Résumé :
Le TA annule une décision portant refus de titre de séjour (demande fondée sur les articles L. 423-23 et L. 435-1 du CESEDA) et enjoint au préfet de délivrer à l’intéressé (confié à l’ASE durant sa minorité) une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».
En effet, même à supposer que l’acte de naissance eût été contrefait, le refus de séjour méconnaît l’article 8 de la CESDH (droit au respect de la vie privée et familiale) eu égard à l’insertion sociale et professionnelle particulière de l’intéressé qui a reconstitué sur le territoire français sa vie privée.
Extraits du jugement :
« 1. M. A, ressortissant malien, a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par l’arrêté attaqué du 6 mai 2022, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français […] .
[…].
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A a été confié, en tant que mineur non accompagné, aux services de l’aide sociale à l’enfance du département de la Seine-Maritime […]. Après une scolarité très sérieuse, il a obtenu […], contrairement à ce que soutient le préfet, le certificat d’aptitude professionnelle (CAP) de boucher, la réalité de son investissement et le caractère exemplaire de son parcours scolaire étant d’ailleurs attestés par sa participation à la finale départementale du concours du meilleur apprenti de France au titre de l’année 2021. M. A, dont les compétences professionnelles et la motivation sont appréciées, a été embauché le 1er septembre 2021, au terme de son contrat d’apprentissage, par l’entreprise qui l’a formé, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet sur la base d’un salaire mensuel brut de 1 852 euros, en qualité de boucher, activité professionnelle qui figure notamment sur la liste des métiers caractérisés en Normandie par des difficultés de recrutement. Enfin, outre cette insertion professionnelle réussie et particulièrement méritante, le requérant, dont le comportement ne représente pas une menace pour l’ordre public, est parfaitement intégré à la vie locale, s’est investi dans sa scolarité, notamment dans l’apprentissage du français malgré le contexte difficile dans lequel il est arrivé sur le territoire, a noué de fortes relations sociales et amicales et bénéficie depuis le 30 juillet 2021 de son propre logement. Dans ces conditions, eu égard à l’insertion sociale et professionnelle particulière du requérant qui a reconstitué sur le territoire français sa vie privée, le préfet de la Seine-Maritime ne pouvait, à supposer même que l’acte de naissance de l’intéressé eût été contrefait, rejeter sa demande de titre de séjour sans méconnaître les stipulations précitées de l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
[…]. »
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