Résumé :
Un mineur isolé ressortissant malien, disposant d’un document d’état civil, a fait l’objet d’un refus d’admission à l’aide sociale à l’enfance par le Conseil départemental (CD) de Seine Saint Denis et a saisi le juge des enfants en février 2020, mais aucune audience n’est programmée. En raison de l’état d’urgence sanitaire, le mineur est mis à l’abri par le Conseil départemental qui décide cependant de ne pas poursuivre l’accueil provisoire au-delà du 24 mai 2020.
Le tribunal administratif de Montreuil estime que la décision du conseil départemental de ne pas poursuivre l’accueil provisoire d’urgence n’est pas de nature à révéler par principe une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Toutefois, non seulement l’intéressé soutient sans être utilement contredit ne disposer ni d’un hébergement, ni de moyens de subsistance, mais encore et surtout, il fait valoir, à juste titre, que si le confinement a pris fin le 11 mai 2020, l’état d’urgence sanitaire a été prorogé jusqu’au 10 juillet 2020 et que l’Ile-de-France est toujours classée en zone rouge. Dans les circonstances particulières de l’espèce, caractérisées en outre par la saisine pendante du tribunal pour enfants de Bobigny, il y a lieu de considérer qu’en refusant au requérant de prolonger sa prise en charge sans lui proposer une solution d’hébergement, le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamental.
Extraits :
« […].
7. Le département défendeur se prévaut du résultat de deux évaluations en date des 13 février et 15 mai 2020 du pôle évaluation des mineurs isolés étrangers au terme desquelles la minorité alléguée par M. n’a pas été reconnue, tandis qu’il ressort des pièces du dossier que M. détient un document d’état-civil consistant en un extrait d’acte de naissance mentionnant une date de naissance au 1er novembre 2002.
8. Dans ces conditions, la décision du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis de ne pas poursuivre l’accueil provisoire d’urgence du requérant au-delà du 24 mai 2020 n’est pas, comme le relève le défendeur, de nature à révéler par principe une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
9. Toutefois, non seulement l’intéressé soutient sans être utilement contredit ne disposer ni d’un hébergement, ni de moyens de subsistance, mais encore et surtout, il fait valoir, à juste titre, que si le confinement a pris fin le 11 mai 2020, l’état d’urgence sanitaire a été prorogé jusqu’au 10 juillet 2020 et que l’Ile-de-France est toujours classée en zone rouge. Dans les circonstances particulières de l’espèce, caractérisées en outre par la saisine pendante du tribunal pour enfants de Bobigny, il y a lieu de considérer qu’en refusant au requérant de prolonger sa prise en charge sans lui proposer une solution d’hébergement, le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
10. Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu d’enjoindre au conseil départemental de la Seine-Saint-Denis d’assurer l’hébergement de l’intéressé dans une structure adaptée à son âge allégué et à la prévention des risques de propagation du covid-19 et de prendre en charge ses besoins alimentaires, sanitaires et médicaux, dans un délai de deux jours à compter de la notification de la présente ordonnance, et ce jusqu’à ce qu’il ait été statué définitivement sur la question relative à sa minorité ou jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire prorogé par l’article 1er de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 si celle-ci intervient avant que le juge ne se soit définitivement prononcé. Il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une quelconque astreinte.
[…]. »
Ordonnance à retrouver en format pdf ci-dessous :