Cour administrative d’appel de Lyon – 5e chambre – Arrêt n° 18LY00944 du 12 juillet 2018 – Annulation de l’OQTF – Article 47 du code civil – Présentation d’une carte d’identité consulaire établie par l’ambassade de la République de Guinée en France, d’un extrait d’acte de naissance régularisé par les services de l’ambassade et d’un jugement en assistance éducative le confiant à l’ASE jusqu’au jour de sa majorité

Résumé :

Un mineur isolé guinéen produit lors de l’évaluation un acte de naissance qui sera déclaré faux par la PAF. Un test osseux est réalisé et conclut à un âge de 19 ans avec une marge d’erreur d’un an. Une OQTF est prononcée. Postérieurement, le mineur produira une carte d’identité consulaire délivrée par l’Ambassade de République de Guinée en France, un extrait d’acte de naissance régularisé et un jugement de placement du juge des enfants de Clermont Ferrand. Etant mineur à la date de délivrance de l’OQTF, la Cour annule l’OQTF et enjoint le Préfet à délivrer une autorisation provisoire de séjour sous 8 jours.

Extraits :

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2. Aux termes de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : " I. - L’autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d’un État membre de l’Union européenne, d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n’est pas membre de la famille d’un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l’article L. 121-1, lorsqu’il se trouve dans l’un des cas suivants : 1° Si l’étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu’il ne soit titulaire d’un titre de séjour en cours de validité () ". Selon l’article L. 511-4 du même code, ne peut faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire français : " 1° L’étranger mineur de dix-huit ans ".

3. L’article 47 du code civil dispose par ailleurs que : " Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

4. L’article 47 du code civil précité édicte une présomption de validité des actes d’état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il incombe à l’administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. Il ne résulte pas de ces dispositions que l’administration française doit nécessairement et systématiquement solliciter les autorités d’un État afin d’établir qu’un acte d’état-civil présenté comme émanant de cet État est dépourvu d’authenticité, en particulier lorsque l’acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l’administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié.

5. M. soutient être né le 20 août 2000 et a produit un extrait d’acte de naissance guinéen daté du 10 février 2001. Initialement pris en charge par le service de l’aide sociale à l’enfance du Puy-de-Dôme au titre de son statut de mineur étranger isolé sans représentant légal sur le territoire français, il a fait l’objet, sur instruction du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, d’une audition par les services de police et d’un examen osseux. Les services de la police aux frontières ont estimé que le document d’état civil fourni est un faux en raison des multiples non-conformités qu’il présente. L’examen osseux pratiqué par le service d’imagerie médicale du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand le 25 avril 2017 a conduit à conclure que l’intéressé est âgé de dix-neuf ans avec une marge d’erreur d’un an.

6. Toutefois, postérieurement à la décision en litige, M. a été mis en possession d’une carte d’identité consulaire établie le 29 juin 2017 par l’ambassade de la République de Guinée en France, mentionnant qu’il est né le 20 août 2000. Il produit un extrait d’acte de naissance régularisé par les services de l’ambassade le 30 juin 2017 et un jugement du juge des enfants du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand du 18 septembre 2017 selon lequel il est mineur et le confiant au service d’aide sociale à l’enfance jusqu’au 20 août 2018, jour de sa majorité. Ces documents mentionnent la date du 20 août 2000 comme étant celle de la naissance de M. et les autres mentions relatives à son lieu de naissance ou à sa nationalité sont en tous points identiques. Eu égard à ces éléments, et alors d’ailleurs que le préfet n’a pas saisi les autorités guinéennes aux fins de vérification des documents d’état civil fournis par l’intéressé, celui-ci doit être regardé comme étant mineur le 30 mai 2017, date à laquelle il ne pouvait pas légalement faire l’objet d’une décision l’obligeant à quitter le territoire français. Par suite, cette décision doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, celles fixant le délai départ volontaire de trente jours et le pays de destination.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, M. est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

[…]. »

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