Résumé :
Un mineur isolé ressortissant guinéen a fait l’objet d’une OQTF sans délai. Pour établir sa minorité, le requérant produit un extrait du registre d’état civil de sa commune de naissance portant transcription d’un jugement supplétif d’acte de naissance ainsi qu’un extrait d’acte de naissance.
Le préfet, en se bornant à indiquer les résultats de l’examen osseux, a méconnu les dispositions du 1° de l’article L.511-4 du CESEDA en prenant une OQTF à son encontre. Le tribunal administratif prend en compte la marge d’erreur susceptible d’affecter les résultats de ce type d’examen osseux et conclut à l’impossibilité de renverser la présomption de validité des actes d’état civil du requérant dès lors que l’analyse par la fraude documentaire a seulement pointé le caractère "inutile" du jugement supplétif, sans conclure à un avis définitif sur l’authenticité du document.
Le tribunal administratif annule la mesure d’éloignement.
Extraits du jugement :
« […].
4. Pour établir qu’il était mineur le requérant a produit un extrait du registre d’état civil de la commune (...), en Guinée, portant transcription d’un jugement supplétif d’acte de naissance, daté du 27 octobre 2017, ainsi qu’un extrait d’acte de naissance, du même état civil, indiquant l’un et l’autre qu’il est né le 9 mars 2001. Pour justifier de la mesure d’éloignement contestée, le préfet du Lot se borne à indiquer qu’un examen osseux, réalisé à la suite d’une réquisition du parquet, a établi la majorité de l’intéressé. Toutefois, si dans son rapport, établi le 15 décembre 2017 sur la base d’une radiographie de la main et du poignet gauche du requérant, le médecin du service de médecine légale chargé de cet examen, indique que l’âge osseux « le plus probable » de l’intéressé est « d’au moins 19 ans », il souligne également que les résultats obtenus présentent une marge d’incertitude, compte tenu de « la variabilité interindividuelle en maturation osseuse » et nuance ses conclusions en indiquant que la maturation osseuse squelettique de M. est « compatible avec un âge osseux supérieur ou égal à 18 ans ». Dans ces conditions, compte tenu de la marge d’erreur susceptible d’affecter les résultats de ce type d’examen osseux et en l’absence de tout autre examen clinique, celui-ci ne peut suffire à établir la majorité du requérant à la date de l’arrêté en litige. Par ailleurs si le préfet, fait état en défense d’une analyse réalisée le 21 décembre 2017 par l’un des experts en fraude documentaire de la DIDPAF de Toulouse, pointant le caractère « inutile » du jugement supplétif du 27 octobre 2017 compte tenu de la production de l’acte de naissance délivré en 2001, cette analyse, réalisée en un quart d’heure, et concluant à l’impossibilité de formuler un avis définitif quant à l’authenticité du document analysé, ne permet pas de renverser la présomption de validité des actes d’état civil produits par le requérant. Compte tenu de ce qui précède, la majorité de M. à la date de la mesure d’éloignement contestée ne peut être regardée comme acquise. Dès lors, en prononçant ladite mesure à son encontre, le préfet du Lot a méconnu les dispositions du 1° de l’article L. 511-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens soulevés, que M. est fondé à demander l’annulation de la décision du 21 décembre 2017 par laquelle le préfet du Lot l’a obligé à quitter le territoire français. Par suite, les décisions du même jour refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination de cette mesure d’éloignement sont dépourvues de base légale et doivent également être annulées ;
[…]. »
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