Les examens d’âge osseux

Plan
1. Cadre juridique interne et international
2. Conditions cumulatives préalables et subsidiarité de l’examen
3. Autres conditions et garanties
4. Conclusions de l’examen
5. Procédure
6. Modalités
7. Avis des instances nationales et internationales

1. Cadre juridique interne et international

L’article 43 de la loi n°2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant a modifié l’article 388 du code civil, y prévoyant la possibilité d’ordonner des examens d’âge osseux.

L’article 388 du code civil est ainsi rédigé :

« Le mineur est l’individu de l’un ou l’autre sexe qui n’a point encore l’âge de dix-huit ans accomplis.
Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé.
Les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur. Le doute profite à l’intéressé.
En cas de doute sur la minorité de l’intéressé, il ne peut être procédé à une évaluation de son âge à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires.
 »

Par la décision n°2018-768 QPC du 21 mars 2019 M. Adama S., le Conseil constitutionnel a décidé que les 2ème et 3ème alinéas de cet article étaient conformes à la Constitution.

Cette décision est particulièrement importante.

D’une part, le Conseil constitutionnel déduit pour la première fois une exigence constitutionnelle de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant.

D’autre part, le Conseil constitutionnel insiste sur les conditions et les garanties devant entourer les examens d’âge osseux.

Extraits importants de cette décision  :

« 6. Il en résulte une exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant. Cette exigence impose que les mineurs présents sur le territoire national bénéficient de la protection légale attachée à leur âge. Il s’ensuit que les règles relatives à la détermination de l’âge d’un individu doivent être entourées des garanties nécessaires afin que des personnes mineures ne soient pas indûment considérées comme majeures.
7. Les dispositions contestées autorisent le recours à un examen radiologique osseux aux fins de contribuer à la détermination de l’âge d’une personne. En l’état des connaissances scientifiques, il est établi que les résultats de ce type d’examen peuvent comporter une marge d’erreur significative.
8. Toutefois, en premier lieu, seule l’autorité judiciaire peut décider de recourir à un tel examen.
9. En deuxième lieu, cet examen ne peut être ordonné que si la personne en cause n’a pas de documents d’identité valables et si l’âge qu’elle allègue n’est pas vraisemblable. Il appartient à l’autorité judiciaire de s’assurer du respect du caractère subsidiaire de cet examen.
10. En troisième lieu, cet examen ne peut intervenir qu’après que le consentement éclairé de l’intéressé a été recueilli, dans une langue qu’il comprend. À cet égard, la majorité d’une personne ne saurait être déduite de son seul refus de se soumettre à un examen osseux.
11. En dernier lieu, le législateur a pris en compte, dans les garanties qu’il a établies, l’existence de la marge d’erreur entourant les conclusions des examens radiologiques. D’une part, il a imposé la mention de cette marge dans les résultats de ces examens. D’autre part, il a exclu que ces conclusions puissent constituer l’unique fondement dans la détermination de l’âge de la personne. Il appartient donc à l’autorité judiciaire d’apprécier la minorité ou la majorité de celle-ci en prenant en compte les autres éléments ayant pu être recueillis, tels que l’évaluation sociale ou les entretiens réalisés par les services de la protection de l’enfance. Enfin, si les conclusions des examens radiologiques sont en contradiction avec les autres éléments d’appréciation susvisés et que le doute persiste au vu de l’ensemble des éléments recueillis, ce doute doit profiter à la qualité de mineur de l’intéressé.
12. Il appartient aux autorités administratives et judiciaires compétentes de donner leur plein effet aux garanties précitées. »
(...)
15. En second lieu, un examen radiologique osseux ne peut être ordonné que dans les conditions déterminées aux paragraphes 8, 9 et 10 et en tenant compte d’un avis médical qui le déconseillerait à raison des risques particuliers qu’il pourrait présenter pour la personne concernée.
(...)
18. Les examens radiologiques osseux contestés visent uniquement à déterminer l’âge d’une personne et ne peuvent être réalisés sans son accord. Ils n’impliquent aucune intervention corporelle interne et ne comportent aucun procédé douloureux, intrusif ou attentatoire à la dignité des personnes. En conséquence, manquent en fait les griefs tirés de l’atteinte au principe du respect de la dignité de la personne humaine et à l’inviolabilité du corps humain. »

Le Comité des droits de l’enfant s’est prononcé sur les examens d’âge osseux dans le système français. Dans les observations finales concernant le rapport de la France valant sixième et septième rapports périodiques, du 4 décembre 2023, le Comité recommande à la France de «  mettre fin à l’utilisation des tests osseux comme méthode de détermination de l’âge des enfants au profit d’autres méthodes qui s’avèrent plus précises, notamment la reconnaissance et la reconstitution des documents d’état civil  ».



2. Conditions cumulatives préalables et subsidiarité de l’examen

L’article 388 du code civil pose deux conditions préalables à la décision ordonnant la réalisation d’examens d’âge osseux. Ces conditions sont cumulatives. Il s’agit de l’absence de documents d’identité valables et l’invraisemblance de l’âge allégué.

(1) Sur la condition tenant à l’absence de documents d’identité valables

La notion de « documents d’identité valables » n’est pas définie dans le code civil.

Selon le Conseil constitutionnel, cette notion fait référence aux documents « dont l’authenticité est établie au regard des règles prévues notamment par l’article 47 du code civil ».

En se référant à l’article 47 du code civil, le Conseil constitutionnel fait référence aux actes d’état civil puisque cet article est relatif aux actes d’état civils étrangers et pose une présomption simple d’authenticité de ces actes (Voir la rubrique sur l’état civil).

Cependant, le Conseil constitutionnel ne se limite pas aux actes d’état civil :

  • Il ne précise pas la notion de « documents » ;
  • Il fait référence aux règles de l’article 47 du code civil, parmi d’autres règles (utilisation de l’adverbe « notamment »)

Il en résulte donc que sont concernés aussi bien les documents d’état civil que les documents d’identité, tant que leur authenticité n’est pas remise en cause.

L’examen de la jurisprudence de la Cour de Cassation permet de corroborer cette interprétation. Cette jurisprudence permet également de confirmer le caractère subsidiaire de cet examen, c’est-à-dire qu’il ne peut être ordonné que si les deux conditions préalables ne sont pas cumulativement remplies.

Il convient enfin de préciser que l’article 388 se réfère à l’absence de documents d’identité valables. Cela signifie que la condition est remplie si les documents ne sont pas authentiques. Ainsi, s’il y a lieu d’effectuer une analyse documentaire, celle-ci devra être faite avant toute décision ordonnant les examens osseux.

Voir les décisions suivantes :

Cour de Cassation, Première chambre civile, 22 mai 2019, pourvoi n°18-22.738 : Les examens d’âge osseux ne peuvent renverser la présomption de régularité des documents.

Cour de Cassation, Première chambre civile, 22 novembre 2019, pourvoi n°19-17726 : L’intéressé présente un passeport qui a les apparences de l’authenticité. Ce document d’identité valable suffit à établir la minorité de l’intéressé. La Cour d’appel n’était pas tenue de s’expliquer sur les autres éléments produits par le département, parmi lesquels figuraient, selon un moyen du pourvoi, les résultats de textes osseux.

Cour de Cassation, Chambre criminelle, 5 janvier 2022, pourvoi n°21-80.516 : l’examen d’âge osseux n’a pas à être pris en considération lorsque la juridiction retient que les documents argués de faux sont authentiques et établissent la minorité.

(2) Sur la condition tenant à l’invraisemblance de l’âge allégué

Le code civil ne pose aucune définition de cette notion. Il est uniquement mentionné : "si l’âge allégué n’est pas vraisemblable". Le Conseil constitutionnel n’apporte aucune précision. En l’absence de définition de cette condition au moyen de critères objectifs, son appréciation ne pourra qu’être éminemment subjective.

L’on peut toutefois raisonnablement avancer que si l’évaluation sociale conclut de manière favorable au mineur alors cette condition n’est pas remplie.

Cour de Cassation, Première chambre civile, 15 octobre 2020, pourvoi n°20-14993, Publié au Bulletin : Au visa des articles 375 et 388 du code civil, la Cour considère «  que lorsque le juge, saisi d’une demande de protection d’un mineur au titre de l’assistance éducative, constate que les actes de l’état civil étrangers produits ne sont pas probants, au sens de l’article 47 du code civil, il ne peut rejeter cette demande sans examiner le caractère vraisemblable de l’âge allégué et, le cas échéant, ordonner un examen radiologique osseux. »

Voir également Cour de Cassation, Première chambre civile, 21 novembre 2019

Caractère subsidiaire de l’examen

Il résulte de ces éléments que l’examen d’âge osseux a un caractère subsidiaire.

C’est ce que prévoit l’article 388 du code civil, en indiquant qu’il ne peut être réalisé que si les deux conditions sont cumulativement réunies.

Le Conseil constitutionnel l’a réaffirmé :

«  9. En deuxième lieu, cet examen ne peut être ordonné que si la personne en cause n’a pas de documents d’identité valables et si l’âge qu’elle allègue n’est pas vraisemblable. Il appartient à l’autorité judiciaire de s’assurer du respect du caractère subsidiaire de cet examen. »



3. Autres conditions et garanties

  • L’examen ne peut être décidé que par une autorité judiciaire

L’article 388 du code civil prévoit que «  les examens radiologiques osseux (…) ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire (…) »

Le Conseil constitutionnel indique également que cela constitue une garantie.

Une décision d’un magistrat doit donc intervenir. Cette décision peut intervenir dans différents cadres, notamment lors de l’évaluation, dans le cadre d’une procédure d’assistance éducative, dans le cadre d’une procédure pénale.

L’autorité judiciaire s’entend ici comme étant un juge du siège ou le Procureur de la République.

A cet égard, on peut citer la décision de la Première chambre civile de la Cour de Cassation du 21 novembre 2019, pourvoi n°19-15.890 :

«  Attendu, en troisième lieu, que le procureur de la République est une autorité judiciaire compétente pour ordonner les examens radiologiques osseux prévus à l’article 388 du code civil ; que c’est sans méconnaître ce texte que la cour d’appel s’est fondée sur les conclusions d’un test osseux qui avait été ordonné par celui-ci ;  »

  • Le mineur doit consentir à cet examen

L’article 388 du code civil indique que l’intéressé doit donner son accord pour ces examens.

Le Conseil constitutionnel précise : « cet examen ne peut intervenir qu’après que le consentement éclairé de l’intéressé a été recueilli, dans une langue qu’il comprend. »

Dès lors qu’il s’agit d’obtenir l’accord de l’intéressé alors ce dernier doit être à même de consentir pleinement aux examens. Son consentement doit être éclairé. Cela signifie d’une part que toutes les explications doivent lui être données sur le but, le déroulé et les conséquences de cet examen ou de son refus de s’y soumettre. D’autre part, cette information et le recueil de l’accord doit avoir lieu dans une langue comprise de l’intéressé, le cas échéant par le truchement d’un interprète.

Le consentement pouvant être retiré à tout moment, si le mineur a consenti à cet examen devant le juge, le médecin le pratiquant devra s’assurer que le mineur y consent toujours. En toute hypothèse, le médecin devra s’assurer du consentement du mineur.

Sur la question du consentement, on peut se référer à la décision de la Première chambre civile de la Cour de cassation du 3 octobre 2018, pourvoi n°18-19442 :

«  Qu’elle a retenu, en deuxième lieu, que l’expertise était régulière dès lors que les conditions prévues à l’article 388 du code civil avaient été respectées, que C. X... disposait des conseils de son avocat, que l’expert précisait qu’elle parlait et comprenait parfaitement le français et qu’il avait donc été possible de lui expliquer la mission et de recueillir son consentement, dans le respect des règles de déontologie qui régissent l’exercice de sa profession, la loi n’imposant pas que le consentement prenne une forme écrite ;  »

Voir également, Cour de Cassation, Chambre criminelle, 11 décembre 2019, pourvoi n°18-84938

« 15. En deuxième lieu, la cour d’appel a retenu les résultats d’un examen osseux, en énonçant que M. X... avait d’abord refusé cet examen, qui avait été finalement pratiqué. L’arrêt ne précise pas quelle autorité judiciaire a ordonné cet examen, ne constate pas que M. X... a donné son accord à sa réalisation et ne répond pas au moyen dans lequel il soutient qu’il ne résulte pas de cet examen qu’il y ait consenti.  »

Voir également :
Cour d’appel de Bordeaux, 2 novembre 2022
Cour d’appel de Rennes, 4 janvier 2021
Cour administrative d’appel de Marseille, 8 mars 2024

  • Les résultats doivent préciser la marge d’erreur

L’article 388 du code civil prévoit que les conclusions des examens radiologiques osseux doivent préciser la marge d’erreur.

Dans sa décision du 21 mars 2019, aussitôt après avoir indiqué que l’intérêt supérieur de l’enfant est une exigence constitutionnelle et que les règles de détermination de l’âge d’un individu doivent être entourées de garanties, le Conseil constitutionnel précise que : « en l’état des connaissances scientifiques, il est établi que les résultats de ce type d’examen peuvent comporter une marge d’erreur » (paragraphe 7)

Ce constat fait l’unanimité. La fiabilité de ces examens est très controversée, d’autant plus en l’absence de protocole unique et en présence d’une grande diversité de pratiques.

La juridiction constitutionnelle considère que c’est parce que ces tests sont entourés de garanties que l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas méconnu, malgré l’absence de fiabilité des tests.

Voir ci-après les avis et recommandations des institutions nationales et internationales. Voir également la note d’observations d’InfoMIE.

Le Conseil constitutionnel, au paragraphe 11, rappelle ensuite que le législateur a imposé la mention de cette marge d’erreur dans les résultats de ces examens.

Il est obligatoire que les résultats des examens précisent la marge d’erreur, faute de quoi ils devront être écartés.

Voir par exemple :
Cour de Cassation, Chambre criminelle, 11 décembre 2019, pourvoi n°18-84.938 : «  En troisième lieu, l’arrêt n’indique pas la marge d’erreur de l’examen, et ne précise pas les éléments qui justifiaient d’écarter le doute existant sur l’âge du demandeur.  »
Cour administrative d’appel de Douai, 14 mars 2023

Il est très important de noter que la notion de « marge d’erreur » doit être utilisée avec beaucoup de précaution, et ne doit pas être confondue avec l’intervalle de confiance notamment. Pour plus de précisions sur cette notion d’intervalle de confiance, se reporter à la note d’observations.

  • Le refus de se soumettre à cet examen n’est pas un aveu de majorité

Au titre des garanties devant entourer les examens d’âge osseux, le Conseil constitutionnel a précisé : «  la majorité d’une personne ne saurait être déduite de son seul refus de se soumettre à un examen osseux. »

Ainsi, le refus de se soumettre à l’examen d’âge osseux ne doit pas être interprété comme un aveu de majorité.

Pour une application, voir par exemple Cour d’appel de Rouen, 14 novembre 2023 : « Le fait qu’il ait refusé un test osseux ne peut nullement être considéré comme un élément permettant de renverser la présomption qui s’attache aux documents produits, peu importe qu’il ait déclaré avoir passé un test osseux en Espagne dont il aurait déchiré les résultats. »

  • Le doute profite à la qualité de mineur

Cela est prévu par l’article 388 du code civil : « Les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur. Le doute profite à l’intéressé. »

Le Conseil constitutionnel précise : « D’autre part, il a exclu que ces conclusions puissent constituer l’unique fondement dans la détermination de l’âge de la personne. Il appartient donc à l’autorité judiciaire d’apprécier la minorité ou la majorité de celle-ci en prenant en compte les autres éléments ayant pu être recueillis, tels que l’évaluation sociale ou les entretiens réalisés par les services de la protection de l’enfance. Enfin, si les conclusions des examens radiologiques sont en contradiction avec les autres éléments d’appréciation susvisés et que le doute persiste au vu de l’ensemble des éléments recueillis, ce doute doit profiter à la qualité de mineur de l’intéressé.  »

Ce qu’il faut retenir est qu’en cas de doute, cela profite à l’intéressé. De plus, l’intégralité des éléments relatifs à la situation doivent être pris en compte pour déterminer la minorité ou la majorité de la personne. La majorité ne saurait être déduite des seules conclusions de l’examen d’âge osseux, en la présence d’autres éléments concluant à la minorité.

Voir par exemple : Cour de Cassation, Première chambre civile, 12 janvier 2022, pourvoi n° 20-17.343 : seuls les examens d’âge osseux concluent à la majorité de l’intéressé, alors que les documents d’état civil et l’évaluation concluent à la minorité. Le doute doit être favorable à l’intéressé.

  • Il ne doit avoir ni contre-indication médicale ni aucune intervention interne

Enfin, le Conseil constitutionnel indique qu’il ne doit y avoir ni contre-indication médicale (on pense notamment au cas d’une jeune fille enceinte), ni aucune intervention interne.



4. Conclusions de l’examen

En vertu de l’article 246 du code de procédure civile, le juge n’est pas tenu par les conclusions de l’examen d’âge osseux. Il s’agit, pour le juge, d’un des éléments du dossier. La Cour de Cassation l’a confirmé par une décision du 25 janvier 2001 : le juge est libre d’apprécier la validité d’une expertise osseuse et n’est pas lié par ses résultats.

L’examen d’âge osseux ne peut pas permettre de fixer l’état civil, ou à tout le moins, la date de naissance d’une personne. En effet, l’examen est prévu par l’article 388 du code civil comme élément qui peut être pris en compte parmi d’autres pour déterminer la minorité ou la majorité d’une personne. Il ne s’agit pas de fixer un âge. D’un point de vue scientifique, cet examen ne permet pas de fixer l’âge d’une personne. D’un point de vue juridique, un juge des enfants ne peut pas déduire des résultats de cet examen une échéance de placement, car cela revient à fixer la majorité à une date précise, ce que cet examen ne permet pas.

Voir par exemple :
Cour d’appel de Paris, 20 septembre 2019
Cour d’appel de Rouen, 17 mai 2022

Enfin, même s’il n’y a qu’une partie de la plage des résultats qui se situe dans la minorité, alors cela permet de conclure à la minorité de la personne, en application du principe selon lequel le doute profite à l’intéressé, énoncé à l’article 388 du code civil et rappelé par le Conseil constitutionnel.



5. Procédure

La décision ordonnant expertise peut fait l’objet d’un appel, selon la procédure prévue à l’article 272 du code de procédure civile.

Selon cette procédure, le jeune doit demander au premier président de la Cour d’appel d’être autorisé à interjeter immédiatement appel de la décision ordonnant l’expertise. Le premier président statue selon la procédure accélérée au fond.

Le.la jeune doit justifier d’un motif grave et légitime.

L’assignation doit être délivrée dans le mois suivant la décision ordonnant expertise.

Si le premier président fait droit à la demande, il fixe le jour où l’affaire sera examinée par la Cour. Attention, cela ne vaut pas acte d’appel, il conviendra d’interjeter appel de la décision ordonnant expertise.

Voir par exemple deux décisions de la Cour d’appel de Bordeaux



6. Modalités

Les modalités de l’examen d’âge osseux sont très peu encadrées par les textes.

L’article 388 du code civil prohibe « une évaluation de [l’]âge à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires.  »

Cela signifie non seulement et bien évidemment qu’un examen des organes génitaux est prohibé, mais également un examen de la pilosité.

Il n’existe pas de protocole unique pour les examens d’âge osseux. Cependant, différents médecins intervenant pour ces examens rappellent des bonnes pratiques.

Il s’agit de s’assurer que le jeune consent librement, et de manière éclairée à l’examen. Il convient donc d’expliquer en quoi consiste l’examen, et qu’un interprète soit présent le cas échéant. Même si le jeune a exprimé son consentement au juge ou à l’officier de police, il doit réitérer son consentement devant le médecin. En effet, l’intéressé peut avoir changé d’avis.

L’examen commence par une anamnèse et un examen clinique, afin de s’assurer de l’absence ou de l’existence de pathologie pouvant avoir un impact sur la croissance.

Ensuite, il peut être procédé à trois types d’examens :

  • Une radiographie de la main et du poignet gauche, pour comparaison du cliché avec l’Atlas de Greulich et Pyle ;
  • Une imagerie dentaire, pour comparaison avec l’échelle de Demirdjian
  • Un scanner ou IRM des clavicules, afin d’examiner leur stade de maturation.

Il n’existe pas de consensus ni sur le nombre, ni sur le type, ni sur l’ordre dans lequel ces examens doivent être effectués.

Pour les détails de chacun de ces examens, vous pouvez vous reporter à la note d’observations.



7. Avis des instances nationales et internationales

Haut Conseil de la santé publique, avis relatif à l’évaluation de la minorité d’un jeune étranger isolé, 23 janvier 2014

Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis sur la situation des mineurs isolés étrangers présents sur le territoire national. Etat des lieux un an après la circulaire du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des jeunes isolés étrangers (dispositif national de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation) (Assemblée plénière – 26 juin 2014)

Comité consultatif nationale d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, avis n°99 sur les méthodes de détermination de l’âge à des fins juridiques.

Rapport de l’Académie nationale de médecine sur la fiabilité des examens médicaux visant à déterminer l’âge à des fins judiciaires et la possibilité d’amélioration en la matière pour les mineurs étrangers isolés

Rapport du Défenseur des droits : Les mineurs non accompagnés au regard du droit, voir page 61 et suivantes

Comité des droits de l’enfant, Observations finales concernant le rapport de la France valant sixième et septième rapports périodiques,

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