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MNA : l’Etat devrait enfin aider les départements

Publié le 13-02-2018

Source : www.lagazettedescommunes.com

Auteur : Frédéric Ville

« Pour pallier l’afflux de mineurs étrangers, l’Etat, appelé au secours par les départements, augmentera sa prise en charge. La publication du rapport de la mission de réflexion, attendue ces jours-ci, a été de nouveau reportée, mais une note datée de janvier, que La Gazette s’est procurée, détaille les différents scénarios en discussion.
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Globalement, les MNA représentent 15 à 20 % des mineurs pris en charge par l’ASE. Le coût de leur prise en charge à ce titre est estimé en moyenne à 50 000 euros par mineur et par an, couvrant le logement, la nourriture, les frais d’éducation et de formation. Au total, l’accueil et la prise en charge de quelque 25 000 jeunes se déclarant mineurs en 2017 coûtait environ 1 Md€ aux départements. Ainsi, le Nord, département frontière, est passé de 591 jeunes migrants en 2015 à 1 100 en 2017 ; la Loire-Atlantique, perçue comme accueillante, de 50 en 2012 à 1 480 fin 2017 ; et la Corrèze, département rural, de 20 MNA en 2014 à 50 en 2017.

75 % de l’évaluation pour les départements

Actuellement, l’Etat ne rembourse aux départements que les cinq premiers jours de mise à l’abri des jeunes migrants avant l’évaluation de majorité, soit 1 250 euros par mineur. Les départements demandent qu’il prenne en charge les 40 jours que dure en moyenne cette évaluation. Une différence qui met en difficulté de nombreux départements. « Le Nord a inscrit 9,2 M€ au budget primitif 2018, soit 84 % de plus qu’au budget primitif 2017 », précise le président (DVD) du conseil départemental, Jean-René Lecerf.

En Loire-Atlantique, « pendant l’évaluation – 20 jours en moyenne -, le coût par jeune migrant est de 92 euros par jour pour l’hébergement, 350 euros pour l’évaluation et 500 euros pour la réorientation éventuelle vers un autre département », indique Fabienne Padovani, vice-présidente aux familles et à la protection de l’enfance au CD44. Soit un coût total de 4 M€ en 2017, dont 1 M€ remboursé. La Corrèze y consacre seulement 265 000 euros, mais l’Etat rembourse dans les mêmes proportions, soit 1 250 euros sur les 5 300 euros que coûte en moyenne une évaluation et mise à l’abri.

L’Etat à la rescousse pour l’évaluation…

Le président de la République a exprimé son accord pour une meilleure prise en charge par l’Etat dès juillet 2017. Des propos rappelés par Edouard Philippe lors du congrès de l’ADF en octobre dernier. Depuis, une mission bipartite de réflexion sur les MNA, composée de représentants de l’Etat et de départements, a travaillé sur deux scénarios. Ils devaient être présentés dans un rapport attendu le 15 février 2018, mais cette date a été reportée sine die. Une note de cette mission, datée de janvier 2018 et que La Gazette s’est procurée, détaille et chiffre ces deux options.

La première piste est de maintenir une évaluation décentralisée avec des moyens financiers supplémentaires octroyés par l’Etat sur la base d’une durée d’évaluation moyenne de 14 jours (maximum 25 jours), soit 70 à 106 M€ estimés pour 40 000 à 60 000 jeunes migrants évalués. La mission a néanmoins écarté l’hypothèse d’un remboursement aux frais réels des départements, en raison de son « caractère inflationniste ».

Seconde piste : l’Etat devient responsable, au plus tôt à partir de 2019, de l’évaluation et de la mise à l’abri. Il devrait alors construire des centres d’hébergement et mettre en place des plateformes interdépartementales d’évaluation. Coût estimé : 125 M€ pour 50 000 jeunes migrants accueillis par an.

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… et pour l’ASE ?

Dans les deux cas, les départements garderont en charge les jeunes reconnus mineurs au titre de l’ASE, celle-ci s’appliquant à tous les mineurs, sans conditions de nationalité.

Certains départements militent pour une sortie totale des mineurs étrangers du dispositif de l’ASE, estimant qu’il s’agit de migrants économiques ne relevant pas de la protection de l’enfance. Mais en l’état actuel des choses, l’explosion des coûts de l’ASE pour les départements implique aussi une participation de l’Etat. Elle a été fixée pour 2018, à titre exceptionnel, à un taux de 30 % au-delà du seuil de 13 000 jeunes. Mais elle devrait, conseille la mission, être portée à 40 % au-delà de 25 000 MNA et 50 % au-delà de 40 000.

Vers des solutions d’hébergement moins chères ?

Certains départements tentent de maîtriser les coûts de prise en charge au titre de l’ASE. En France, le coût moyen par jeune est de 150 à 200 euros par jour en maison de l’enfant à caractère social. « Mais beaucoup de MNA sont assez autonomes », explique Sophie Quériaud, directrice de la cohésion sociale de Corrèze. « Aussi, des appartements-relais seront expérimentés [dans le département] ce printemps avec neuf jeunes, pour un coût de 55 à 60 euros par jour ». Même chose en Loire-Atlantique, « avec 86 euros par jour à l’hôtel ou même 60 euros pour des jeunes de 16 à 18 ans dans des appartements ou collectifs », selon Fabienne Padovani. En Loire-Atlantique (20 jeunes) et en Meurthe-et-Moselle, une petite partie des MNA sont accueillis par des familles, ce qui, même si les départements défraient les familles, coûte moins cher qu’une prise en charge directe.

Mais le coût total en Loire-Atlantique est néanmoins de 13 M€ en 2017 (17 M€ évaluation comprise), soit 14 % du budget de l’ASE et 1,6 % du budget prévisionnel de 2017. « Le budget global de l’ASE n’augmentant pas, cela impacte nos autres politiques », note Fabienne Padovani. Idem dans le Nord où « tous les dispositifs d’hébergement de l’ASE sont saturés », comme « les 50 places supplémentaires pour les MNA créées fin 2017 ». Il y a bel et bien urgence. »

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