Rapport de la Cour des Comptes - La départementalisation de Mayotte : Une réforme mal préparée, des actions prioritaires à conduire

Source : http://www.ccomptes.fr

Date : Janvier 2016

« Extraits p.113

B - La prise en charge défaillante de l’aide sociale à l’enfance par le Département

La loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance a consacré les départements comme chefs de file de la protection de l’enfance dans sa double dimension de protection administrative et judiciaire, l’État conservant la prise en charge des mineurs délinquants. Elle assigne aux départements trois objectifs : le développement de la prévention, l’amélioration du repérage et du traitement des informations relatives aux situations de danger, la diversification et l’individualisation des modes de prise en charge des enfants protégés.

L’ordonnance n° 2008-859 du 28 août 2008 relative à l’extension et à l’adaptation outre-mer de diverses mesures bénéficiant aux personnes handicapées et en matière d’action sociale et médico-sociale place la protection de l’enfance au rang des compétences obligatoires pour le Département de Mayotte à compter du 1er janvier 2009129 et lui étend l’ensemble des dispositions relatives à la protection de l’enfance et à l’ASE (Livres I et II du code de l’action sociale et des familles).

Sous la responsabilité du président du conseil départemental, le service de l’ASE est chargé d’une mission de soutien matériel, éducatif et psychologique au bénéfice des mineurs et jeunes majeurs de moins de 21 ans confrontés à des difficultés risquant de compromettre gravement leur équilibre, leur développement physique, affectif, intellectuel et social ou de mettre en danger leur santé, leur sécurité, leur moralité, ainsi que des actions de protection nécessaires. Il a également pour mission de pourvoir à l’ensemble des besoins de ces mineurs et de veiller à leur orientation, en collaboration avec leur famille ou leur représentant légal.

La mission qui incombe au Département dépasse de fait ses capacités, comme elle dépasserait celles de n’importe quel autre département métropolitain ou d’outre-mer : environ 3 000 mineurs isolés sont présents sur le territoire, dont 500 à 600 sans référent adulte. La Commission nationale consultative des droits de l’homme a estimé entre 4 000 et 9 000 le nombre des mineurs isolés étrangers présents sur le reste du territoire national.

1 - Une action départementale très insuffisante

Après avoir créé un service de l’ASE dès 2006, le Département ne s’est jamais complètement emparé de cette compétence devenue obligatoire pour lui, au double motif que la population à protéger est majoritairement constituée de mineurs étrangers en situation irrégulière et qu’il n’a pas à supporter seul les conséquences, notamment financières, de l’incapacité de l’État à contrôler les frontières, qui a pour conséquence un nombre de mineurs à protéger extrêmement élevé. Il souligne aussi qu’il n’a reçu aucune compensation financière au titre du transfert de cette compétence.

Le Département ne s’est ainsi jamais doté d’un projet de service, en dépit du caractère obligatoire et structurant de ce document qui définit les objectifs de la collectivité dans le domaine de la protection de l’enfance en danger et présente les possibilités et les modalités d’accueil des mineurs, l’organisation et le fonctionnement du service, ainsi que le rôle des intervenants. L’absence de projet de service nuit d’autant plus à la conduite de l’action de la collectivité que le règlement départemental d’aide sociale ne peut lui être substitué en raison de son obsolescence et de son imprécision, notamment en matière de prise en charge des enfants.

[...] »

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