Résumé :
Le juge des référés suspend la décision par laquelle le préfet a refusé d’enregistrer la demande de titre de séjour de l’intéressé (sollicité sur le fondement de l’art. L. 435-3 du CESEDA) au motif que le dossier était incomplet en l’absence de certains documents justifiant de la nature de ses liens avec sa famille dans son pays d’origine, et enjoint au préfet de lui fixer un rendez-vous et de réexaminer sa demande d’enregistrement.
Les dispositions de l’annexe 10 du CESEDA se contentent de citer des exemples de documents susceptibles d’être produits pour permettre d’apprécier la nature des liens avec la famille restée dans le pays d’origine sans conférer à la production des documents ainsi énumérés un caractère impératif.
Ainsi, le préfet ne pouvait fonder sa décision sur l’absence de production de documents attestant de la déchéance de l’autorité parentale et du décès du père de l’intéressé, alors que la production de ces éléments ne revêt pas de caractère obligatoire et que leur absence ne rendait pas impossible l’instruction de la demande dès lors que l’intéressé produisait d’autres documents permettant au préfet d’apprécier ses liens avec sa famille restée dans son pays d’origine (rapport social, attestation sur l’honneur).
Le refus d’enregistrer sa demande est ainsi constitutif d’une décision faisant grief dont l’intéressé est recevable à demander la suspension.
Le juge des référés retient que la situation d’urgence est ici caractérisée et qu’il existe bien un doute sérieux sur la légalité de la décision de refus d’enregistrement de la demande de titre de séjour.
Voir dans le même sens :
TA de Grenoble - Ordonnance n°2402204 du 23 avril 2024 :
TA de Grenoble - Ordonnance n°2402614 du 6 mai 2024 :
Extraits de l’ordonnance :
« […].
4. Il découle de ces dispositions que l’autorité compétente peut refuser d’enregistrer une demande de titre de séjour lorsque que le dossier présenté à son appui est incomplet. La décision par laquelle cette autorité compétente refuse l’enregistrement d’un dossier incomplet ne fait pas grief. Toutefois, le caractère complet d’un tel dossier ne saurait être subordonné à la production de l’intégralité des pièces prévues par ces dispositions. Le caractère incomplet du dossier ne peut être opposé que lorsque l’absence de l’une de ces pièces rend impossible l’instruction de la demande.
5. M.A a formé une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l’article L. 435-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile […]. Au titre des pièces à fournir en première demande d’un tel titre, l’annexe 10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile susmentionnée dispose " -nature des liens avec la famille restée dans le pays d’origine (tout document probant y compris actes de décès des membres de la famille à l’étranger, perte de l’autorité parentale des parents restés sur place, etc.) ". Il résulte de ces dernières dispositions qu’elles se limitent à citer des exemples de documents susceptibles d’être produits pour permettre à l’autorité compétente, sous le contrôle du juge, d’apprécier la nature des liens avec la famille restée dans le pays d’origine sans conférer à la production des documents ainsi énumérés un caractère impératif.
6. Il n’est pas contredit par le préfet de l’Isère que le refus d’enregistrement du dossier de demande de titre de séjour de M. A est fondé sur les motifs que ce dernier n’a pas produit d’acte de décès de son père et l’absence de déchéance d’autorité parentale. Ainsi qu’il vient d’être dit, il ne résulte pas des dispositions précitées que la production de ces éléments revêt un caractère obligatoire. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier l’absence de production de tels éléments rendait impossible l’instruction de la demande de M. A, dès lors que celui-ci produisait d’autres documents permettant au préfet d’apprécier ses liens avec sa famille restée dans son pays d’origine, tels que le rapport social du pôle jeunesse et migration, ainsi qu’une attestation sur l’honneur. Le préfet de l’Isère ne se prévaut de l’absence d’aucune autre pièce au dossier présenté par M. A à l’appui de sa demande de titre de séjour. Dans ces circonstances, contrairement à ce que soutient le préfet de l’Isère, le refus d’enregistrer le dossier de M. A, qui n’était pas incomplet, est constitutif d’une décision faisant grief dont M. A est recevable à demander la suspension.
[…]. »
Voir l’ordonnance en PDF :