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Paris : au cœur du centre d’accueil de nuit pour mineurs

Publié le 10-09-2017

Source : www.leparisien.fr

Auteur : Valentin Belleville

« Ouvert depuis le 21 mars pour les jeunes réfugiés, le centre d’hébergement de nuit de la Cité Charles Godon (IXe) a permis de mettre à l’abri quelque 2 000 mineurs.

Quand les portes s’ouvrent, à 18 heures, chaque soir, des sourires réconfortant et des voix rassurantes accueillent des jeunes garçons épuisés. Ces sourires, ces voix, ce sont celles de Namik, chef de service du centre, de Léa, Sineth et Mohamed, tous trois travailleurs sociaux. Ces garçons, ce sont des enfants. Des enfants qui ont déjà vécu ce que nombre d’adultes ne vivront jamais.
Afrique, Moyen-Orient, Europe de l’est, Asie… Des 2 000 jeunes qui y ont passé au moins une nuit, une vingtaine de nationalités s’est succédée depuis l’ouverture du centre d’hébergement de nuit de la Cité Charles Godon (IXe), le 21 mars dernier. Géré par l’association Coallia, spécialisée dans l’hébergement social, le centre a vu le jour « parce qu’Anne Hidalgo puis la mairie du IXe avec Delphine Bürkli ont œuvré en ce sens », souligne Namik. Complètement rénové, l’immeuble vétuste peut désormais accueillir jusqu’à 50 jeunes hommes par nuit dans des conditions tout à fait décentes, tant sur le plan matériel qu’humain.
Passé le calvaire de la rue, une fois entrés dans le centre, ils ne manquent de rien. « Ils commencent par se détendre, avec une douche. On leur donne boissons et gâteaux. A 20 h 30, c’est l’heure du dîner. On les laisse ensuite parler avec leur famille et aller sur Internet, puis à 22 heures c’est l’extinction des feux », raconte le chef de service. Dans le centre, chacun se voit offrir un nécessaire de toilette, un lit, des repas chauds et de qualité, des activités et une connexion Internet. Pour une question de sécurité sanitaire, draps, couvertures, traversins, couverts, tout est jetable. Chaque jour, lorsqu’il est vide, le centre est complètement désinfecté.

« C’est mes enfants quand ils entrent »
Pour décrocher cette mise à l’abri, les jeunes garçons sont orientés par les services d’Emmaüs, gestionnaire du centre de préaccueil de la Porte de la Chapelle, appelé « la Bulle », et ceux du DEMIE de la Croix-Rouge (Dispositif d’Evaluation des Mineurs Isolés Etrangers). Prévu pour les accueillir une nuit, le temps du traitement de leur situation, le centre subit l’afflux toujours intense des arrivées de réfugiés. Certains d’entre eux attendent le dénouement depuis plus de deux semaines. Ibrahim, 16 ans, est très soucieux : « Ça m’inquiète beaucoup, qu’est-ce qu’il va m’arriver ? »

Chaque soir, des dizaines arrivent. Souvent en pleine nuit. Ils resteront le temps de l’examen de leur situation par la Croix-Rouge. Deux issues sont possibles. Si la minorité est établie, le jeune est remis à l’aide sociale à l’enfance. Dans le cas contraire, déclaré majeur, il sera renvoyé à la Bulle. « Dans les deux cas, on ne les revoit plus », explique Namik, avec gravité. A chaque départ, c’est un déchirement pour l’équipe du centre, attachée à chacun. Pour le chef de service, la passion prend souvent le dessus : « ce sont mes enfants quand ils entrent ici ».
Avec quelque 10 000 nuitées comptabilisées, l’expérimentation du centre est positive pour Coallia. Reste un souci de taille, le matin, à 8 h 30, c’est le départ. Léa, présente depuis le début de l’aventure, interpelle : « à quand un hébergement de jour pour les mineurs ? »

Diallo : « Je me demande souvent comment je suis arrivé jusqu’ici »
« En Libye, on nous couche à l’arrière d’un pick-up, collés comme des sardines dans leur boîte. Le soleil nous sèche et les nuits nous gèlent. » Diallo, 16 ans, s’est retrouvé à la rue à la mort de sa grand-mère, qui l’avait élevé. Passé par un centre de formation de football en Côté d’Ivoire, son pays, il rêve de reprendre le chemin des terrains : « J’ai toujours rêvé de jouer pour l’équipe de France. Comme on dit, il faut garder espoir ». Torturé dans les prisons libyennes, passé près de la mort en Méditerranée, c’est d’une voix fatiguée qu’il explique son traumatisme : « Je me demande souvent comment je suis arrivé jusqu’ici » Depuis le 20 août au centre d’accueil, il se sent « bien, mais inquiet de la suite ». »

Voir en ligne : http://www.leparisien.fr/paris-7500...