Résumé :
Annulation des arrêtés par lesquels le préfet de la Côte d’Or a obligé un mineur isolé, confié après orientation nationale à l’aide sociale à l’enfance de la Côte d’or, à quitter le territoire français sans délai, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d’une durée d’un an et l’a assigné à résidence 45 jours en se basant
- en premier lieu sur une expertise médicale qui concluait, après un âge osseux compris entre 17 et 21 ans, à « un examen clinique en faveur d’un âge civil supérieur à 18 ans » se fondant exclusivement sur la tension artérielle, l’état cardio-pulmonaire normal et un « développement staturo-pondéral normal » de type « adulte jeune », ce qui est manifestement peu décisif, et d’autre part sur la circonstance que 4 dents de sagesse sont présentes, sans plus de précision, alors que s’agissant de ces dernières, elles peuvent apparaitre en fin d’adolescence, à partir de l’âge de 16 ans ;
- et en se basant en deuxième lieu sur la mainlevée du placement prononcée sans audience, frappée d’appel, qui reprenait une note du service de l’aide sociale à l’enfance aux termes de laquelle « x est repris pour son comportement », « il porte la casquette à l’intérieur » (…) alors que l’attitude ainsi décrite tend davantage à souligner l’immaturité de l’intéressée,
et alors que le rapport d’évaluation du département de Saône et Loire, concluait, quant à lui, au terme d’un exposé particulièrement motivé et détaillé à la minorité de l’intéressé, rapport corroboré par les attestations du proviseur de son lycée.
Dans ces conditions, ainsi que l’a relevé le Conseil constitutionnel dans sa décision QPC 2018-68 du 21 mars 2019, dès lors que le doute persiste, ce qui est le cas en l’espèce, ce doute doit profiter à la qualité de mineur de l’intéressé.
Extrait :
« 7. Or, l’attitude ainsi décrite, loin de caractériser la majorité du requérant, tend davantage à en souligner l’immaturité. Par ailleurs, l’expertise judiciaire du 20 octobre 2020, selon laquelle l’âge osseux de M. X est compris entre 17 et 21 ans, ne peut contribuer à établir sa majorité, de sorte qu’à la date de la décision d’éloignement, le doute persiste sur ce point. Si cette expertise conclut à un "examen clinique compatible avec un âge supérieur à 18 ans", elle se fonde en cela exclusivement, d’une part, sur la tension artérielle de son état "cardio-pulmonaire normal" et son "développement staturo-pondéral normal, de type adulte jeune", ce qui est manifestement peu décisif, et, d’autre part, sur la circonstance que "les quatre dents de sagesse sont présentes", sans plus de précision, alors même qu’il est constant, s’agissant de ces dernières, qu’elles peuvent apparaître en fin d’adolescence, à partir de l’âge de 16 ans. Enfin, le rapport d’évaluation, dressé le 7 août 2020 par le service d’aide sociale à l’enfance du département Saône-et-Loire, conclut quant à lui, au terme d’un exposé particulièrement motivé et détaillé, à la minorité de M.X "dont l’apparence physique, le comportement qu’il adopte et son récit" ont été jugés "conforme à l’âge allégué". Au surplus, le proviseur de son lycée atteste, au titre de l’année 2020-2021 que M.X est "un élève
sérieux, concentré, attentif, consciencieux, scolaire et assidu", qui "a fait de nombreux progrès depuis le début de l’année scolaire" et qui "fournit un travail personnel régulier et s’investit dans ses apprentissages". Dans ces conditions, ainsi que l’a relevé le Conseil constitutionnel dans sa décision QPC n° 2018-68 du 21 mars 2019, dès lors que le doute persiste au vu de l’ensemble des éléments recueillis, ce qui est le cas en l’espèce, ce doute doit profiter à la qualité de mineur de l’intéressé. M. X doit donc être regardé comme mineur à la date de l’arrêté contesté. Par suite, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens, il est fondé à se prévaloir des dispositions précitées du 1° de l’article L. 511-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, et à solliciter, pour ce motif, l’annulation de l’obligation de quitter le territoire français. Par voie de conséquence, les décisions du même jour lui refusant un délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi, prononçant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d’un an et l’assignant à résidence, doivent être annulées. »
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