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Jeunes migrants à la Croix-Rousse : vers une nouvelle situation de crise ?

Publié le 1er-07-2022

Date de la publication : 01/07/2022
Source : Rue89Lyon
Autrice : Marie Allenou

« Depuis mai 2021, le collectif soutien/migrants de la Croix-Rousse accueille et loge de jeunes migrants en attente d’être reconnus mineurs. Avec la fermeture de plusieurs lieux d’hébergement dans le 1er et 4e arrondissements à partir de ce lundi 4 juillet, une quarantaine d’entre eux pourraient se retrouver à la rue, sans solution.

Quelques tentes ont déjà réapparues dans la montée de la Grande Côte à la Croix-Rousse. Le lieu avait servi de campement pour plusieurs dizaines de jeunes migrants fin 2021. Alors que la plupart avaient fini par trouver refuge dans des squats gérés par un collectif de citoyens et l’association Coordination Urgence Migrants, une nouvelle crise se dessine pour ces jeunes.

Une partie d’entre eux vont être pris en charge par les pouvoirs publics, mais les exilés restants pourraient se retrouver obligés de s’installer dans sous une toile de tente dès la semaine du 4 juillet.

Les militants qui portent le suivi et l’hébergement de ces exilés depuis plus d’un an, se disent à bout de force et ne pourront pas assurer le relogement citoyen de ces jeunes.

Des jeunes migrants à la situation administrative complexe

Non reconnus mineurs, ces jeunes migrants sont en recours devant le juge des enfants. Arrivés sur le territoire français il y a quelques semaines, voire quelques mois, ils ont d’abord passé une évaluation de minorité conduite par l’association Forum réfugiés pour le compte de la Métropole de Lyon.

À l’issue de cette évaluation, la Métropole ne les a pas considérés comme mineurs et ne les a donc pas pris en charge au titre de sa compétence de protection de l’enfance. À la rue, ces jeunes en provenance d’Afrique subsaharienne sont accompagnés par des collectifs et des associations dans leur recours auprès du juge des enfants pour être reconnus mineurs et être pris en charge par les services de la Métropole.

A Lyon, environ 80% des jeunes qui passent devant un juge des enfants finissent par être reconnus mineurs.

Une quarantaine de jeunes migrants sans solution d’hébergement à la Croix-Rousse

L’un des deux squats qui les accueillait, le Chemineur, va être évacué dans moins d’une semaine. Ses habitants vont être relogés par la préfecture du Rhône et la Métropole de Lyon.

L’autre, "chez Gemma" , est fermé depuis plusieurs semaines suite à un incendie. Ses habitants, ainsi que d’autres jeunes qui dormaient dans une salle municipale ont trouvé refuge dans un gymnase ouvert en urgence par la Ville et la préfecture. Il va cesser de les accueillir ce lundi 4 juillet. Une partie d’entre eux devraient trouver une place en hébergement d’urgence à la fermeture du gymnase.

Malgré ces relogements, le collectif soutien/migrants de la Croix-Rousse dénombre entre 40 et 50 jeunes qui n’auraient aucune solution. Nicole, membre du collectif, se montre pessimiste :

"Au collectif, on n’a plus les forces de faire ce qu’on a fait jusqu’à présent, surtout qu’on a fait le travail des institutions. On n’est pas capables de repartir pour une ouverture de squat, de la livraison de repas ou de la gestion des nouveaux arrivants. C’est très dur, moi je n’en dors plus la nuit."

Une situation qui pourrait amener à ce qu’un campement se reforme "probablement" sur les Pentes de la Croix-Rousse, car le centre d’évaluation de minorité de Forum réfugiés est situé non loin dans le 1er arrondissement.

Des pouvoirs publics sollicités par le collectif pour reloger les jeunes migrants

Particulièrement mobilisés depuis mai 2021, le collectif a obtenu une première avancée : l’ouverture d’une quarantaine de places, dans un dispositif financé par la Métropole et la préfecture, pour loger et accompagner ces jeunes en recours. La création de cette "Station 2" a été conditionné à la fin de l’occupation du squat Le Chemineur, où un diagnostic social des jeunes présents a été réalisé. Mais une quinzaine d’entre eux, qui dorment sous un barnum, n’ont pu en bénéficier.

Mais qui doit prendre en charge ces jeunes, dont la plupart pourraient être mineurs ? La réponse est floue car leur situation administrative est à cheval entre la minorité et la majorité : mineurs, ils devraient être pris en charge par la Métropole de Lyon, majeurs, ils relèvent du droit à l’hébergement d’urgence de la préfecture.

Ce jeudi 30 juin, une réunion s’est tenue entre les collectifs, les mairies des 1er et 4e arrondissements, la Ville de Lyon et la Métropole pour faire un point sur la situation. Sandrine Runel, adjointe à la Ville en charge des solidarités et de l’inclusion, acte :

"Aujourd’hui, nous n’avons pas de solutions à proposer, ce qui ne veut pas dire qu’on ne continue pas à en chercher. Peut-être que d’ici lundi on pourrait y arriver. On reste en lien avec les collectifs et on voit au jour le jour"

Elle soutient que la Ville de Lyon ne peut pas faire plus que ce qu’elle n’a déjà fait. Elle évoque la mise à disposition de 37 places d’hébergement en 2021 dans son patrimoine vacant pour des jeunes en recours, avec une prise en charge des repas.

Quelle solution pour les jeunes migrants de la Croix-Rousse ?

Le collectif plaide, a minima, pour une ouverture d’un gymnase le temps de l’été. Les militants s’inquiètent, car l’été, les audiences auprès du juge sont moins nombreuses. Moins de jeunes sont reconnus mineurs et pris en charge, et donc, ils sont plus nombreux à rester à la rue pendant plusieurs mois. Du côté de la préfecture, chargée de l’hébergement d’urgence, on affirme :

"On est en train de trouver une solution pour que tous puissent être relogés, pour anticiper la fermeture du squat et du gymnase".

Pour le plus long terme, le collectif souhaiterait voir l’ouverture d’un plus grand nombre de place au sein du dispositif "Station". Selon les militants, environ 150 places supplémentaires seraient nécessaires pour que les nouveaux arrivants ne se retrouvent pas à la rue. Ils plaident également pour l’ouverture d’un lieu d’accueil de jour. Nicole explique :

"Si on n’avait pas été obligés de faire centre d’accueil, la situation aurait été plus facile à gérer. Au Chemineur, on recevait une dizaine de jeunes par semaine, refusés par Forum réfugiés, paumés et qui n’avait pas d’endroit où dormir. Ce qui manque c’est un lieu d’accueil pour qu’ils se posent, rechargent leurs téléphones, prennent une douche, etc".

Pour le collectif comme les pouvoirs publics, la semaine à venir s’annonce compliquée, avec l’évacuation du gymnase lundi 4 juillet et celle du Chemineur le mercredi 6. Surtout, pour les jeunes migrants qui pourraient se retrouver sans toit, c’est synonyme d’une forte inquiétude. »


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www.rue89lyon.fr