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La France condamnée pour « traitement dégradant » sur un mineur isolé à Calais

Publié le 28-02-2019

Source : La Croix

Auteure : Flore Thomasset

Extraits :

«  La Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour « traitement dégradant » infligé à un mineur étranger non-accompagné et non pris en charge dans la jungle de Calais, en 2015 et 2016.

Une décision en forme d’avertissement, même si la situation s’est globalement améliorée depuis trois ans.

(...) Une décision inédite et « rédigée dans des termes très sévères », souligne Nicolas Hervieu, juriste et spécialiste de la CEDH, qui y voit un « coup de semonce » pour la France.

Un « traitement dégradant » sur un jeune mineur

(...) Elle juge que non seulement la France n’a pas appliqué la décision du juge des enfants qui avait ordonné, en février 2016, son placement par l’Aide sociale à l’enfance, mais qu’en plus, avant ce jugement, « les autorités ne l’avaient même pas identifié alors qu’il se trouvait sur le site de la lande depuis plusieurs mois et que son jeune âge aurait dû tout particulièrement attirer leur attention. »

Se disant « consciente de la complexité de la tâche », face à des jeunes qui souhaitent souvent ne pas rester en France – le requérant vit désormais en Angleterre –, la Cour estime néanmoins que les autorités n’ont pas « fait tout ce que l’on pouvait raisonnablement attendre d’elles pour répondre à l’obligation de prise en charge et de protection » de ce mineur. La France devra lui verser 15 000 €.

Un « standard de protection » contraignant

Cette décision devrait conduire l’État à « revoir sa politique de prise en charge des mineurs non accompagnés pour que, le plus tôt possible, leur situation soit identifiée », analyse Nicolas Hervieu, remarquant que la Cour s’appuie sur des rapports du Défenseur des droits, qui restent d’habitude sans réponse. À défaut, cette décision contraindra les juges français qui devront « tenir compte du standard de protection » fixé par la Cour dans les affaires dont ils pourraient, à l’avenir, être saisis.

Elle donnera ainsi un poids et des arguments aux associations. « Cette décision est une très bonne nouvelle puisqu’elle met en évidence le fait que la France ne respectait pas ses propres lois », se félicite François Guennoc, vice-président de l’association L’Auberge des migrants. Aujourd’hui, la situation s’est nettement améliorée, remarque-t-il, même s’il pointe encore des difficultés, comme un manque de places et des maraudes insuffisantes, puisqu’elles n’ont pas lieu la nuit. (...)

Une situation « catastrophique » à Grande-Synthe

Il reste pourtant incapable de dire combien de mineurs vivent aujourd’hui autour de Calais ou sur le littoral nord. « Dans le département, un millier de mineurs non accompagnés ont été mis à l’abri en 2017, et seulement 300 en 2018 », cite-t-il. Une baisse drastique qui s’explique notamment « par les opérations policières de dispersion sur le territoire qui n’aident pas à l’identification ni au suivi de ces jeunes ».

Par ailleurs, si la situation des mineurs s’est améliorée dans le Pas-de-Calais, elle est jugée « catastrophique » dans le Nord par les associations. « Tout ce qu’on a gagné à Calais par des condamnations en justice – l’accès à l’eau, aux toilettes, aux douches, à des repas –, fait défaut dans le Nord et en particulier à Grande-Synthe, déplore Brice Benazzouz, coordinateur général chez Médecins du monde. On a 200 à 300 personnes, en grande majorité des familles, qui vivent à la rue avec pour seul accès à l’eau, une rampe de 8 robinets d’eau froide installée par la mairie. » La décision de la CEDH y changera-t-elle quelque chose ? La réponse appartient aux autorités mais aussi aux associations, qui réfléchissent actuellement à mener une action en justice.

L’Unicef et une vingtaine d’associations poursuivent l’État

Dix-neuf associations et syndicats, dont l’Unicef, contestent la légalité d’un décret issu de la loi asile et immigration, « relatif à l’évaluation des personnes se déclarant mineures ». Elles mènent trois actions :

  • La saisine du Conseil d’État en référé pour qu’il suspende l’expérimentation qui a débuté dans trois départements (Essonne, Isère et Bas-Rhin)
  • La saisine du Conseil d’État sur le fond, pour faire annuler le décret qui organise, selon elles, un « fichage de mineur(e) s à d’autres fins que celles liées à leur protection »
  • La transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité, considérant qu’il est « impératif que le Conseil constitutionnel veille au respect des droits de l’enfant ».  »

Retrouvez l’arrêt de la CEDH ici.

Retrouvez le CP collectif ici.

Voir en ligne : https://www.la-croix.com/France/Jus...