Résumé :
La Cour confirme le jugement du TA annulant l’arrêté par lequel le préfet a refusé à l’intéressé la délivrance d’un titre de séjour (« vie privée et familiale » - art. L.423-22 du CESEDA).
En effet, la Cour estime que le préfet ne renverse pas la présomption de validité des actes d’état civil étrangers posée par l’article 47 du code civil. Tout d’abord, l’obligation de légalisation du jugement supplétif est remplie au regard de sa légalisation par l’ambassade de Guinée en France, les services consulaires français en Guinée ne procédant plus à cette légalisation. De plus, en l’absence d’élément sur la qualité des supports et les sécurités que doivent comporter les actes d’état civil selon la législation guinéenne, le fait qu’ils soient établis sur support ordinaire sans sécurité documentaire ne permet pas d’établir que les mentions relatives à l’identité sont irrégulières, falsifiées ou inexactes. En outre, le fait que les cachets comportent des anomalies et que les documents présentent des fautes d’orthographe ne suffit pas à établir le caractère irrégulier, falsifié ou inexact de ces actes. Enfin, rien ne permet d’affirmer que l’article 196 du code civil guinéen à vocation à s’appliquer au jugement supplétif.
Par ailleurs, si le préfet relève que l’intéressé n’est pas dépourvu de lien familial ou social en Guinée, la Cour rappelle que l’article L. 423-22 n’exige pas que le demandeur soit isolé dans son pays d’origine.
Extraits de l’arrêt :
« 6. Pour refuser de délivrer à M. A le titre de séjour qu’il avait sollicité sur le fondement de l’article L. 423-22 […], le préfet du Doubs s’est fondé sur la fraude commise par le demandeur qui avait produit des documents d’état civil présentant le caractère de faux en écriture publique et que par conséquence, l’intéressé était majeur lors de sa prise en charge par l’aide sociale à l’enfance. Le préfet s’est alors fondé sur le rapport rédigé par la cellule de lutte contre la fraude documentaire interdépartementale des services de la police aux frontières […] qui, après avoir souligné l’impossibilité de procéder à une analyse de l’authenticité des supports non sécurisés des documents produits, relève notamment que le jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance supporte des cachets secs et humides qui présentent des anomalies, des fautes d’orthographes, ne comportent pas les mentions prévues dans le code civil guinéen et n’a pas été légalisé par les autorités consulaires françaises en Guinée.
7. Toutefois, l’obligation de légalisation à laquelle est soumise le jugement supplétif guinéen, […] , doit être regardée comme remplie par la légalisation effectuée par l’ambassade de Guinée en France dès lors que les services consulaires français dans ce pays ne procèdent plus à cette légalisation. Par ailleurs, en l’absence de tout élément sur la qualité des supports des actes d’état civil guinéens et les sécurités qu’ils doivent comporter selon la législation guinéenne, la circonstance que les actes présentés par M. A sont établis sur un support ordinaire grand public sans sécurité documentaire n’est pas de nature à établir que les mentions relatives à son identité et notamment à sa date de naissance sont irrégulières, falsifiées ou inexactes. Les seules circonstances que les cachets secs et humides présentent des anomalies et que les documents présentent des fautes d’orthographe ne sauraient également suffire à établir que ces actes d’état civil seraient irréguliers, falsifiés ou inexacts. Enfin, si l’article 196 du code civil guinéen dans sa rédaction alors en vigueur prévoyait que : " L’acte de naissance énoncera le jour, l’heure et le lieu de naissance, le sexe de l’enfant, et les prénoms qui lui seront donnés, les prénoms, âges, professions et domiciles des père et mère. Si les père et mère de l’enfant naturel ou l’un d’eux, ne sont pas désignés à l’officier de l’état civil, il ne sera fait sur les registres aucune mention à ce sujet ", il ne ressort pas de ces dispositions qui visent seulement les actes d’état civil, qu’elles s’appliqueraient au jugement supplétif. Au regard de tout ce qui précède, le préfet du Doubs ne renverse pas la présomption de validité qui s’attache, en vertu notamment de l’article 47 du code civil, aux mentions contenues dans les actes produits par M. A.
[…]
9. Si le préfet du Doubs fait valoir en appel que M. A n’est pas dépourvu de tout lien familial ou social dans son pays d’origine, les dispositions de l’article L. 423-22 précité n’exigent pas que le demandeur soit isolé dans son pays d’origine.
[...] »
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