Tribunal administratif de Poitiers – Ordonnances n°1601537, n°1601535, n°1601536 du 12 juillet 2016 – Référé-liberté – Scolarisation des mineurs isolés confiés à l’ASE – Le président du conseil départemental est enjoint de procéder à la pré-inscription ou à l’inscription des mineurs isolés dans un établissement scolaire

Résumé :

Le juge des référés du tribunal administratif, saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 du CJA ("référé-liberté"), reconnaît que le département, en charge des mineurs isolés placés au titre de l’aide sociale à l’enfance, en s’abstenant de prendre toutes autres mesures que l’hébergement dans un hôtel, a méconnu à l’obligation posée par les dispositions de l’article L. 112-4 du CASF et le jugement du juge des enfants.

Le département a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale en méconnaissant l’obligation posée par les dispositions de l’article L.112-4 du CASF et du jugement par lequel le juge des enfants a autorisé « l’aide sociale à l’enfance [à] exercer pour le mineur les actes de l’autorité parentale concernant sa santé, son éducation et ses démarches administratives ».

Le président du conseil départemental est enjoint de procéder à la pré-inscription ou à l’inscription des mineurs isolés dans un établissement scolaire dans un délai de 30 jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Extraits des ordonnances :

« […].

4. Considérant qu’aux termes de l’article 375 du code civil : « Si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d’assitance éducative peuvent être ordonnées par la justice à la requête (...) du mineur lui-même ou du ministère public. (...). » ; qu’aux termes de l’alinéa 3 de l’article 375-2 de ce code : « Le juge peut aussi subordonner le maintien de l’enfant dans son milieu à des obligations particulières, telles que celle de fréquenter régulièrement un établissement sanitaire ou d’éducation, ordinaire ou spécialisé, le cas échéant sous régime de l’internat ou d’exercer une activité professionnelle » ; qu’aux termes de l’article 375-3 du même code : « Si la protection de l’enfant l’exige, le juge des enfants peut décider de le confier : (...) 4 ° A un service ou à un établissement habilité pour l’accueil de mineurs à la journée ou suivant toute autre modalité de prise en charge ; (...). » ; qu’il résulte des dispositions combinées de l’alinéa 2 de l’article 375-4 et du 4° de l’article 375-3 que le juge peut assortir la remise de l’enfant à un service départemental d’aide sociale de l’obligation de fréquenter un établissement d’éducation ordinaire, modalité prévue par l’alinéa 3 de l’article 375-2 ;

5. Considérant que les conclusions de M. tendait à ce qu’il soit enjoint à l’autorité départementale de lui permettre de fréquenter un établissement scolaire ou de formation dans le cadre de la prise en charge ordonnée par le juge judiciaire, n’apparaissent pas, en cas de carence de l’autorité publique à qui a été confié le mineur, comme manifestement insusceptibles de se rattacher à un litige relevant de la compétence du juge administratif ;

[…].

8. Considérant qu’en s’abstenant jusqu’à présent de prendre toutes autres mesures que l’hébergement dans un hôtel de M., mineur isolé étranger âgé de 17 ans, le maintenant depuis des mois isolé et désœuvré, sans CMU, et en refusant d’accepter de le préinscrire ou l’inscrire dans un établissement scolaire ou de formation au titre de l’année scolaire 2016-2017, le département de la Vienne, méconnaissant l’obligation posée notamment par les dispositions précitées de l’article L.112-4 du code de l’action sociale et des familles et du
jugement du 29 février 2016 du juge des enfants du tribunal de Poitiers autorisant « l’aide sociale à l’enfance [à] exercer pour le mineur les actes de l’autorité parentale concernant sa santé, son éducation et ses démarches administratives », a porté, au cas particulier, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, constitutive en l’espèce d’une situation d’urgence ;
qu’ainsi il y a lieu dans les circonstances de l’espèce d’enjoindre au président du conseil départemental de la Vienne de prendre les mesures nécessaires pour assurer la préinscription ou l’inscription du requérant dans un établissement scolaire de la Vienne dans un délai de 30 jours à compter de la notification de la présente ordonnance, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

[…]. »

Ordonnances disponibles en format pdf ci-dessous :

TA Poitiers – Ordonnances n°1601537, n°1601535, n°1601536 du 12 juillet 2016
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