Résumé :
En refusant le titre de séjour sollicité sur le fondement de l’article L. 313-15 du CESEDA à un mineur isolé confié à l’ASE entre ses 16 et 18 ans, le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste dans l’appréciation de sa situation. En effet, la cour administrative d’appel de Nancy annule le jugement du tribunal administratif de Besançon en considérant en premier lieu, que le préfet a commis une erreur de droit en se basant sur un avis défavorable de la police aux frontières sans procéder à une analyse technique et un examen personnalisé permettant d’établir l’absence d’authenticité des documents relatifs à la date de naissance de l’intéressé, et en second lieu, que le préfet a commis une erreur manifeste dans l’appréciation de la situation du jeune en refusant sa demande de titre au motif que le rapport de la structure d’accueil indiquait que le comportement de l’intéressé été marqué par plusieurs refus de se plier aux règles de vie collective du fait de son manque de maturité.
Extraits :
3. M. a produit à l’appui de sa demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l’article L. 313-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile un extrait d’acte de naissance et un jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance, faisant état d’une date de naissance le 10 juin 2001. Le préfet soutient que la direction de la police aux frontières de Pontarlier a rendu un avis défavorable sur l’authenticité du jugement supplétif du 6 juin 2017 produit par le requérant en notant que cet acte, ainsi que les autres documents produits, présentaient « toutes les caractéristiques de faux en écritures publiques ». Toutefois, il est constant que l’avis défavorable de la police aux frontières du 11 décembre 2017 sur l’authenticité de ces documents est uniquement basé sur des informations générales provenant du service de sécurité intérieure de l’ambassade de France en République de Guinée, selon lesquelles il existerait une fraude généralisée concernant l’état civil de ce pays. Si un rapport de la police aux frontières de Pontarlier du 15 janvier 2019 conclut au caractère contrefait de l’acte de décès et du jugement supplétif tenant lieu d’acte de décès du père de M. ces documents, produits afin d’établir la nature des liens avec le pays d’origine, ne sauraient entacher l’authenticité de ceux relatifs à la date de naissance de l’intéressé. Ainsi, il n’a pas été procédé à une analyse technique et à un examen personnalisé des pièces produites par le requérant permettant d’établir que les actes d’état civil produits par M. lesquels ont au demeurant été depuis légalisés, ne seraient pas authentiques. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Saône n’apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les informations sur l’état civil de M. figurant dans ces documents ne correspondent pas à la réalité. Par suite, en estimant que M. avait déclaré une fausse identité et qu’il ne démontrait pas avoir été pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize et dix-huit ans, le préfet a commis une erreur de droit et a méconnu les dispositions de l’article L. 111-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et les dispositions de l’article 47 du code civil.
4. Il ressort de l’arrêté attaqué que le préfet de la Haute-Saône afin de refuser un titre de séjour à M. s’est également fondé sur le rapport de la structure d’accueil relatif au déroulement de sa prise en charge. Il ressort de ce rapport que le comportement de M. a été marqué par plusieurs refus de se plier aux règles de vie collective du fait de son manque de maturité. Les auteurs du rapport en ont néanmoins conclu que si l’intéressé devait évoluer, sa prise en charge s’était bien déroulée dans l’ensemble. Il ressort des divers documents produits que M. a suivi avec sérieux et assiduité sa formation professionnelle dans le domaine de l’hôtellerie et la restauration et a pu obtenir dans ce cadre un apprentissage qui s’est effectué à la satisfaction de son employeur tant en ce qui concerne l’exécution de son travail que son comportement. Dans ces conditions, alors qu’il ne conserve aucun lien avec sa famille dans son pays d’origine et qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu’il relevait bien de l’aide sociale à l’enfance, M. est fondé à soutenir que le préfet de la Haute-Saône a commis une erreur manifeste dans l’appréciation de sa situation en lui refusant le titre de séjour qu’il demandait sur le fondement de l’article L. 313-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par suite, M. est fondé à demander l’annulation de cette décision ainsi que, par voie de conséquence, les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire à destination du pays dont il a la nationalité et lui faisant interdiction de retour sur le territoire.
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