Résumé :
Un mineur isolé ressortissant ivoirien, muni de documents d’état civil, se présente le 8 janvier 2019 auprès des autorités afin de bénéficier d’un accueil provisoire d’urgence. Le 11 janvier 2019, le mineur se voit notifier une décision de refus d’admission à l’aide sociale à l’enfance par le Conseil départemental, une obligation de quitter le territoire français sans délai et une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans. Le 13 septembre 2019, le juge des enfants le confie à l’aide sociale à l’enfance jusqu’à sa majorité.
Eu égard aux garanties attachées à l’état de minorité, est entachée d’illégalité la décision du préfet qui, en absence d’investigations complémentaires sur les documents d’état civil, se fonde uniquement sur l’examen superficiel des documents, examen qui reposait sur des appréciations largement subjectives et ne suffisait pas à renverser la présomption de validité des actes d’état civil dont se prévalait le requérant, et oblige le mineur à quitter le territoire français sans délai et lui interdit de revenir sur le territoire pendant deux ans.
Extraits :
« […].
4. Il ressort des pièces du dossier que pour considérer que M. était majeur, le préfet de l’Yonne s’est fondé d’une part sur une analyse réalisée par le service spécialisé dans la fraude documentaire de la gendarmerie nationale qui avait conclu que l’ acte de naissance produit par l’intéressé comportait des anomalies dont il était permis de déduire qu’il s’agissait d’un faux et que le certificat de nationalité était susceptible de présenter le caractère d’un « volé blanc », d’autre part sur les circonstances que le jeune homme avait refusé de se soumettre à un test osseux et qu’il avait une apparence physique, une physionomie et une attitude générale qui étaient celles d’une personne majeure, enfin sur ses déclarations qui comportaient des
incohérences et sur son attitude peu coopérative. Si les anomalies typographiques que comportaient les documents produits devant le préfet de l’Yonne constituaient un indice suffisant pour que l’administration mette en doute leur authenticité et donc l’âge revendiqué par M. elles ne suffisaient pas, en l’absence de vérifications complémentaires, à établir l’irrégularité manifeste de ces actes. Par ailleurs, il ressort de la motivation d’un jugement du 13 septembre 2019 produit en cause d’appel par M. que le juge des enfants du tribunal de grande instance de Paris, qui a ordonné le placement de l’intéressé auprès des services de l’aide à
l’enfance jusqu’à sa majorité, s’est prononcé au vu des documents en original qui établiraient la minorité du jeune homme et d’un examen osseux qui conclurait que les résultats seraient compatibles avec l’âge allégué. En l’absence d’investigations complémentaires qui lui auraient permis de lever les doutes qu’il pouvait avoir sur la régularité des actes dont se prévalait M., et d’examens médicaux susceptibles de déterminer son âge alors que l’examen superficiel auquel il avait procédé reposait sur des appréciations largement subjectives, les
éléments dont disposait le préfet de l’Yonne ne suffisaient, eu égard aux garanties attachées à l’état de minorité, ni à renverser la présomption de validité des actes d’ état civil dont se prévalait le requérant, ni à établir sa minorité. La décision contestée est donc entachée d’illégalité.
[…]. »
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