Missions de l’ASE et droit à la protection de l’enfance

L’aide sociale à l’enfance et ses missions

L’aide sociale à l’enfance est un service non personnalisé du département, placé sous l’autorité du président du conseil départemental. (article L. 221-1 et L. 221-2 du code de l’action sociale des familles - ci-après CASF)

Les missions de l’aide sociale à l’enfance sont listées à l’article L. 221-1 du code de de l’action sociale et des familles et peuvent être résumées de la façon suivante :

  • Mission de soutien matériel, éducatif et psychologique aux mineurs et à leur famille, ainsi qu’aux jeunes majeurs de moins de 21 ans, lorsque les jeunes sont confrontés à des mises en danger
  • Mission de prévention des situations de danger à l’égard des mineurs
  • Mission de protection des mineurs en danger, notamment en prenant en charge des mineurs confiés en raison de ce danger
  • Mission de contrôle des personnes et établissements auxquels sont confiés les jeunes en danger
  • Mission de l’évaluation des situations de danger ; recueil et transmission des informations préoccupantes
Focus sur les signalements - informations préoccupantes
Informations préoccupantes

L’article L. 226-3 du code de l’action sociale et des familles prévoit :

« Le président du conseil départemental est chargé du recueil, du traitement et de l’évaluation, à tout moment et quelle qu’en soit l’origine, des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l’être. (…) »

La situation d’un mineur faisant l’objet d’une information préoccupante est évaluée par une équipe pluridisciplinaire. Après l’évaluation, la situation est signalée à l’autorité judiciaire si nécessaire.

Toute personne peut réaliser une information préoccupante pour signaler au département la situation d’un mineur en danger.

En application de l’article L. 226-2-1 du code de l’action sociale et des familles, les professionnels qui exercent en matière de protection de l’enfance ont l’obligation de transmettre les informations préoccupantes sur un mineur en danger ou risquant de l’être.

Enfin, l’absence de dénonciation de mauvais traitement infligés à un mineur est un délit prévu et réprimé par l’article 434-3 du code pénal :

« Le fait, pour quiconque ayant connaissance de privations, de mauvais traitements ou d’agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives ou de continuer à ne pas informer ces autorités tant que ces infractions n’ont pas cessé est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Lorsque le défaut d’information concerne une infraction mentionnée au premier alinéa commise sur un mineur de quinze ans, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.
Sauf lorsque la loi en dispose autrement, sont exceptées des dispositions qui précèdent les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l’article 226-13.
 »

Signalement Parquet

Toutes structures associatives et les acteurs qui travaillent dans le secteur public et/ou privé ont l’obligation d’aviser le parquet de la situation d’un enfant en danger.

Contrairement à l’information préoccupante qui doit être adressée à l’autorité administrative, le signalement parquet est à destination de l’autorité judiciaire : le Procureur de la République.

L’article L.226-4 du Code de l’Action Sociale et des Familles prévoit que :

« Toute personne travaillant au sein des organismes mentionnés à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 226-3 avise directement, du fait de la gravité de la situation, le procureur de la République de la situation d’un mineur en danger et adresse une copie de cette transmission au président du conseil départemental.
Lorsque le procureur a été avisé par une autre personne, il transmet au président du conseil départemental les informations qui sont nécessaires à l’accomplissement de la mission de protection de l’enfance confiée à ce dernier.
 »

L’information préoccupante et le signalement sont des instruments qui se différencient selon leur destinataire. L’information préoccupante est à destination du Conseil départemental c’est-à-dire de l’autorité administrative. Le signalement parquet est à destination du parquet c’est-à-dire de l’autorité judiciaire. Ces instruments se différencient également par leur auteur. L’auteur d’une information préoccupante peut être un citoyen, un professionnel, une association. L’auteur d’un signalement parquet ne peut être qu’un professionnel ou une association. Dans le cadre d’un signalement parquet, c’est la gravité de la situation qui justifie la compétence de l’autorité judiciaire.

Le droit commun de la protection de l’enfance

Grands principes applicables

Article 20 de la Convention internationale des droits de l’enfant (protection de l’enfant privé de son milieu familial) :

«  1. Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciales de l’Etat.
2. Les Etats parties prévoient pour cet enfant une protection de remplacement conforme à leur législation nationale.
3. Cette protection de remplacement peut notamment avoir la forme du placement dans une famille, de la kafalah de droit islamique, de l’adoption ou, en cas de nécessité, du placement dans un établissement pour enfants approprié. Dans le choix entre ces solutions, il est dûment tenu compte de la nécessité d’une certaine continuité dans l’éducation de l’enfant, ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique
. »

Article 2-1 de la Convention internationale des droits de l’enfant (Non discrimination) :

« 1. Les Etats parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre de l’enfant ou de ses parents ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur naissance ou de toute autre situation.  »

Article L. 111-2 du code de l’action sociale et des familles :

«  Les personnes de nationalité étrangère bénéficient dans les conditions propres à chacune de ces prestations : 1° Des prestations d’aide sociale à l’enfance (...)  »

Applications aux mineurs isolés étrangers

Il résulte des textes précités qu’il n’y a aucune condition de nationalité pour accéder aux prestations de l’aide sociale à l’enfance. La protection de l’enfance peut bénéficier à tout mineur se trouvant sur le territoire français, quelle que soit sa nationalité.

En vertu de l’article 20 de la Convention internationale des droits de l’enfant, tout enfant privé de son milieu familial a le droit à une protection spéciale. Si la Convention prévoit que cette protection spéciale est fournie par l’Etat, il va de soi que dans le système français, c’est le Département qui est chargé de cette protection, compte tenu de sa compétence.

Enfin, l’article 2 de la Convention prévoit une absence de discrimination des enfants dans l’accès à leurs droits.

Compte tenu des grands principes énoncés par ces textes, les mineurs isolés étrangers ont le droit de bénéficier de la protection de l’enfance, au même titre que les autres mineurs présents sur le territoire français.

En application de l’article L. 222-5 du CASF, le service de l’aide sociale à l’enfance prend en charge les mineurs confiés par le Juge des enfants. Le juge des enfants place à l’aide sociale à l’enfance les mineurs dont la protection l’exige, dans le cadre de l’assistance éducative (article 375-3 du code civil). Des mesures d’assistance éducative sont ordonnées par la justice lorsque «  la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises » (article 375 du code civil).

Les mineurs, quels que soient leur nationalité, peuvent donc être placés à l’aide sociale à l’enfance s’ils sont en situation de danger.

Spécificités concernant les mineurs isolés étrangers

Les mineurs isolés étrangers sont les :

  • Mineurs âgés de moins de 18 ans
  • De nationalité étrangère
  • Qui sont isolés, c’est-à-dire qui sont sur le territoire français sans représentant légal ni personne les prenant en charge et manifestant la volonté de se les voir confier, notamment en saisissant le juge compétent. (voir article 1 de l’arrêté du 20 novembre 2019 ). Il s’agit de mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de sa famille (article L. 221-2-4 du CASF). Du fait de cet isolement, le mineur est en situation de danger, au sens de l’article 375 du code civil. Il doit donc être placé à l’aide sociale à l’enfance.

Dès lors que les prestations de l’aide sociale à l’enfance ne sont pas conditionnées à la nationalité, et que les mineurs se trouvant sur le territoire français doivent accéder à leurs droits sans discrimination alors le mineur isolé étranger est pris en charge dans le cadre du droit commun de la protection de l’enfance. Pour cette raison, l’expression « statut de mineur isolé étranger » ou « statut de MNA » qui est souvent utilisée est un abus de langage puisque ces jeunes relèvent bien du droit commun.

Cependant, deux spécificités sont à noter :

  • Le mineur isolé étranger bénéficie d’un accueil provisoire d’urgence et d’une évaluation spécifiques, qui sont prévus aux articles L. 221-2-4 et R. 221-11 et suivants du code de l’action sociale et des familles ;
  • Les mineurs isolés étrangers sont souvent pris en charge dans des dispositifs spécifiques, pour lesquels les cahiers des charges prévoient des conditions financières bien inférieures aux dispositifs de droit commun. A cet effet, voir notre observatoire des appels à projets.
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