InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Actualités MIE > Le gouvernement face au défi de la prise en charge des mineurs étrangers non (...)

Le gouvernement face au défi de la prise en charge des mineurs étrangers non accompagnés

Publié le 8-03-2018

Source : www.lemonde.fr

Auteur : Marilyne Baumard

« Alors que les départements, en première ligne pour traiter les dossiers, sont débordés, l’exécutif prépare la refonte d’un dispositif aujourd’hui à bout de souffle.

Qui doit s’occuper des mineurs étrangers arrivés seuls sur le territoire national ? Est-ce au département ou à l’Etat de les prendre en charge ? Depuis le 15 février, un rapport de 56 pages, intitulé « Mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés », est entre les mains du premier ministre. Edouard Philippe va devoir trancher prochainement entre deux schémas, et en discutera avec l’Assemblée des départements de France lundi 12 mars.

Le chef du gouvernement devra aussi arbitrer une série de seize propositions visant à la réorganisation complète d’un dispositif à bout de souffle. En 2017, 50 000 évaluations ont été réalisées et 14 908 mineurs étrangers placés sous la coupe de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Confrontées à une hausse de 85 % des placements en un an, les structures d’accueil explosent. Quant à la justice des mineurs, elle s’engorge sous les procédures d’appel et beaucoup de jeunes se retrouvent à la rue, exclus de tout.

[...]

Sans compter que ceux qui font appel au juge pour contester une non-reconnaissance de minorité de la part de l’ASE dorment dans la rue en attendant leur convocation, alors même que « le Conseil national des barreaux a indiqué à la mission que, parmi l’ensemble des recours judiciaires examinés en 2016 et en 2017 à Paris, un jugement sur deux avait infirmé l’évaluation initiale et ordonné une admission à l’ASE ».

« Assurer une mise à l’abri immédiate et effective »

Face à cette situation, ou plutôt face aux interpellations des départements s’estimant débordés, Edouard Philippe, a demandé, le 30 octobre 2017, aux trois inspections (des affaires sociales, de l’administration et de la justice) et à l’Assemblée des départements de France, de se pencher ensemble sur ce sujet. En France, en effet, l’ASE, qui est une compétence des départements depuis les lois de décentralisation, place ces territoires en première ligne pour s’occuper des mineurs, alors que la lutte contre l’immigration, elle, est une prérogative régalienne.

[...]

Baptisé « compétences inchangées avec un remboursement accru de l’Etat », le scénario 1, laisserait les départements à la manœuvre mais augmenterait fortement la dotation étatique. Dans ce cas de figure, l’Etat financerait en moyenne quatorze jours d’hébergement (avec une fourchette allant de cinq à vingt-cinq jours, contre cinq jours actuellement), le temps de réaliser une évaluation plus robuste qu’aujourd’hui, enrichie d’un examen de santé pour tous. Le coût total pour l’Etat oscillerait entre 70 et 105 millions d’euros annuels.

Le scénario 2, souhaité par les départements, rendrait l’Etat responsable de l’accueil d’urgence des mineurs et de leur évaluation. Pour prendre la main, il devrait débourser 125 millions d’euros dont 20 millions d’euros pour créer 2 000 places dans des centres spécifiques (construits ou réhabilités) et prévoir entre 50 millions et 100 millions d’euros annuels pour les faire fonctionner avec les mêmes standards éducatifs que ceux imposés à l’ASE aujourd’hui.

Le préfet mettrait en œuvre l’évaluation des jeunes, soit par « prise en charge directe par des agents de préfectures, en lien avec la police de l’air et des frontières, des actes de vérification documentaires et de consultation des fichiers des étrangers », soit par délégation « dans le cadre de conventions, aux départements volontaires pour le faire, ou bien à des associations », ce qui est le cas aujourd’hui.

[...]

Aujourd’hui, le rapport rappelle que le taux de reconnaissance de la minorité varie de 9 % à 100 % selon les départements. Des résultats qui incitent certains jeunes à un « tour de France » de l’évaluation puisque les fichiers ne sont pas interconnectés. Mais ce nomadisme pourrait bientôt prendre fin car la mission préconise la création d’« un fichier biométrique des personnes évaluées majeures pour éviter les réévaluations ». Elle n’ajoute pas grand-chose en revanche au recours très contesté aux tests osseux qui doivent « rester exceptionnels », précise le texte.

[...]

Seize propositions

Ce scénario numéro 2 obligerait de toute façon l’Etat à imaginer une période de transition entre les deux systèmes. Des indiscrétions laissent penser que, si la formule a séduit l’Elysée au départ, elle n’a plus sa préférence aujourd’hui.

Au-délà de ces scénarios, le rapport liste une série de seize propositions adaptables dans les deux cas de figure. Les rapporteurs qui ont travaillé sur la gouvernance préconisent la mise en place d’un comité interministériel, la nomination d’un délégué interministériel rattaché au premier ministre et la création d’un observatoire des mineurs non accompagnés. Un bon pilotage sur ce sujet étant jugé essentiel pour être capable de gérer un phénomène en forte croissance et très mouvant car il s’adapte sans cesse »

Voir en ligne : http://www.lemonde.fr/societe/artic...