Tribunal administratif de Lyon – Ordonnance n°2006543 du 22 septembre 2020 – Le juge des référés enjoint à la Métropole de Lyon de proposer un hébergement d’urgence adapté à l’âge présumé de l’intéressé dans l’attente de la décision du juge des enfants – La Métropole n’a pas procéder aux vérifications requises sur l’authenticité de ces actes et ne fait pas état d’éléments probants de nature à ôter à ces actes leur caractère authentique, ces observations ne suffisent pas à remettre en cause la véracité de ces documents

Résumé :

Le mineur présente lors de son évaluation l’original du jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance ainsi que l’extrait d’acte de naissance mentionnant la transcription. Pour estimer que le requérant n’a pas la qualité de mineur isolé, la Métropole de Lyon s’est tout d’abord prévalu du rapport d’évaluation qui fait état de ce que le requérant n’est pas en mesure de donner des repères chronologiques pouvant permettre de le situer dans le temps et de ce que sa physionomie ne permet pas d’aller dans le sens de sa prétendue minorité et soutient que les informations données sont stéréotypées et de ce qu’il n’a pas déclaré son passage dans le département de la Meuse.

Le tribunal administratif enjoint à la Métropole de Lyon, dans un délai de 48 heures, de proposer à M. un hébergement d’urgence adapté à son âge présumé dans l’attente de la décision du juge des enfants.

Extraits :

« […].

9. Il appartient toutefois au juge du référé, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2, lorsqu’il lui apparaît que l’appréciation portée par le département sur l’absence de qualité de mineur isolé de l’intéressé est manifestement erronée et que ce dernier est confronté à un risque immédiat de mise en en danger de sa santé ou de sa sécurité, d’enjoindre au département de poursuivre son accueil provisoire.

10. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, et contrairement à ce que soutient la métropole de Lyon, le requérant est recevable à présenter la présente demande en référé qui a pour objet sa mise à l’abri dans l’attente de la décision du juge pour enfants aux motifs que, d’une part, il se trouverait dans une situation de danger immédiat pour sa sécurité et sa santé alors qu’il vit dans la rue depuis la cessation de prise en charge, et, d’autre part, l’absence de qualité de mineur isolé retenu par la métropole serait manifestement erronée. La fin de non-recevoir opposée par la métropole de Lyon doit, par suite, être rejetée.

[…].

12. M. qui avait présenté lors de son évaluation effectuée dans les locaux de Forum-Réfugiés-Cosi le 27 mai 2020 une photo d’un extrait de naissance, produit l’original du jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance établit le 31 janvier 2020 par le tribunal de première instance de Dixin, Conakry 2, République de Guinée, indiquant que M. est né le 27 mars 2004 , ainsi que l’extrait d’acte de naissance mentionnant la transcription de cet acte le 19 février 2020. Pour estimer que le requérant n’a pas la qualité de mineur isolé, la métropole de Lyon s’est tout d’abord prévalu du rapport d’évaluation établi par Forum réfugiés qui fait état de ce que le requérant n’est pas en mesure de donner des repères chronologiques pouvant permettre de le situer dans le temps et de ce que sa physionomie ne permet pas d’aller dans le sens de sa prétendue minorité, et soutient que les informations données sur les raisons de son départ, son parcours migratoire et son financement sont stéréotypées, la métropole se prévaut aussi dans ses écritures et à l’audience de discordances constatées entre les déclarations de l’intéressé figurant dans les rapports établis pour le département de la Meuse le 5 mars 2020, celles qu’il a faites dans le rapport établi par Forum-réfugiés et la mention portée dans le jugement supplétif concernant la situation de la mère du requérant. La métropole de Lyon expose en outre que l’intéressé a fait état lors des deux évaluations dans le département de la Meuse de
dates de naissance différentes de celle qu’il a déclarée à Forum réfugiés laquelle correspond aux actes d’état civil produits. La métropole fait également état de ce qu’ il a déclaré sa tante « âgée » alors qu’elle a 40 ans selon le jugement supplétif et de ce qu’ il n’a pas signalé son passage dans le département de la Meuse. Toutefois, alors que la métropole de Lyon n’a pas procédé aux vérifications requises sur l’authenticité de ces actes et ne fait pas état d’éléments probants de nature à ôter à ces actes leur caractère authentique, ces observations ne suffisent pas à remettre en cause la véracité de ces documents. Par ailleurs, il résulte également de l’instruction que le rapport d’évaluation effectué par Forum réfugié conclut que sa « récente arrivée sur la structure n’a pas permis de relever des éléments d’observations substantiels, qui permettraient d’aller dans le sens de la minorité ou la majorité de l’intéressé », que le premier rapport d’évaluation établi pour le département de la Meuse mentionne qu’ « un âge compris entre 16 et 18 ans serait plus cohérent » en préconisant une protection par le biais d’un placement judiciaire, et que le second rapport d’évaluation indique qu’un âge compris entre 16 ans et plus serait plus cohérent. Ces éléments, ainsi que les rapports d’évaluation et les autres pièces produites, ne sont pas suffisants pour permettre de regarder le requérant, en l’état de l’instruction, comme n’étant manifestement pas mineur. Par suite, la fin de la prise en charge décidée par le président de la métropole de Lyon doit être regardée comme procédant d’une appréciation manifestement erronée de l’ absence de minorité de M. n’est, par ailleurs, pas contesté par la métropole de Lyon que le requérant est seul, sans famille connue, et dépourvu de ressources, qu’il vit dans un squat et dans la rue, Dès lors, dans les conditions particulières de l’espèce, la décision du président de la métropole de Lyon, qui ne soutient pas ne disposer d’aucune solution d’hébergement, révèle une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale et la situation de M. revêt le caractère d’une situation d’urgence au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.

[…]. »

Ordonnance à retrouver en format pdf ci-dessous :

TA_lyon_22092020_PEC_recoursJE
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