Source : Défenseur des droits
Date : décision n°2020-033 du 19 mars 2020
Résumé :
« Le 3 décembre 2018, le Défenseur des droits a été saisi par la mère de Y âgée de 17 ans, d’une réclamation relative à la rupture de la période d’essai de son contrat d’apprentissage au sein d’un salon de coiffure, qu’elle estime discriminatoire en raison de l’état de santé de sa fille.
Lors de l’année scolaire 2018-2019, Y, était apprentie en CAP coiffure au sein du centre de formation d’apprentis (CFA) coiffure et esthétique de A. Dans ce cadre, un contrat d’apprentissage a été conclu entre Y et la société Z, avec une date d’embauche au 7 août 2018 et une date de fin de contrat au 6 août 2020. À compter du 25 octobre 2018, Y a été placée en arrêt maladie. Le 13 novembre 2018, soit avant la fin de la période d’essai prévue de quarante-cinq jours de formation pratique en entreprise, la gérante de la société Z a notifié à Y sa décision de mettre fin à ce contrat sans indiquer de motif, précisant que cette rupture prendrait effet le 15 novembre 2018 au soir.
Après consultation du collège compétent en matière de défense et de promotion des droits de l’enfant, le Défenseur des droits :
- Conclut que la rupture du contrat d’apprentissage de Y, au cours de la période d’essai, par la société Z, constitue une discrimination dans l’emploi et une atteinte discriminatoire au droit à l’éducation de Y à raison de son état de santé ;
- Conclut à une atteinte à l’intérêt supérieur de Y de la part de la société Z et du centre de formation d’apprentis (CFA) coiffure et esthétique de A ;
- Conclut que le directeur du CFA coiffure et esthétique a manqué à ses obligations légales.
Le Défenseur des droits rappelle :
- à la gérante de la société Z les termes de l’article L.1132-1 du code du travail qui prévoit qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en raison de son état de santé ;
- au directeur du CFA coiffure et esthétique de A les dispositions de l’article L. 6231-1 du code du travail énumérant les missions des CFA, parmi lesquelles celle d’assister « les apprentis en rupture de contrat dans la recherche d’un nouvel employeur, en lien avec le service public de l’emploi », reprises à l’article L. 6231-2 du même code.
Le Défenseur des droits recommande à la gérante de la société Z :
- de réparer le préjudice subi par Y ;
- en cas de difficultés rencontrées avec un apprenti,
- de le recevoir afin d’échanger avec lui, particulièrement lorsque les insuffisances conduisent à envisager une rupture du contrat d’apprentissage, afin d’accorder davantage d’importance à la parole et au ressenti de l’adolescent dans toutes les décisions qui le concernent ;
- solliciter un entretien avec le CFA, l’apprenti et les parents pour faire le point sur les difficultés et les mesures à prendre pour y remédier.
Le Défenseur des droits recommande au directeur du CFA coiffure et esthétique de A :
- de rappeler, par tout moyen, aux employeurs des adolescents en contrat d’apprentissage inscrits au CFA, leur obligation de respecter le droit fondamental de l’enfant à la non-discrimination ;
- d’effectuer toute diligence utile dans les situations portées à son attention révélant des difficultés entre un employeur et un apprenti, d’autant plus lorsque ce dernier est particulièrement vulnérable du fait de son état de santé, notamment en prenant l’attache des parents et de l’employeur ;
- d’exiger des employeurs, lorsqu’ils relèvent des insuffisances pouvant les conduire à envisager une rupture du contrat d’apprentissage, y compris pendant la période d’essai, qu’ils informent le CFA aux fins d’organisation d’une réunion en présence de l’apprenti, de ses parents, et du CFA ;
- d’informer par écrit l’apprenti et ses parents des conséquences d’une rupture du contrat d’apprentissage pour la suite de l’apprentissage et d’accompagner davantage les adolescents concernés par une telle rupture dans leurs démarches afin de retrouver un employeur, en vue de favoriser la continuité de leur parcours de formation. »
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