La légalisation des actes d’état civil

Définition

La légalisation est ainsi définie :

« La légalisation est la formalité par laquelle est attestée la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, l’identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. »

Cette définition ressort de l’article 16 de la loi n°n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice, tel que modifié par l’article 48 de la loi n°2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027.

Cet article prévoit également :

« Sauf engagement international contraire, tout acte public établi par une autorité étrangère et destiné à être produit en France doit être légalisé pour y produire effet. »

Historique

Il nous paraît nécessaire de retracer quelques éléments de l’historique des exigences en matière de légalisation. En effet, l’état du droit a changé à de multiples reprises ces dernières années. Ceux et celles qui accompagnent les jeunes ont été confrontés à cette instabilité, de telle sorte qu’il est opportun d’apporter cet éclairage historique.

Au XVIIème siècle, l’ordonnance sur la marine royale du 3 août 1681 prévoyait que les « actes expédiés dans les pays étrangers où il y aura des consuls ne feront foi s’ils ne sont pas par eux légalisés ».

Dans un premier temps, seuls les consuls français pouvaient légaliser les actes puis la pratique a évolué vers davantage de souplesse. Il a ensuite été considéré que la légalisation pouvait être faite indifféremment par les autorités consulaires étrangères en France et les autorités consulaires françaises à l’étranger.

L’ordonnance sur la marine royale a été abrogée en 2006.

En 2009, la première chambre civile de la Cour de Cassation indiquait : "malgré l’abrogation de l’ordonnance de la marine d’août 1681, la formalité de la légalisation des actes de l’état civil établis par une autorité étrangère et destinés à être produits en France demeure, selon la coutume internationale et sauf convention contraire, obligatoire" (Cass, Civ. 1, 4 juin 2009, n°08-13.541)

S’agissant des conventions internationales, il convient de préciser qu’elles sont nombreuses à prévoir des dispenses de légalisation (Voir ci-dessous).

La Cour de cassation avait également précisé que la légalisation peut être effectuée soit en France par le consul du pays d’établissement de l’acte, soit par le consul de France dans le pays d’établissement de l’acte (Voir en ce sens Civ. 1, 13 édcembre 2017, n°16-50.055).

La loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a réglementé la légalisation, par son article 16. Cet article prévoyait l’intervention d’un décret pour fixer les modalités de la légalisation. Ce décret est intervenu le 10 novembre 2020. Il a modifié l’économie même de la légalisation puisqu’il a prévu qu’en principe, un acte public étranger ne peut produire d’effet en France que s’il est légalisé préalablement par les autorités françaises à l’étranger, même dans le cas où il a été légalisé par l’autorité étrangère compétente.

Un recours pour excès de pouvoir a été déposé contre ce décret. Dans le cadre de ce recours, une question prioritaire de constitutionnalité a été déposée.

Par une décision du 18 février 2022, le Conseil constitutionnel a déclaré une partie de l’article 16 de la loi du 23 mars 2019 contraire à la Constitution et a reporté les effets de sa décision au 31 décembre 2022.

Par une décision du 7 avril 2022, le Conseil d’Etat a annulé le décret du 10 novembre 2020, en reportant les effets de l’annulation au 31 décembre 2022.

L’article 16 de la loi du 23 mars 2019 a été modifié par la loi du 20 novembre 2023 et un décret du 7 février 2024 relatif à la légalisation est intervenu. Ils fixent notamment le cadre juridique actuel.

Cadre conventionnel, légal et règlementaire actuel

Le II de l’article 16 de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice, tel que modifié par l’article 48 de la loi n°2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, prévoit :

« II. - Sauf engagement international contraire, tout acte public établi par une autorité étrangère et destiné à être produit en France doit être légalisé pour y produire effet.

La légalisation est la formalité par laquelle est attestée la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, l’identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu.
Les recours contentieux relatifs aux refus de légalisation opposés par une autorité française sont portés devant la juridiction administrative.

Un décret en Conseil d’Etat, pris après consultation de l’Assemblée des Français de l’étranger ou, dans l’intervalle des sessions, de son bureau, précise les actes publics concernés par le présent II et définit les modalités de la légalisation. »

Il résulte de ce texte une obligation de légalisation des actes publics étrangers destinés à être produits en France. Cette obligation vaut sauf engagement international contraire.

Il existe en effet de nombreuses conventions internationales qui dispensent les Etats de l’exigence de légalisation ou qui la simplifient.

La Convention supprimant l’exigence de légalisation des actes publics étrangers a été conclue à La Haye le 5 octobre 1961. Elle prévoit l’application de la formalité de l’apostille pour la production d’actes publics entre ces Etats membres. (Voir l’article relatif à l’apostille)

Il existe également des conventions bilatérales dispensant de l’exigence de légalisation.

L’état du droit conventionnel figure dans un tableau, édité par le Ministère des affaires étrangères et régulièrement mis à jour. Le dernier tableau peut être consulté ici. La consultation de ce tableau permet de déterminer, par pays et par type d’acte, s’il existe une exigence de légalisation, d’apostille, ou une dispense de toute formalité.

L’annexe 3 de ce tableau liste les conventions bilatérales portant dispense de légalisation.

S’agissant du cadre règlementaire, il est fixé par le décret n°2024-87 du 7 février 2024 relatif à la légalisation des actes publics établis par une autorité étrangère.

L’article 1er de ce décret dispose :

« Sauf engagement international contraire, tout acte public établi par une autorité étrangère et destiné à être produit en France ou devant un ambassadeur ou chef de poste consulaire français doit être légalisé pour y produire effet.
La légalisation est la formalité par laquelle sont attestées la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, l’identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. Elle donne lieu à l’apposition d’un cachet dont les caractéristiques sont définies par arrêté conjoint des ministres chargés de la justice et des affaires étrangères.
Le silence gardé pendant quatre mois par l’administration sur une demande de légalisation d’un acte public établi par une autorité étrangère vaut décision de rejet.
Les recours contentieux relatifs aux refus de légalisation opposés par une autorité française sont portés devant la juridiction administrative, dans les conditions prévues par le code de justice administrative.
 »

L’article 2 du décret liste les actes qui sont considérés comme des actes publics.

L’article 3 indique les autorités compétentes pour procéder à la légalisation.

L’article 4 prévoit des dérogations.

L’arrêté du 13 février 2024 pris pour l’application de l’article 1er du décret n° 2024-87 du 7 février 2024 relatif à la légalisation des actes publics établis par une autorité étrangère définit les caractéristiques du cachet apposé dans le cadre de la légalisation par les autorités françaises.

L’instruction générale relative à l’état civil prévoit, en son point 587, que la légalisation ne doit être donnée qu’aux pièces demandées par une autorité publique qui se fonde elle-même sur une règle de droit interne ou une convention internationale.

Modalités

Les actes publics sont concernés par l’obligation de légalisation. Parmi les actes publics figurent notamment les décisions de justice, les actes établis par les greffes, les actes de l’état civil.

L’ambassadeur ou le chef de poste consulaire français est l’autorité compétente pour procéder à la légalisation.

La légalisation est faite par l’apposition d’un cachet. Il s’agit d’un cachet carré, de 7 cm de côté, rouge, mentionnant notamment la phrase suivante « La légalisation n’est qu’une vérification de la véracité de la signature, de la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, de l’identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu » et portant l’en-tête « République française ».

L’agent qui appose ce cachet le remplit avec un certain nombre d’informations.

L’acte doit être préalablement légalisé par l’autorité compétente de l’Etat d’émission de l’acte, sauf dans les cas dans lesquels l’ambassadeur ou le chef de poste consulaire français dispose d’un spécimen des signature, sceau ou timbre original.

Pour être légalisé, l’acte rédigé en langue étrangère doit être accompagné d’une traduction effectuée par un traducteur habilité.

Il existe des Etats dans lesquels les services consulaires français ne procèdent pas à la légalisation des actes publics, soit compte tenu des conditions d’émission des actes (c’est le cas de la Guinée, des Comores et de l’Angola), soit compte tenu d’une impossibilité matérielle (Afghanistan, Libye, Somalie, Soudan, Syrie, Yémen). Cette liste d’Etat figure à l’annexe 8 du tableau sur l’état du droit conventionnel en matière de légalisation.

Le 1° de l’article 4 du décret du 7 février 2024 prévoit que dans les cas de dérogation, il convient de faire légaliser l’acte par l’ambassadeur ou le chef de poste consulaire de l’Etat concerné en France. Si le décret ne distingue pas entre les pays pour lesquels la légalisation est impossible compte tenu des conditions d’émission des actes, et les pays pour lesquels cela résulte d’une impossibilité matérielle, il y a lieu bien entendu de faire une distinction. En effet, dans le second cas, il se peut qu’il n’y ait pas de représentation consulaire du pays en France ou il est également possible que le jeune envisage le dépôt d’une demande d’asile, ce qui conduirait généralement à ne pas faire de démarche envers les autorités du pays.

Effet de la légalisation

La légalisation accroît la force probante de l’acte

Il est rappelé que la légalisation est la formalité qui permet d’attester de la véracité de la signature, de la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, de l’identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. Ainsi, elle atteste de la régularité formelle de l’acte. Ce faisant, elle accroît la force probante de l’acte.

L’instruction générale relative à l’état civil du 11 mai 1999 précise les effets de la légalisation :

« La légalisation facilite donc dans les relations internationales la preuve de l’authenticité d’un acte ou d’un document établis conformément aux règles de droit interne et favorise leur production et leur admission à l’étranger.  » (point 587)
« La légalisation consulaire est l’attestation donnée par un consulat de la véracité des signatures apposées sur un acte public étranger et de la qualité de ceux qui l’ont dressé ou expédié, afin qu’on puisse y ajouter foi partout où l’acte est produit. » (point 595-2)

L’application de la présomption d’authenticité de l’article 47 du code civil n’est pas conditionnée par la légalisation de l’acte.

L’article 47 ne conditionne pas l’application de la présomption d’authenticité à la légalisation de l’acte. Il ne devrait donc pas être nécessaire que l’acte soit légalisé pour être considéré comme authentique. En tout état de cause, il existe de nombreuses dispenses de légalisation et cela n’empêche pas le bénéfice de la présomption d’authenticité.

Sur la présomption prévue à l’article 47, voir l’article dédié.

Un acte d’état civil doit-il être pris en compte s’il n’est pas légalisé ?

Sont détaillés ici les trois situations les plus communes dans lesquelles cette question se pose pour les mineurs isolés étrangers et jeunes majeurs.

  • Evaluation de minorité et d’isolement

Ainsi, par exemple, lors de l’évaluation de minorité et d’isolement, la Cour de Cassation a considéré que les actes non légalisés devaient être pris en compte au titre du faisceau d’indices. (Décision du 3 avril 2019).

  • Demandes de titre de séjour

S’agissant des demandes de titre de séjour, le Conseil d’Etat a rendu un avis le 21 juin 2022 aux termes duquel il rappelle que la légalisation atteste uniquement de la régularité formelle d’un acte et qu’elle ne fait pas obstacle à la démonstration de son potentiel caractère irrégulier, falsifié ou inexact. Le Conseil d’Etat considère que l’absence ou l’irrégularité de la légalisation d’un acte d’état civil étranger soumis à l’obligation de légalisation ne fait pas obstacle à ce que les éléments qu’il contient puissent être pris en compte, si cet acte présente des garanties d’authenticité.

  • Déclarations de nationalité prévues à l’article 21-12 code civil

Pour cette procédure, sauf engagement international contraire, l’acte d’état civil produit doit être légalisé. Voir par exemple Cass. Civ. 1, Arrêt n° 15-50.018 du 13 avril 2016.

L’enregistrement d’une déclaration de nationalité a un effet sur l’état civil de la personne, qui en sera modifié. Dès lors, l’exigence de légalisation est cohérente avec l’effet de la décision relative à la nationalité.

Certains considèrent que la lettre de l’article 16 de la loi du 23 mars 2019 ("tout acte public établi par une autorité étrangère et destiné à être produit en France doit être légalisé pour y produire effet") conduit à distinguer les situations dans lesquelles l’acte est produit comme moyen de preuve (ad probationem) de celles dans lesquelles il est produit afin de déclencher un effet de droit (ad validitatem). C’est dans ces seules dernières situations que l’acte devra être légalisé puisque c’est dans ces cas que la production de l’acte engendre un effet de droit.

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