Résumé :
Le juge des référés, statuant sur le fondement de l’art. L521-2 du code de justice administrative (« référé liberté »), enjoint au département de l’Ain d’assurer l’hébergement et la prise en charge de l’intéressé, mineur isolé étranger qui s’est présenté au département sans faire l’objet d’un accueil provisoire d’urgence (APU).
Les éléments mis en avant par le département, liés à une saturation de ses capacités d’accueil, ne démontrent pas à eux seuls, et compte tenu des moyens dont il dispose, une impossibilité de remplir sa mission. Le juge des référés souligne en outre que le département n’a pas saisi le juge des enfants, ni avisé le procureur de la République de la situation de l’intéressé, en dépit de son caractère urgent.
Ce dernier est ainsi demeuré sans aucun hébergement ni prise en charge de ses besoins essentiels.
Ce faisant, le département a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. La situation de l’intéressé revêt en outre le caractère d’une situation d’urgence.
Extraits de l’ordonnance :
« […].
6. Il résulte de ces dispositions que, sous réserve des cas où la condition de minorité ne serait à l’évidence pas remplie, il incombe aux autorités du département de mettre en place un accueil provisoire d’urgence pour toute personne se déclarant mineure et privée temporairement ou définitivement de la protection de sa famille, confrontée à des difficultés risquant de mettre en danger sa santé, sa sécurité ou sa moralité, en particulier parce qu’elle est sans abri. Lorsqu’elle entraîne des conséquences graves pour le mineur intéressé, une carence caractérisée dans l’accomplissement de cette mission porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Il incombe au juge des référés d’apprécier, dans chaque cas, les diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l’âge, de l’état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée.
7. Il résulte de l’instruction que M. A, ressortissant guinéen se déclarant mineur, s’est présenté en décembre 2024 au service enfant du département de l’Ain, où un agent lui a indiqué que le service n’était pas en mesure de l’accueillir, alors pourtant que l’intéressé est isolé et sans solution d’hébergement, tant à cette date qu’à celle de la présente ordonnance. Pour justifier de la carence à l’accueillir, dans un premier temps pendant la période d’accueil provisoire d’urgence définie par les dispositions citées aux points 4 et 5, le département de l’Ain invoque la saturation de ses capacités d’accueil du département, l’ensemble des structures étant selon lui complètes ou en dépassement de capacité, malgré une hausse conséquente du budget alloué à cette mission. Toutefois ces éléments ne démontrent pas, à eux seuls, et compte tenu des moyens dont dispose le département de l’Ain, d’une impossibilité pour ce dernier de remplir sa mission, notamment au titre de l’accueil provisoire d’urgence, alors en outre que le département n’a pas saisi l’autorité judiciaire en application de l’article 375 du code civil, ni avisé le procureur de la République en application de l’article L. 223-2 du code de l’action sociale et des familles de la situation de M. A en dépit de l’urgence que celle-ci caractérise compte tenu de sa minorité et de son isolement. M. A étant ainsi dépourvu de tout soutien et se trouvant privé d’hébergement et de toute prise en charge de ses besoins essentiels, le département de l’Ain, doit, en l’état de l’instruction, être regardé comme ayant porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale et la situation de M. A revêt, en l’espèce, le caractère d’une situation d’urgence au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.
[…]. »
Ordonnance en PDF :
Source de l’ordonnance : https://opendata.justice-administrative.fr (29.01.2025).