Cour d’Appel de Douai – Chambre des mineurs – Arrêt n°135/2017 du 9 mars 2017 – Assistance éducative – L’article 99 du code de la famille congolais n’impose pas trois légalisations – Les mentions figurant sur l’acte de naissance légalisé par un notaire et par le consulat général de la RDC font foi

Résumé :

Un mineur isolé ressortissant congolais (RDC) saisit le juge des enfants suite à une décision du conseil départemental lui refusant son admission à l’ASE motivée par son refus de se présenter à la police aux frontières, par son récit de vie et ses explications quant aux conditions d’obtention de ses documents d’identité et par son apparence physique. Le juge des enfants dit qu’il n’y a pas lieu à intervention au titre de l’assistance éducative. Il interjette appel de cette décision.

La Cour d’appel infirme la décision en retenant que le département n’apporte pas d’éléments suffisants afin de renverser la présomption de l’article 47 du code civil. En effet, la Cour relève que la PAF a émis un avis défavorable uniquement en raison de l’absence de légalisation par le ministère des affaires étrangères de Kinshasa et par le consulat de France et que le département soutient que, conformément à l’article 99 du code de la famille congolais, l’acte de naissance de l’intéressé doit être légalisé par le ministère des affaires étrangères de Kinshasa, en plus de sa double légalisation par un notaire et par le consulat général de la RDC. Or, l’article 99 du code de la famille congolais n’impose pas trois légalisations. En conséquence, la Cour d’appel conclut à la minorité de l’intéressé en retenant les mentions figurant sur les actes d’état civil.

Extraits :

« […]

Aux termes des dispositions de l’article 47 du code civil, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.
Il en résulte que les actes étrangers bénéficient, jusqu’à preuve du contraire, d’une présomption de régularité. En cas de contestation, il appartient à l’administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité de l’acte litigieux.

En l’espèce, Monsieur a produit aux débats une copie intégrale d’un acte de naissance, un jugement supplétif d’acte de naissance rendu le 10 février 2016, un acte de signification de cette décision en date du 11 février 2016 et un certificat de non-appel en date du 19 mars 2016.

La police aux frontières a conclu que les actes analysés présentaient les caractéristiques de documents authentiques. Si elle a émis un avis défavorable, c’est uniquement en raison de l’absence d’éléments de légalisation par le ministère des affaires étrangères de Kinshasa et par le consulat de France, dont elle a précisé qu’elles étaient exigées par le droit congolais, en plus de la légalisation par un notaire prévue par les dispositions de l’article 99 du code de la famille congolais.

En l’espèce, il est constant que l’acte de naissance de Monsieur M. . est légalisé par un notaire depuis le 7 avril 2016 et par le consulat général de la République Démocratique du Congo à Anvers depuis le 23 novembre 2016.

Le Département du Nord, qui soutient, en s’appuyant sur l’avis de la police aux frontières, que ce document doit en outre être légalisé par le ministère des affaires étrangères de Kinshasa, ne cite à l’appui de son argument que les dispositions de l’article 99 du code de la famille congolais.

Or ces dernières sont ainsi rédigées :

“Sauf dispositions spéciales prévues aux règles propres à chacun des actes de l’état civil, toute personne peut, moyennant paiement des frais, se faire délivrer des copies des actes qui sont inscrits aux registres de l’état civil.

Ces copies délivrées certifiées conformes au registre portent la date de leur délivrance, énoncée en toutes lettres et sont revêtues du sceau de l’autorité qui les a délivrées.

Elles doivent être, en outre, légalisées lorsqu’il y a lieu de les produire devant les autorités étrangères.

Il peut être délivré de simples extraits qui contiennent le nom de la collectivité ou de la commune urbaine ou rurale où l’acte a été dressé, la date de son établissement, la nature précise de l’acte et des mentions éventuelles, le nom, le sexe de celui ou de ceux qui le concernent.

Ils sont signés par l’autorité qui les délivre et sont revêtus du sceau de cette autorité. En cas de délivrance d’actes de l’état civil requis pour des besoins administratifs, la délivrance se fera uniquement par extrait et sans frais.

Lorsque l’officier de l’état civil constate que l’acte de l’état civil n’a pas été inscrit, il établit un certificat négatif. Les copies et extraits d’actes de l’état civil ainsi que les certificats négatifs font foi jusqu’à l’inscription de faux.”

II est patent que ce texte n’impose nullement trois légalisations.

[…].

Dès lors, faute pour le Département d’apporter des éléments suffisants en faveur du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité de l’extrait d’acte de naissance produit aux débats par Monsieur, il convient de retenir que les mentions qui y figurent font foi.

Dans la mesure où elles établissent la minorité de Monsieur M. , la décision entreprise sera infirmée en toutes ses dispositions.

[…]. »

Arrêt disponible en format pdf ci-dessous :

CA_Douai_09032017_n°135/2017
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