils portent plainte contre X pour homicide involontaire, mise en danger de la vie d’autrui et non-assistance à personne en danger.

"Une situation précaire minimaliste"

Mineur isolé de 16 ans, Denko a été maintenu, pendant les trois mois qu’ont duré l’évaluation de sa minorité, dans une situation précaire minimaliste. Sans suivi ni accompagnement effectif sur le plan éducatif, médical et psychologique, il souffrait d’un déficit de mesures visant à garantir sa sécurité, comme les autres mineurs isolés étrangers hébergés dans ce même immeuble.

En effet, le foyer ne réunit pas les mesures nécessaires à l’hébergement d’enfants. En terme de sécurité, d’abord, puisque le foyer se situe dans un quartier sensible et que les jeunes y vivent en compagnie d’adultes en grandes difficultés sociales. Ils ne sont pas supervisés la nuit et ne disposaient pas non plus de numéro d’urgence au moment de la mort de Denko.

Ensuite, les mineurs ne bénéficient pas d’encadrement médical, alors qu’ils sont en difficultés sanitaires et psychologiques. Il n’y a aucun suivi particulier et l’accès aux soins est compliqué.

Enfin, l’encadrement et le suivi éducatif et pédagogique font sérieusement défaut. Il n’y a que quatre éducateurs pour 73 mineurs. Les jeunes ne bénéficient d’aucune scolarisation ou cours de français durant les mois d’attente de l’évaluation et si celle-ci est négative, ils sont alors sont remis à la rue sans solution d’hébergement le jour-même du refus de prise en charge.

"Il n’était pas en mesure de se protéger"

A cause de ces conditions d’accueil, qui contreviennent en tous points aux dispositions applicables en matière de protection de l’enfance et de protection des mineurs isolés étrangers, l’instabilité psychologique est grande. La suspicion généralisée au sujet de leur minorité aggrave encore leur fragilité. L’anxiété est renforcée par les interventions répétées de la police des frontières à l’intérieur du foyer, au petit matin, pour expulser ou arrêter les jeunes en fin de prise en charge.

Ce défaut d’encadrement et cette suspicion ont eu des conséquences dramatiques sur l’état psychique de Denko. En déposant plainte, ses parents souhaitent situer les responsabilités de celles et ceux qui ont délaissé leur fils car, en sa qualité de mineur, il n’était pas en mesure de se protéger.

Sissoko Bagou et Dialy Keita refusent la thèse du suicide qui a été privilégiée. Ils souhaitent faire la lumière sur les circonstances de la mort de leur fils Denko. Les associations souhaitent, quant à elles, que les institutions soient contraintes de respecter les lois en matière de protection de l’enfance pour tous les mineurs isolés étrangers, pour que Denko ne soit pas mort pour rien. »

Voir en ligne : http://www.lexpress.fr/actualite/so...