Résumé :
Un mineur isolé ressortissant guinéen confié à l’ASE à 17 ans, s’est vu refuser la délivrance d’un titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français sous 30 jours. Le sous-préfet retient que, compte tenu des documents d’état civil présentés, dont l’authenticité avait été remise en cause par la direction zonale sud de la police aux frontières et pour lesquels l’ambassade de France en Guinée avait conclu au caractère apocryphe, M.X ne justifiait pas de sa prise en charge à l’ASE entre 16 et 18 ans.
Toutefois, la Cour relève que, si ces éléments sont de nature à remettre en cause le caractère probant des actes d’état civil présentés, M.X produit pour la première fois en appel un nouveau jugement supplétif ainsi que sa transcription, légalisés par l’Ambassade de Guinée en France et dont l’authenticité n’a pas été remise en cause. En ce sens, en refusant de délivrer un titre de séjour sur le fondement de l’article L.313-15 du CESEDA, le sous-préfet a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation. L’arrêté et le jugement du Tribunal administratif sont annulés ; il est enjoint au Préfet de réexaminer la situation de M.X sous deux mois.
Extraits :
« […].
6. Pour refuser le titre de séjour sollicité sur le fondement des dispositions précitées de l’article L. 313-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le sous-préfet de Draguignan s’est fondé sur le fait que les pièces produites par M. X relatives à son état civil, à savoir un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance n°xxx du tribunal de première instance de Conakry du 4 octobre 2017 et sa transcription sous le numéro xxx dans le registre de l’état civil de la commune de Dixinn du 5 octobre 2017 indiquant qu’il est né le 5 août 2000, ne permettaient pas d’établir qu’il avait été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE) entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans. Le préfet s’appuie, d’une part, sur un rapport du 14 juin 2018 établi par la direction zonale sud de la police aux frontières remettant en cause l’authenticité de ces actes, en raison d’une présentation non conforme et du non-respect du délai légal de transcription du jugement, et d’autre part, sur une analyse datée du 1er octobre 2018 de la section consulaire de l’ambassade de France en Guinée, concluant au caractère apocryphe de ces actes.
7. Si les éléments précités au point 6 sont de nature à remettre en cause le caractère probant des actes d’état civil présentés par M.X à l’appui de sa demande de titre de séjour, celui-ci produit, pour la première fois en appel un nouveau jugement supplétif du tribunal de première instance de Conakry, en date du 8 novembre 2018 et sa transcription sur le registre de l’état civil de la commune de Dixinn en date du 19 novembre 2018, mentionnant comme date de naissance le 5 août 2000, ces deux derniers documents ayant fait l’objet d’une légalisation le 17 avril 2019 par l’ambassade de Guinée en France, la légalisation pouvant être effectuée par cette autorité à défaut de l’ambassade de France en Guinée. Or, il n’appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d’une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le document produit aurait un caractère frauduleux. En l’espèce, le préfet du Var, qui a reçu communication de ces nouvelles pièces, ne conteste ni leur authenticité, ni celle de leur légalisation. Dans ces conditions, le préfet n’apporte aucun élément tendant à démontrer que ces actes d’état civil, lesquels, bien que postérieurs à la décision de refus de séjour contestée, révèlent des faits antérieurs à celle-ci, seraient irréguliers, falsifiés, ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondraient pas à la réalité. Par suite, en refusant de délivrer à M. X un titre de séjour sur le fondement de l’article L. 313-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile au seul motif qu’à la date de sa prise en charge par l’ASE, le 23 octobre 2017, il ne justifiait pas être âgé de plus de seize ans et de moins de dix-huit ans, le sous-préfet de Draguignan a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation. Par suite, la décision de refus de titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être annulées.
[...]. »
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