Résumé :
La Cour d’appel infirme le jugement du juge des enfants et confie l’intéressé, mineur et isolé, au département.
Concernant les documents d’état civil guinéens présentés, la Cour retient notamment que :
- S’agissant du jugement supplétif, aucun texte excluant le dépôt de la requête un jour férié et une instruction en trois jours n’est produit.
- Ce document est conforme à l’article 201 du code civil guinéen, qui n’impose pas la mention des dates en lettres.
- L’absence de mention de la date et du lieu de naissance du père est prévue par l’article 184 de ce même code.
- La discordance relative à la profession de la mère avec celle déclarée lors de l’entretien est sans rapport avec la force probante de l’acte, d’autant que l’évaluation n’a, en l’espèce, qu’une valeur très relative.
- L’acte de naissance est conforme à l’article 204 du code civil guinéen, le motif de non-conformité tiré de l’absence de mention du sexe de l’enfant n’étant pas opérant puisque le jugement supplétif, dont il est la transcription, ne le mentionne pas.
La Cour d’appel écarte la valeur probante du rapport d’évaluation. En effet, les conditions de cette évaluation sont inconnues (capacités et qualifications professionnelles du ou des évaluateurs, temps d’entretien, relecture…). Ce rapport n’est en outre pas en conformité avec la réalité puisqu’il n’existe qu’un rapport unique ne faisant pas mention du fait que l’intéressé a été fait l’objet de plusieurs entretiens. Surtout, ce rapport ne tient aucun compte de l’état de santé de l’intéressé qui a été hospitalisé à la suite de l’entretien. Le département n’a tiré aucune conséquence du fait que ces éléments ont été recueillis alors qu’il était en l’état de faiblesse et n’a pas procédé à une seconde évaluation complète dans une situation où il aurait été en capacité de s’exprimer.
Enfin, les considérations subjectives sur son corps, son degré d’autonomie, sa maturité, ses positionnements d’adulte, sont écartées, s’agissant d’un jeune homme ayant vécu dans des conditions difficiles en Guinée, peu scolarisé, et ayant traversé un continent clandestinement pour arriver en Europe.
Voir dans le même sens : Cour d’appel de Rennes- Arrêt N°346/2024 du 18 novembre 2024
Extraits de l’arrêt :
« […].
Aucun texte n’est produit à l’appui de ces observations excluant un dépôt de requête un jour férié et une instruction en trois jours.
[...].
L’examen de ce document montre qu’il est conforme aux prescriptions de l’article 201 du Code Civil guinéen, qui n’impose pas la mention des dates en lettres.
L’absence de mention de la date et du lieu de naissance du père est prévue par l’article 184 du Code Civil guinéen relatif aux actes de naissance […].
Enfin, l’observation relative à la profession de la mère en discordance avec celle déclarée par l’appelant lors de l’évaluation est sans rapport avec la force probante de l’acte, d’autant que l’évaluation n’a, dans le cas de l’espèce, qu’une valeur très relative.
Sur l’acte de naissance, la Cour constate qu’il est conforme aux prescriptions de l’article 204 du Code Civil guinéen. En effet, le motif de non conformité tiré de l’absence de mention du sexe de l’enfant n’est pas opérant dans la mesure où le jugement supplétif, dont il est la transcription, ne le mentionne pas.
[...].
S’agissant du rapport d’évaluation, il n’a pas de valeur probante. Les conditions de l’évaluation sont inconnues (capacités et qualifications professionnelles du ou des évaluateurs, temps d’entretien, relecture ou pas…). Il n’est pas en conformité avec la réalité de l’évaluation puisqu’il existe un rapport unique daté du 16 février 2023 alors qu’il est établi que l’appelant a été rencontré plusieurs fois postérieurement et surtout qu’il ne tient aucun compte de l’état de santé de l’appelant qui soutient pourtant qu’il a été hospitalisé à la suite de l’entretien du 16 février et qui justifie de ses maux de tête et de la nécessité d’une IRM.
La Cour constate que le Conseil Départemental reconnaît que "les violences subies par le requérant étaient traumatisantes" mais n’en a tiré aucune conséquence en se basant sur des éléments recueillis alors que l’intéressé était en état de faiblesse. Le Conseil Départemental a attendu le 07 avril 2024 pour rejeter la demande de prise en charge, ce qui lui laissait pourtant le temps de procéder à une seconde évaluation complète de la situation, dans une situation où l’intéressé aurait été en capacité de s’exprimer.
Enfin, les autres considération subjectives énoncées en termes généraux et génériques sur son corps, son degré d’autonomie, sa maturité, ses positionnements d’adulte sont hors débats, s’agissant d’un jeune homme ayant vécu dans des conditions difficiles en Guinée, peu scolarisé, et ayant traversé un continent clandestinement pour arriver en Europe.
[…] prouve donc sa minorité par les actes d’état civil qu’il produit et les autres éléments ne viennent pas renverser la présomption d’authenticité.
[…]. »
Arrêt en PDF :