Source : Défenseur des droits
Voir en ligne : www.juridique.defenseurdesdroits.fr
Résumé :
« Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation relative aux conditions d’évaluation et d’accueil provisoire d’urgence des personnes se disant mineures non accompagnées par un conseil départemental.
Après instruction et consultation du collège compétent en matière de défense et de promotion des droits de l’enfant, la Défenseure des droits a conclu que :
- l’absence d’accueil provisoire d’urgence inconditionnel pour toutes les personnes se déclarant mineures non accompagnées et la mise en place, par le département, d’un entretien préalable d’admission est contraire aux dispositions de l’article R. 221-11 du code de l’action sociale et des familles, méconnaît le principe de présomption de minorité et est contraire à l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant ;
- les mentions et modalités de notification du refus d’accueil provisoire d’urgence opposé aux personnes considérées comme « manifestement majeures » par le conseil départemental ne sont pas respectueuses du droit au recours effectif de celles-ci ;
- la prise en charge des mineurs non accompagnés, y compris pendant la phase d’accueil provisoire d’urgence, dans le cadre d’un hébergement hôtelier, est contraire à l’intérêt supérieur de ces enfants ;
- l’absence d’accompagnement socio-éducatif et de bilan de santé systématique lors de l’accueil provisoire d’urgence portent atteinte aux droits des enfants accueillis ;
- en méconnaissant, dans le protocole conclu avec la préfecture pour appui à l’évaluation des personnes se présentant comme mineures non accompagnées, la possibilité pour les intéressés de refuser de communiquer leurs données personnelles, le conseil départemental a porté atteinte à l’exigence constitutionnelle de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant.
La Défenseure des droits recommande au conseil départemental de :
- organiser l’accueil provisoire d’urgence de toute personne se disant mineure non accompagnée de manière inconditionnelle ;
- proscrire le recours à l’hébergement hôtelier pour tout mineur, y compris dans le cadre de l’accueil provisoire d’urgence de personnes se déclarant mineures non accompagnées ;
- mettre en place un suivi socio-éducatif par un travailleur social incluant les démarches liées à la scolarisation et à la reconstitution de l’état civil le cas échéant, dès la phase d’accueil provisoire d’urgence ;
- prévoir l’organisation systématique d’un bilan de santé pour chaque mineur accueilli au sein du dispositif d’accueil provisoire d’urgence ;
- amender le protocole conclu avec la préfecture en y retirant la mention de l’impossibilité pour les personnes concernées de refuser de communiquer leurs données personnelles ;
La Défenseure des droits prend acte de la modification des mentions relatives aux voies et délais de recours figurant sur les décisions de refus de prise en charge prises par le conseil départemental à l’égard de personnes se déclarant mineures non accompagnées ;
La Défenseure des droits recommande au garde des sceaux, ministre de la justice de :
- initier une modification législative afin qu’un administrateur ad hoc soit désigné en faveur de chaque personne se déclarant mineure non accompagnée, avant toute évaluation de sa minorité et de son isolement et jusqu’à intervention d’une décision juridictionnelle définitive la concernant ;
- initier une modification législative afin que soit garanti à toutes les personnes se déclarant mineures non accompagnées le bénéfice de la présomption de minorité, et ainsi la poursuite de leur prise en charge en protection de l’enfance le temps de la procédure de recours et ce jusqu’à l’intervention d’une décision juridictionnelle définitive les concernant.
La Défenseure des droits recommande au garde des Sceaux ministre de la justice, et à la ministre déléguée chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles de :
- mettre en œuvre les mesures nécessaires pour un recueil fiable de données s’agissant du nombre de personnes se disant mineures non accompagnées évaluées chaque année par les départements, de celles faisant l’objet d’un refus d’admission à l’aide sociale à l’enfance par les départements et, parmi ces dernières, celles étant finalement confiées par décision judiciaire à l’aide sociale à l’enfance. »
Voir la décision du DDD en PDF :