InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Actualités MIE > En prison ou en rétention, les mineurs pas toujours bien traités

En prison ou en rétention, les mineurs pas toujours bien traités

Publié le 27-03-2019

Source : Libération

Auteur : Kim Hullot-Guiot

Extraits :

«  Rendu public ce mercredi, le rapport annuel de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté pointe l’augmentation du nombre de mineurs en détention, et s’inquiète en particulier du sort des mineurs isolés.

Surpopulation carcérale, personnes hospitalisées dans des unités psychiatriques contre leur gré, conditions de vie dans les centres de rétention… Chaque année, la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Adeline Hazan, produit un rapport issu de ses observations de terrain et des préconisations pour assurer le respect des droits fondamentaux des personnes détenues et retenues. Ce mercredi, il a été diffusé publiquement, après avoir été remis aux présidents de la République et du Sénat – mais, curiosité, pas de l’Assemblée nationale, puisque d’après Adeline Hazan, Richard Ferrand ne se serait pas rendu disponible pour la recevoir.

Le traitement des mineurs enfermés en centre de détention ou en centre éducatif fermé, et en particulier celui des mineurs étrangers isolés, fait l’objet dans le rapport 2018 d’une attention particulière. Premier constat : le nombre de mineurs incarcérés « n’a jamais été aussi important, alors que la détention des mineurs doit être exceptionnelle », écrit Adeline Hazan. Après avoir visité les quartiers pour mineurs de cinq prisons et trois établissements pénitentiaires pour mineurs, la CGLPL n’a pas constaté de situation de surpopulation, mais quelques problèmes demeurent. Ainsi, les conditions matérielles restent par exemple très inégales d’un lieu de détention à l’autre.

« Sorte de féodalité »

Dans les prisons accueillant mineurs et majeurs, la séparation n’est en outre pas toujours suffisante et les mineurs se retrouvent à la merci des adultes qui voudraient les utiliser pour leurs trafics, notamment de tabac : « Dans un gros établissement de banlieue parisienne s’est même établie une sorte de féodalité dans laquelle chaque mineur semble entretenir à distance une relation privilégiée, une sorte de filiation morale ou de tutelle, avec un adulte. L’expression "mon majeur", couramment utilisée, en est l’illustration », écrit Adeline Hazan. Deuxième source d’inquiétude, dans un autre centre pénitentiaire : la proximité du quartier disciplinaire des mineurs avec le quartier d’isolement des majeurs, où sont notamment placés des détenus radicalisés, a pu aboutir à ce que certains mineurs « tenaient à leur sortie de quartier disciplinaire des propos qui n’étaient pas les leurs à leur entrée ».

Si le nombre de mineurs détenus est si élevé, explique la CGLPL, c’est en partie parce que le nombre de mineurs étrangers isolés, c’est-à-dire présents sans parents sur le territoire, en compose une part importante. Cette situation ne s’explique pas tant par une plus grosse propension à commettre des méfaits mais plutôt parce qu’ils sont davantage incarcérés pour des faits similaires : « Ces jeunes gens sont manifestement incarcérés dans un souci de protection, car la plupart du temps les faits qu’ils ont commis ne conduiraient pas à l’incarcération d’un enfant vivant avec sa famille », peut-on lire dans le rapport. (...)

Point noir : la discipline

Concernant les centres éducatifs fermés, la CGLPL constate que la composition des équipes encadrantes est assez instable, et que les conditions matérielles sont très inégales d’un centre à l’autre. A l’exception d’un des centres visités, tous étaient dégradés, pas toujours propres et rangés : « On ne saurait entreprendre l’éducation d’enfants dans un pareil cadre », résume-t-elle. Pire, le suivi éducatif est qualifié de « laborieux », même si plusieurs établissements font preuve de « réelle volonté en la matière », en organisant des activités éducatives, des stages de découverte professionnelle, des événements sportifs ou culturels permettant aux jeunes de rester ouverts sur l’extérieur. Un point noir demeure, celui de la discipline, avec des punitions parfois inadaptées ou violentes (qui vont de l’interdiction de la cigarette à des plaquages au sol). « On ne peut manquer de rappeler que les enfants placés en centre éducatif fermés ne le sont pas dans une optique sécuritaire mais éducative », souligne la CGLPL. Qui rappelle au passage son opposition à l’ouverture de nouveaux centres éducatifs fermés, prévus en septembre dernier par la garde des Sceaux.

Enfin, comme elle l’avait déjà fait en juin 2018, la CGLPL s’inquiète de la hausse continue du nombre de mineurs enfermés avec leurs parents en centre de rétention. Il ne s’agit pas là d’enfants ayant commis une entorse à la loi, mais présents en France sans autorisation. La CGLPL soupçonne que ces enfants soient retenus avec leurs familles pour des raisons purement logistiques (il est plus simple d’expulser de bon matin une famille si elle est entièrement présente au même endroit). « L’enfermement des enfants, même pour une courte durée, a nécessairement des conséquences négatives sur eux (...)
Des constats partagés par la Cour européenne des droits de l’homme et le Défenseur des droits, Jacques Toubon.
 »

Voir en ligne : https://www.liberation.fr/france/20...