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Le Conseil d’État valide les dérogations au CESEDA à Mayotte

Publié le 28-07-2015

Source : http://www.dalloz-actualite.fr

Auteur : Diane Poupeau

Extrait :

« La haute juridiction a rejeté deux requêtes qui tendaient à l’annulation de dispositions d’une ordonnance et d’un décret prévoyant des dérogations au CESEDA sur l’île de Mayotte.

CE 22 juill. 2015, req. n° 381550
CE 22 juill. 2015, req. n° 383034

Par deux décisions rendues le 22 juillet 2015, le Conseil d’État a validé l’ordonnance et le décret portant extension et adaptation à Mayotte du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Il était tout d’abord saisi par plusieurs associations de soutien aux étrangers d’un recours pour excès de pouvoir (n° 381550) contre six articles de l’ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014 portant extension et adaptation à Mayotte du CESEDA. Était notamment critiquée, au nom du droit au recours effectif garanti par l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme (Conv. EDH), l’absence d’effet suspensif des recours dirigés contre les arrêtés portant obligation de quitter le territoire pris sur l’île.

La haute juridiction a, cependant, estimé que « rien ne fait obstacle au recours, par la personne qui en fait l’objet, aux procédures de référé prévues par le livre V du code de justice administrative, en particulier celle du référé-suspension, prévue par l’article L. 521-1 de ce code […] mais aussi celle du référé-liberté, prévue par l’article L. 521-2 de ce même code ». Rappelons que cette absence de caractère suspensif a déjà valu à l’État français deux condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme. En 2007, la procédure de référé-liberté avait ainsi été jugée contraire à l’article 13 de la convention (CEDH 26 avr. 2007, n° 25389/05, Gebremedhin c/ France, AJDA 2007. 940 ; ibid. 1918, chron. J.-F. Flauss ; D. 2007. 2780 , note J.-P. Marguénaud ; AJ pénal 2007. 476 , obs. H. Gacon ). En 2012, la Cour avait jugé que le régime dérogatoire applicable en Guyane n’offrait pas de garanties procédurales adéquates contre l’éloignement arbitraire (CEDH 13 déc. 2012, n° 22689/07, De Souza Ribeiro c/ France, Dalloz actualité, 21 déc. 2012, obs. C. Fleuriot ; AJDA 2012. 2408 ; ibid. 2013. 165, chron. L. Burgorgue-Larsen ; D. 2013. 324, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot ; RFDA 2013. 576, chron. H. Labayle, F. Sudre, X. Dupré de Boulois et L. Milano ; Rev. crit. DIP 2013. 448, note F. Jault-Seseke ).

La haute juridiction précise toutefois que « les dispositions attaquées […] ne peuvent recevoir application que dans le respect des engagements internationaux de la France ; que le respect des exigences découlant du droit au recours effectif garanti par la [Conv. EDH] implique que la mise en œuvre des mesures d’éloignement forcé soit différée dans le cas où l’étranger qui en fait l’objet a saisi le juge des référés du tribunal administratif, jusqu’à ce que ce dernier ait informé les parties de la tenue ou non d’une audience ou, en cas de tenue d’une audience, jusqu’à ce qu’il ait statué, de telle sorte que les étrangers faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français soient mis à même d’exercer utilement les voies de recours qui leur sont ouvertes ; que telle est d’ailleurs la pratique à laquelle le ministre de l’intérieur a prescrit au préfet de Mayotte de se conformer, par une note du 3 avril 2013 ; que, dans ces conditions, l’ensemble des recours offerts aux étrangers faisant l’objet d’une mesure d’éloignement forcé à Mayotte garantit, contrairement à ce qui est soutenu, le droit d’exercer un recours effectif susceptible de permettre l’intervention du juge en temps utile, alors même que le recours dirigé contre cette mesure est par lui-même dépourvu de caractère suspensif ».

Des dérogations justifiées

Dans un second arrêt (n° 383034), le Conseil d’État a refusé de faire droit à la demande d’annulation de quatre dispositions du décret n° 2014-527 du 23 mai 2014 portant modification du CESEDA en ce qui concerne, notamment, Mayotte. Les associations requérantes reprochaient aux articles 6 et 8 du décret l’instauration de dispositions transitoires s’agissant des locaux de rétention administrative de l’île. Ces dispositions n’imposent, en effet, pas une surface minimale de 10 m² par personne, ni des chambres non mixtes comprenant au maximum six personnes, ni la présence d’une salle de loisirs, d’un accès au téléphone, d’une salle permettant de recevoir les visites des familles et d’un local réservé aux avocats. Pour la haute juridiction, cette situation « est justifiée, pendant la période de construction d’un centre de rétention administrative répondant aux normes de droit commun, par les contraintes particulières, notamment d’ordre matériel, qui existent à Mayotte ». »

Voir en ligne : http://www.dalloz-actualite.fr/flas...