Résumé :
Un ancien mineur isolé ressortissant ghanéen ayant été confié à l’ASE et ayant bénéficié d’un contrat jeune majeur s’est vu refuser le renouvellement de son titre de séjour par le préfet au motif que l’intéressé avait présenté des faux documents d’identité et qu’il ne justifiait pas avoir fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux.
La Cour administrative d’appel retient que le préfet a entaché sa décision d’erreur manifeste d’appréciation en refusant le renouvellement du titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale". La Cour relève que l’intéressé a été relaxé des poursuites engagées du chef de détention frauduleuse de faux document administratif constatant un droit ou une identité et tentative d’obtention frauduleuse de document administratif, qu’il a fait preuve d’efforts d’intégration personnelle et professionnelle depuis son arrivée en France, qu’il est orphelin et qu’il ne ressort pas des pièces du dossier qu’il ait de la famille dans son pays d’origine. Il est enjoint au préfet de délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de deux mois.
Extraits :
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1. Considérant que, par arrêté du 3 mars 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé le renouvellement de la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 6 novembre 2015 M. , ressortissant de nationalité ghanéenne, sur le fondement de sa vie privée et familiale et a assorti cette décision d’une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que M. interjette appel du jugement du 13 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
2. Considérant que pour refuser le renouvellement de son titre de séjour, le préfet des Bouches-du-Rhône s’est fondé, d’une part, sur le fait que l’intéressé avait présenté de faux documents d’identité et, d’autre part, sur le fait qu’il ne justifiait pas avoir fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ; que toutefois, par jugement du tribunal correctionnel du 17 mars 2017 devenu définitif, l’intéressé a été relaxé des poursuites engagées du chef de détention frauduleuse de faux document administratif constatant un droit ou une identité et tentative d’obtention frauduleuse de document administratif, faits commis le 3 mars 2016 à Marseille ; qu’en outre, il ressort des pièces du dossier que l’intéressé déclare être entré en France le 26 août 2010 à l’âge de 16 ans ; qu’il a été placé auprès du service d’aide sociale à l’enfance du département des Bouches-du-Rhône le 25 mars 2011, en qualité de mineur isolé ; qu’il a suivi une formation pour apprendre le français du 18 mai 2011 au 30 janvier 2012, puis a été scolarisé au lycée professionnel de la Cabucelle en 2011-2012 où il a effectué plusieurs stages en milieu professionnel et aux termes desquels des appréciations très positives ont été formulées ; qu’il a ensuite, dans le cadre d’un contrat d’aide à un jeune majeur signé avec le département des Bouches-du-Rhône le 23 juillet 2012, suivi une formation en alternance avec l’organisme Voile Impulsion Marseille pour la préparation d’un CAP " Réparation entretien embarcations de plaisance " en 2012-2013 qu’il a échoué de peu en juin 2013 ; qu’il a alors travaillé deux années comme agent d’entretien pour l’association " Thalassante " du 19 août 2013 au 18 août 2015 et à compter du 1er janvier 2016 pour l’association Addap en qualité d’agent de service intérieur ; que les appréciations du directeur et du conseiller principal d’éducation de son lycée, de ses enseignants, des intervenants éducatifs et sociaux, maitres de stage et employeur font état de la réussite de son placement, de son assiduité et son sérieux, des progrès réalisés, du caractère exemplaire de son comportement ainsi que de sa volonté d’insertion sociale ; que dans les circonstances de l’espèce, eu égard à sa durée de présence pour laquelle il n’y a pas lieu de tenir compte, en tout état de cause, de la circonstance qu’il aurait résidé pendant tout ou partie de cette période sous une fausse identité, aux efforts d’intégration personnelle et professionnelle de M. depuis son arrivée en France, alors qu’il est orphelin et qu’il ne ressort pas des pièces du dossier qu’il ait de la famille dans son pays d’origine, le requérant est fondé à soutenir qu’en refusant de renouveler son titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale au motif qu’il n’avait pas fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux, le préfet des Bouches-du-Rhône a entaché sa décision d’erreur manifeste d’appréciation ;
3. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement, et sur l’ensemble des moyens de la requête, M. est fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 3 mars 2016 ;
Sur les conclusions à fin d’injonction et d’astreinte :
4. Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d’un délai d’exécution. " ; qu’eu égard aux motifs du présent arrêt, son exécution entraîne nécessairement le renouvellement pour l’intéressé de sa carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; que, par suite, il y a lieu d’enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de renouveler le titre de séjour de M. au titre de sa " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt après lui avoir délivré, dans le délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour l’autorisant à travailler ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte ;
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