- Minorité
- Compétence départementale
- Dispositifs spécifiques MIE
- Vulnérabilité
- Représentation légale
- Santé physique
- Santé psychique
- Juge des enfants
- Juge aux affaires familiales
- Asile
- Administrateur ad hoc
- Etat civil
- Mineurs en migration
- Politique migratoire
- Aide sociale à l’enfance
- Evaluation de minorité et isolement
Source : Human Rights Watch
Date : 05 septembre 2019
Présentation :
« Ce rapport se fonde sur des enquêtes effectuées dans le département français des Hautes-Alpes entre janvier et juillet 2019. Trois chercheurs-ses de Human Rights Watch ont interviewé 59 garçons migrants, une fille migrante et un adulte qui vient d’avoir 18 ans. Les soixante premiers s’identifient comme des enfants de moins de 18 ans, et le dernier est un majeur de 18 ans arrivé en France à l’âge de 16 ans. Vingt et un viennent de la république de Guinée (souvent appelée Guinée-Conakry pour la distinguer de la Guinée-Bissau et de la Guinée équatoriale), dix de Côte d’Ivoire, neuf du Mali, six de Gambie, quatre du Nigeria, trois du Sénégal, deux du Burkina Faso, et les six restants viennent respectivement du Bénin, du Cameroun, du Ghana, de Guinée-Bissau, du Liberia et du Niger. Cinquante-huit d’entre eux sont passés par la Libye et l’Italie avant d’arriver en France. Deux sont passés par le Maroc et l’Espagne, et un a pris un avion directement pour la France.
Parmi les enfants que nous avons interviewés, deux avaient été formellement reconnus comme mineurs suite à l’évaluation de leur âge par le Conseil départemental, tandis que 33 avaient reçu un avis défavorable quant à leur minorité de la part de ce dernier au moment de notre entretien avec eux. Parmi ceux qui ont reçu une évaluation négative de leur minorité, sept ont été formellement reconnus mineurs après un recours devant le juge des enfants, et un a été reconnu mineur par un juge des tutelles. Le jeune homme de 18 ans avait reçu une carte de séjour française une semaine avant l’entretien avec Human Rights Watch, soit onze mois après avoir été formellement reconnu mineur par le juge des enfants.
Les chercheurs-ses de Human Rights Watch ont mené les entretiens en français, anglais, italien, et dans un cas en portugais, selon la préférence des personnes interviewées. Les chercheurs-ses ont exposé à toutes les personnes interviewées la nature et l’objectif de nos recherches, notamment leur intention de publier un rapport à partir des informations collectées. Ils ont informé chaque personne susceptible d’accorder un entretien qu’elle n’avait aucune obligation de leur parler, que Human Rights Watch ne fournissait pas de services humanitaires ni d’assistance juridique et qu’elle pouvait arrêter l’entretien à tout moment, ou refuser de répondre à certaines questions, sans aucune répercussion négative. Les chercheurs-ses ont obtenu un consentement oral avant chaque entretien. Les personnes interviewées n’ont reçu aucune compensation matérielle pour leur entretien avec Human Rights Watch.
En outre, Human Rights Watch a consulté 36 rapports d’évaluation rédigés par la Direction des politiques de prévention et de l’action sociale du département des Hautes-Alpes, treize jugements en assistance éducative du juge des enfants et deux ordonnances du juge des tutelles.
Human Rights Watch s’est également entretenu avec des avocat-e-s, des professionnel-le-s de santé, des personnes travaillant pour des organisations humanitaires, des bénévoles aidant des enfants migrants, ainsi que des bénévoles et militants effectuant des missions de recherche et de sauvetage, que l’on appelle communément « maraude », dans la zone montagneuse autour de la frontière franco-italienne.
Human Rights Watch a rencontré le directeur des services du Cabinet de la Préfète des Hautes-Alpes ainsi que le directeur de la police aux frontières pour les Hautes-Alpes et les Alpes de Haute-Provence, et leur a fait connaître les conclusions de cette recherche. Nous avons adressé trois demandes de rendez-vous à la Direction des politiques de prévention et de l’action sociale des Hautes-Alpes, et deux demandes supplémentaires afin d’obtenir des réactions au sujet de nos conclusions préliminaires.[1] En réponse à notre première demande de rendez-vous, visant à entendre le département sur la façon dont il détermine la minorité des enfants, leur fournit un hébergement et s’assure de leur accès à l’éducation, le département a répondu :
Nous assurons nos responsabilités de mise à l’abri, d’évaluation dans le respect des textes, d’accompagnement des MNA [mineurs non accompagnés] reconnus mineurs, vers la scolarité, l’apprentissage ou des stages en entreprise…
Selon nous, il n’y a pas matière à être « entendus », le flux migratoire étant à la baisse dans les Hautes-Alpes et nos missions n’[ayant] pas changé.[2]
Le département a finalement apporté des réponses d’ordre général à plusieurs points que nous avons soulevés, mais refusé de répondre à nos questions spécifiques.[3] Nos questions et la réponse du département figurent dans les annexes de ce rapport.
Human Rights Watch a également transmis aux autorités italiennes un résumé des témoignages des enfants au sujet des conditions d’accueil en Italie, et leur a demandé une réaction.[4] Les autorités italiennes ont répondu par une description du système d’accueil pour les enfants non accompagnés et ont donné des éléments de réponse aux questions que nous avons posées, comme nous l’expliquons plus en détails dans le chapitre suivant.[5] Ces questions, ainsi que la réponse des autorités italiennes, figurent également dans les annexes.
Tous les prénoms des enfants cités dans ce rapport sont des pseudonymes. Human Rights Watch n’a pas non plus divulgué les noms des travailleurs humanitaires qui lui en ont fait la demande, ni d’autres informations qui auraient permis de les identifier.
Conformément aux normes internationales, le terme « enfant » désigne une personne âgée de moins de 18 ans.[6] Comme le Comité des droits de l’enfant des Nations unies et d’autres instances internationales, nous utilisons dans ce rapport le terme « enfant non accompagné » pour désigner un enfant « qui a été séparé de ses deux parents et d’autres membres proches de sa famille et n’est pas pris en charge par un adulte investi de cette responsabilité par la loi ou la coutume ».[7] Quant à « enfant séparé », ce terme désigne un enfant qui « a été séparé de ses deux parents ou des personnes qui en avaient la charge à titre principal auparavant en vertu de la loi ou de la coutume, mais pas nécessairement d’autres membres de sa famille »,[8] ce qui signifie qu’il peut être accompagné par un autre membre adulte de sa famille. »
Sommaire :
Cartes des pays d’origine et de transit
Carte des Hautes-Alpes et des environs
Carte des itinéraires de montagne entre Clavière et Briançon
Glossaire
Résumé
Recommandations
Au ministère de l’Intérieur et au ministère de la Justice
Au ministère des Solidarités et de la Santé
À la préfecture des Hautes-Alpes et à la police aux frontières
À la Direction des politiques de prévention et de l’action sociale du département des Hautes-Alpes
Au tribunal pour enfants
Au procureur de la République
Au gouvernement et au Parlement
Au Département pour les libertés civiques et l’immigration du ministère de l’Intérieur italien (Dipartimento per la Libertà civili e l’Immigrazione)
À la Commission européenne
Méthodologie
I. Enfants non accompagnés arrivant dans les Hautes-Alpes
Les raisons les poussant à partir de chez eux
- Abus dans le cadre familial
- Conflits armés et violences
- Traite des personnes
Mauvais traitements subis en Libye
Dangers de la traversée de la mer
Négligence et abus subis en Italie
II. Refoulement par la police
Protection contre les renvois sommaires
III. Procédures arbitraires d’évaluation de l’âge
Piètre qualité de l’interprétation
Entretiens stressants, déroutants, souvent intimidants
Fondements arbitraires des décisions
Conséquences des traumatismes
Lenteurs de la justice et déférence excessive à l’égard de l’avis des évaluateurs du département
Conséquences d’une évaluation incorrecte de l’âge ...
Droit des enfants à une procédure équitable
IV. Harcèlement policier des travailleurs humanitaires, bénévoles et militants
Contrôles d’identité abusifs
Amendes à répétition pour des infractions mineures
Le « délit de solidarité »
Protections légales trop faibles vis-à-vis de l’aide humanitaire
Remerciements
Annexe A : Lettre de Human Rights Watch au Conseil départemental des Hautes Alpes
Annexe B : Lettre du Conseil départemental des Hautes-Alpes à Human Rights Watch
Annexe C : Lettre de Human Rights Watch au ministère italien de l’Intérieur
Annexe D : Lettre du ministère italien de l’Intérieur à Human Rights Watch
Rapport intégral disponible en version française ci-dessous :
Rapport intégral disponible en version anglaise ci-dessous :