Résumé :
Un mineur isolé ressortissant guinéen, ayant été pris en charge par l’ASE et ayant sollicité un titre de séjour à sa majorité, a été déclaré coupable d’avoir tenté d’obtenir frauduleusement un titre de séjour en fournissant un faux extrait d’état-civil et d’avoir obtenu indûment des prestations du conseil départemental et de la CPAM à la suite de fausses déclarations, condamné à la peine de 3 mois d’emprisonnement ainsi qu’à celle de 5 ans d’interdiction du territoire français. Le prévenu a interjeté appel.
La Cour d’appel relève que si le mineur a avoué avoir menti sur les circonstances de son arrivée en France, il n’est cependant pas établi que l’extrait d’acte d’état-civil remis à la préfecture était un faux document. En effet, les informations apparaissant sur l’extrait sont identiques à celles apparaissant sur le passeport, dont l’examen n’a révélé aucune falsification. Par ailleurs, le rapport d’évaluation établissait la minorité de l’intéressé. Si l’examen dentaire concluait à un âge situait entre 28 et 31 ans, la Cour considère qu’il ne peut suffire à établir qu’il a commis les faits reprochés. Ainsi, la Cour relaxe le prévenu pour les faits reprochés commis en tant que majeur et se déclare incompétente pour ceux commis en tant que mineur.
Extraits :
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Il n’est cependant pas établi que l’extrait d’acte d’état-civil remis le 24 février 2015 par le prévenu à la préfecture des Bouches-du-Rhône était un faux document.
En effet, les éléments d’identité qui figurent sur le document visé par la prévention sont en tous points semblables à ceux figurant sur deux autres extraits de registre d’état-civil délivrés au prévenu les 27 juin 2013 et 26 novembre 2014, lesquels ne sont pourtant pas visés par les poursuites.
Le nom, le prénom, la date et le lieu de naissance sont par ailleurs identiques à ceux mentionnés dans le passeport biométrique délivré le 3 août 2016 à (...) par la République de Guinée, document que le prévenu a remis aux services de police pour justifier de son identité lors de son audition. L’examen de ce passeport n’a révélé aucune falsification. En effet, si les données biométriques n’étaient pas lisibles, cette anomalie n’était pas en elle-même signe d’une fraude documentaire et pouvait être imputable à la négligence des services ayant délivré le passeport.
Par ailleurs, le passeport ordinaire délivré le 18 mars 2014 et présenté par le prévenu à l’appui de sa demande de titre de séjour reprenait les mêmes éléments d’identité, hormis le jour de naissance, lequel était le 1er et non le 10 comme sur tous les autres documents. Examiné par les enquêteurs de la cellule de fraude documentaire, ce passeport présentait selon eux toutes les caractéristiques d’un document authentique.
Par ailleurs, alors que quinze ans séparent l’année de naissance figurant sur le visa biométrique utilisé par le prévenu pour entrer sur le territoire français - 1982 - et celle figurant sur le document visé par la prévention - 1997 -, la cour observe que les professionnels qui ont suivi le prévenu en qualité de mineur étranger isolé n’ont à aucun moment mis en doute sa minorité.
Ainsi, dans un rapport établi le 6 décembre 2013, l’association ADDAP 13 indiquait : "nous n’émettons pas de doute quant à son âge déclaré...son extrait de registre d’état civil nous apparaît conforme à ceux présentés habituellement...".
En présence de nombreux indices en faveur de l’état civil revendiqué par le prévenu, l’examen dentaire effectué le 11 octobre 2016 et déterminant, à partir de la modélisation tridimensionnelle des volumes des canines, que son âge se situait entre 28 et 31 ans, ne peut suffire à lui seul d’établir qu’il a commis les faits qui lui sont reprochés.
Aucun élément de preuve suffisant ne permettant d’établir que le prévenu n’est pas né le 10 janvier 1997, ce dernier était donc mineur du 13 mars 2014 au 9 janvier 2015, période comprise dans les poursuites. La cour se déclarera donc partiellement incompétente pour statuer sur les poursuites visant cette période de prévention.
Par ailleurs, la cour relaxera le prévenu des faits commis du 10 janvier au 3 février 2016.
Les parties civiles seront, en conséquence de la relaxe du prévenu, déboutées de leurs demandes.
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