Conseil d’Etat – Juge des référés – Ordonnance n°421338 du 27 juin 2018 – Octroi APJM – Pouvoir d’appréciation du président du conseil département soumis au contrôle du juge – La date de la fin d’année scolaire est fixée à la veille de la rentrée de l’année suivante

Résumé :

Le département se pourvoit en cassation suite à une ordonnance du tribunal administratif enjoignant au président du conseil départemental (PCD) de Seine-et-Marne de proposer à un jeune majeur un accompagnement comportant l’accès à une solution de logement adaptée et de prise en charge de ses besoins alimentaires et sanitaires afin de lui permettre la poursuite de sa scolarité.

Le Conseil d’Etat relève tout d’abord que si le PCD n’est pas tenu d’accorder ou de maintenir la prise en charge d’un jeune majeur de moins de 21 ans éprouvant des difficultés d’insertion, il lui incombe en revanche d’assurer l’accompagnement vers l’autonomie des mineurs pris en charge par ce service lorsqu’ils parviennent à la majorité, notamment en leur permettant de terminer l’année scolaire ou universitaire engagée. En l’espèce, il n’apporte aucune précision sur la situation particulière de l’intéressé et l’impossibilité dans laquelle il se trouverait de l’accompagner pendant trois mois, jusqu’au terme de l’année scolaire. Par ailleurs, le Conseil d’Etat précise que la fin de l’année scolaire est la date fixée, en application des dispositions de l’article L. 521-1 du code de l’éducation, par l’arrêté du ministre de l’éducation nationale du 16 avril 2015, à la veille de la rentrée de l’année suivante.

La demande du département est rejetée.

Extraits :

« […].

3. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que si le président du conseil départemental dispose, sous le contrôle du juge, d’un pouvoir d’appréciation pour décider de la prise en charge par le service chargé de l’aide sociale à l’enfance, qu’il n’est pas tenu d’accorder ou de maintenir, d’un jeune majeur de moins de vingt et un ans éprouvant des difficultés d’insertion sociale, il lui incombe en revanche d’assurer l’accompagnement vers l’autonomie des mineurs pris en charge par ce service lorsqu’ils parviennent à la majorité et notamment, à ce titre, de proposer à ceux d’entre eux qui éprouvent des difficultés d’insertion sociale, faute de ressources ou d’un soutien familial suffisants, toute mesure adaptée à leurs besoins en matière éducative, sociale, de santé, de logement, de formation, d’emploi et de ressources, propre à leur permettre de terminer l’année scolaire ou universitaire engagée   ;

[…].

6. Considérant qu’en se bornant à faire valoir de manière générale le pouvoir d’appréciation dont il dispose pour accorder aux jeunes majeurs le bénéfice d’une prise en charge, les capacités limitées du service de l’aide sociale à l’enfance, et enfin la circonstance que M. B… serait bien inséré dès lors qu’il aurait bien réussi dans son parcours scolaire et bénéficierait d’une potentielle proposition d’embauche de la part de l’un de ses maîtres de stage, le département de Seine-et-Marne ne conteste pas utilement l’existence d’une situation d’urgence alors que la décision litigieuse a pour effet de mettre fin brutalement à la prise en charge dont bénéficiait l’intéressé depuis le mois d’août 2016 et d’entraîner immédiatement pour lui de très graves difficultés susceptibles de compromettre notamment l’obtention du diplôme de certificat d’aptitudes professionnelles qu’il a préparé pendant sa scolarité  ;

7. Considérant qu’il résulte également de l’instruction, notamment du rapport de l’assistante sociale du service de l’aide sociale à l’enfance, que M. B… arrivé seul en France il y a deux ans, décrit comme un jeune homme respectueux, motivé, volontaire, sérieux et considéré comme autonome, maîtrisant la langue française et le paysage institutionnel français a suivi avec succès un parcours scolaire qui était sur le point de s’achever  ; qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, il demeure dépourvu d’attache familiale sur le territoire français et ne dispose que de ressources très limitées  ; que dans ces conditions, M. B… est au nombre des jeunes majeurs antérieurement pris en charge par le service de l’aide à l’enfance auxquels il incombait au président du conseil départemental de proposer, au-delà du terme de sa prise en charge par ce service, un accompagnement adapté à ses besoins et propre à lui permettre de terminer l’année scolaire engagée  ; que si le département de Seine-et-Marne développe dans ses écritures des considérations générales sur les difficultés auxquelles il est confronté compte tenu de l’afflux de jeunes mineurs étrangers isolés, il n’a apporté aucune précision sur la situation particulière de M. B… et l’impossibilité dans laquelle il se trouverait de l’accompagner pendant trois mois, jusqu’au terme de l’année scolaire  ; que, s’il soutient qu’un accompagnement ne serait pas utile pendant la période des vacances scolaires d’été, il ressort des termes mêmes du code de l’action sociale et des familles que l’accompagnement doit se poursuivre jusqu’à la fin de l’année scolaire, laquelle a été fixée, en application des dispositions de l’article L. 521-1 du code de l’éducation, par l’arrêté du ministre de l’éducation nationale du 16 avril 2015 pour l’année scolaire 2017/2018, à la veille de la rentrée de l’année suivante  ; que, dans ces conditions, il est manifeste que le département requérant n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Melun a jugé que, dans les circonstances de l’espèce, sa carence caractérisée portait une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale justifiant qu’il soit enjoint eu président du Conseil général de proposer à M. B… un accompagnement comportant l’accès à une solution de logement adaptée et de prise en charge de ses besoins alimentaires et sanitaires afin de lui permettre la poursuite de sa scolarité jusqu’à la fin de l’année scolaire  ;

[…]. »

Ordonnance à retrouver en format PDF ci-dessous :

Conseil d’Etat – Ordonnance du 27 juin 2018 n°421338
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