Résumé :
Un mineur isolé ressortissant malien, confié à l’ASE par un jugement en assistance éducative, se voit notifier une OQTF sans délai de départ volontaire, une IRTF ainsi qu’une assignation à résidence.
Le tribunal administratif a annulé la décision du préfet et a enjoint au préfet de réexaminer la situation administrative de l’intéressé dans un délai de deux mois. Le juge relève que si les premiers documents présentés par l’intéressé ont été analysés comme faux par la PAF, pour les seconds, la PAF ne décèle aucune trace d’anomalie ou falsification manifeste. Il appartient à l’administration de renverser la présomption de l’article 47 du code civil, cette preuve peut être apportée par tout moyen. En outre, le rapport de l’UMJ de l’IML de Lyon indique un âge compris entre 17 et 19 ans selon la mesure anatomique opérée, et entre 16.4 et 18 ans selon la dent analysée. L’ensemble de ces données ne peut être regardé comme donnant un âge de 19 ans. Par ailleurs, la déclaration en Italie d’une date de naissance au 1er mai 1999, ne reposant sur autre chose qu’une déclaration dans le but de poursuivre le parcours, n’est pas de nature à renverser la présomption de validité attachée aux documents d’état civil.
Extraits du jugement :
« […].
4. Considérant, d’une part, qu ’il ressort des pièce du dossier que M. à la suite du rapport du service de fraude documentaire de la police aux frontières écartant comme faux un précédent acte d’état civil, a fait valoir auprès de l’autorité administrative compétente, dès le 17 avril 2018, le jugement supplétif de naissance n° 619 du tribunal malien civil de Yélimané ainsi qu’un extrait d’acte de naissance n° 52 établi sur son fondement ; que ces deux documents indiquent que M. est né le 1er mai 2001 ; qu’ ils ne sont pas sérieusement critiqués par le préfet du Rhône, le procès-verbal du 26 juin 2018 indiquant d’ailleurs que ce pièce , après vérification du service de fraude documentaire précité, ne laissaient apparaître aucune anomalie ou falsification manifeste ; que l’article 47 du code civil précité édicte une présomption de validité des acte d’état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays, présomption s’appliquant en l’espèce concernant les documents d’état civil produits par M. ;
5. Considérant, d’autre part, qu’il résulte des dispositions citées au point 3 qu’il incombe à l’administration de renverser la présomption de validité des actes d’état civil qui lui sont présentés en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question ; que cette preuve peut être apportée par tous moyens ; que si le préfet du Rhône remet en cause la validité des documents d’état civil produits en se fondant sur une expertise du 17 avril 2018 de l’unité médico-judiciaire de l’institut médico-légale de Lyon et une autre expertise odonto-légale du même jour, il ressort des rapports d’expertise afférents que l’âge minimum estimé de M. varie de 17 à 19 ans dans le premier, selon la mesure anatomique opérée, et de 16 à 18,4 ans pour le second, selon la dent analysée ; que l’ensemble de ces données ne peut être regardé comme indiquant un âge minimum de 19 ans concernant M., contrairement à ce que retenu par l’administration dans la décision attaquée ; que, si le préfet du Rhône établit en défense que M. a déclaré antérieurement être né le 1er mai 1999, lors de son arrivée en Italie, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette date de naissance a été enregistrée à cette occasion sur la foi d’autre éléments que des seules déclarations orales de l’intéressé, ce dernier soutenant avoir menti afin d’éviter la prise en charge dans ce pays en tant que mineur isolé ; que l’ensemble des éléments dont le préfet du Rhône se prévaut n’est ainsi pas de nature à renverser la présomption de validité attachée aux documents d’état civil produits par l’intéressé, qui établissent M. . comme étant mineur ; qu’en conséquence c’est par une inexacte application des dispositions précitées de l’article L. 511-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que le préfet du Rhône a obligé le requérant à quitter le territoire français ;
6. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que M. est fondé à demander l’annulation de la décision du 26 juin 2018 du préfet du Rhône l’obligeant à quitter le territoire ainsi que, par voie de conséquence, des décisions du même jour lui refusant un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination en cas de renvoi, lui faisant interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de six mois et l’assignant à résidence ;
[…]. »
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