Résumé :
Un mineur isolé guinéen saisi le juge des enfants pour bénéficier d’une prise en charge au titre de la protection de l’enfance et produit à l’appui de sa demande un extrait du registre de l’état civil et un jugement supplétif. Sans fixer d’audience, le juge des enfants dit n’y avoir lieu à intervention éducative au titre de l’assistance éducative et déboute l’intéressé de sa demande en se fondant sur le rapport d’évaluation et le rapport simplifié d’analyse documentaire. La décision est notifiée par mail à l’avocate.
La Cour d’appel prononce la nullité du jugement du juge des enfants de Pau. En premier lieu, elle annule la décision en ce qu’elle n’a pas respecté le principe du contradictoire conformément aux articles 14 et 16 du Code de procédure civile. Le juge des enfants aurait dû organiser un véritable débat contradictoire et porter à la connaissance de l’intéressé le rapport simplifié d’analyse documentaire sur lequel il s’est fondé pour prendre sa décision. En second lieu, la Cour constate la minorité de l’appelant en se fondant sur l’analyse documentaire succincte, ne caractérisant pas la nature exacte des anomalies relevées. Enfin, elle note que la légalisation par l’Ambassade de Guinée en France vient attester l’authenticité des documents qui font donc foi de la minorité de l’intéressé.
Extraits :
« […].
Au cas précis, il ressort des pièces du dossier que si le premier Juge a rendu sa décision le 1 avril 2020 sans audience comme l’y autorisait l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 compte tenu du contexte sanitaire lié à la pandémie de Covid-19, il aurait dû programmer une nouvelle audience une fois l’état d’urgence levé, afin d’organiser un véritable débat contradictoire et porter à la connaissance de l’intéressé le rapport simplifié
d’analyse documentaire sur lequel il s’est fondé pour prendre sa décision.
La décision déférée qui n’a pas respecté le principe du contradictoire doit en conséquence être annulée.
[…]
Si cette analyse n’a pas à être écartée des débats, comme le réclame indûment l’appelant, le Conseil départemental ayant bien compétence, conformément à l’article R 221-11 du Code de l’action sociale et des familles, pour faire vérifier l’authenticité des documents d’identité produits par une personne se déclarant mineure, elle n’a guère d’intérêt dès lors qu’elle est bien trop succincte pour être utilement exploitable et pertinente.
Ce rapport simplifié de deux pages ne contient en tout et pour tout que quelques cases intitulées “Conforme et non-conforme” et une autre intitulée “Observations” :
> concernant le jugement supplétif, deux cases seulement sont cochées, une case dans la colonne “non conforme” correspondant au “formalisme” et en conclusion la case “défavorable”. Une seule observation y est faite de façon laconique : “Absence de légalisation au verso par l’Ambassade de France en Guinée, l’acte ne peut donc produire un effet de droit en France” ;
> il en est de même pour l’extrait du registre de l’état civil délivré le 8 août 2019 à CONAKRY pour lequel les deux mêmes cases sont cochées (“formalisme non conforme, conclusion défavorable”) et la même observation est faite.
Or, devant la Cour, M. X rapporte désormais la preuve que l’Ambassade de France à CONAKRY ne procède plus à la surlégalisation des actes publics guinéens destinés à être produits en FRANCE. Dans un tel contexte, le grief formulé par l’analyste n’est pas justifié.
De plus, aucun commentaire détaillé n’est joint à cette analyse, aucune précision sur la nature exacte des anomalies susceptibles d’affecter ces documents n’y est apportée, de sorte qu’on ignore les raisons précises pour lesquelles l’analyste a coché “défavorable” en guise de conclusion.
[…]. »
Arrêt à retrouver en format pdf ci-dessous :