InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Documentation > Rapports et études > Rapports institutionnels internationaux > Application judiciaire de l’article 3 de la Convention relative aux droits (...)

Application judiciaire de l’article 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant en Europe - Le cas des enfants migrants, y compris les enfants migrants non accompagnés - Etude UNICEF/HCNUDH (Bureau Régional Europe)

Juin 2012

Publié le jeudi 14 mars 2013 , mis à jour le mercredi 20 août 2014

Note de synthèse :

La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE) et ses Protocoles facultatifs fournissent une base permettant d’établir des mécanismes efficaces pour relever les défis très variés auxquels sont confrontés les États et les autres acteurs, y compris les organisations régionales, dans leur mission visant à garantir aux enfants l’accès à leurs droits et leur exercice. Selon l’article 3 de la CDE, « dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ». Ce principe prend une importance toute particulière dans le cas des enfants migrants, y compris les enfants migrants non accompagnés, en situation régulière ou irrégulière, dont traite la présente étude.

Tous les pays européens ont signé et ratifié la CDE, mais tous ne l’ont pas transposée dans leur droit national. Qu’elle ait été transposée ou non, la CDE est un instrument juridiquement contraignant du droit international qui doit guider le droit national et son interprétation. Il existe en Europe une grande diversité de cadres politiques et juridiques régionaux et nationaux qui visent à assurer le respect de la CDE. Dans le même temps, il est peu fréquent que les politiques et législations nationales en matière de migration adoptent une perspective centrée sur les droits des enfants ou considèrent les vulnérabilités particulières des enfants, et la plupart des politiques publiques de l’enfance ne tiennent pas compte des droits spécifiques des enfants dans le contexte de la migration. Les cadres juridiques et politiques présentent donc des lacunes manifestes, dont pâtissent de nombreux enfants migrants, surtout ceux en situation irrégulière. Ce sont ces lacunes et leurs effets sur certains enfants parmi les plus vulnérables d’Europe qui ont incité le HCNUDH et l’UNICEF à organiser un colloque judiciaire et à commander la présente étude. La jurisprudence des tribunaux régionaux et nationaux, qui forme une source de bonnes pratiques et favorise l’émergence d’orientations sur le principe de l’intérêt supérieur, mérite une attention soutenue. Étant donné la multiplicité des niveaux des obligations relatives aux enfants migrants découlant des obligations internationales au titre de la CDE, des obligations régionales découlant de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), du droit de l’UE ainsi que du droit national, la jurisprudence en la matière est répartie entre les tribunaux nationaux, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et la Cour européenne des droits de l’homme (CouEDH). La CJUE et la CouEDH sont des tribunaux supranationaux dont la jurisprudence est acceptée par les pays d’Europe comme faisant pour le moins autorité pour ce qui concerne les interprétations des normes régionales et internationales. Les tribunaux nationaux sont manifestement influencés par les arrêts de ces tribunaux régionaux, auxquels ils ont souvent fait référence pour adopter leurs décisions relatives au principe de l’intérêt supérieur et aux enfants migrants.

Ce qu’il importe de vérifier, c’est comment les tribunaux nationaux et régionaux appliquent le principe de l’intérêt supérieur aux situations concrètes qui impliquent des enfants migrants, en particulier des enfants en situation d’immigration irrégulière et des enfants non accompagnés ou séparés de leurs parents. Cette vérification nécessaire soulève deux ensembles de questions interdépendantes. D’une part, les tribunaux appliquent-ils effectivement le principe de l’intérêt supérieur lorsqu’ils statuent sur les affaires impliquant des enfants migrants ? L’article 3 de la CDE est-il directement invoqué par les tribunaux pour justifier leurs arrêts ? Dans l’affirmative, est-il invoqué seul ou en conjonction avec d’autres dispositions juridiques internationales ou nationales ? Quel est le poids accordé à la détermination de l’intérêt supérieur dans la prise des décisions finales ? D’autre part, lorsque les tribunaux appliquent le principe de l’intérêt supérieur, comment s’y prennent-ils pour en déterminer le contenu ? Quels facteurs les tribunaux prennent-ils en considération au moment de décider de ce qui est l’intérêt supérieur d’un enfant migrant ? Quand un tribunal décide, par exemple, de confirmer une décision administrative qui consiste à renvoyer un enfant non accompagné dans son pays d’origine, comment s’assure-t-il que cette décision sert l’intérêt supérieur de l’enfant ? Quelle importance les tribunaux attachent-ils aux dispositions plus substantielles de la CDE en déterminant l’intérêt supérieur de l’enfant ? Le principe de l’intérêt supérieur n’est-il qu’une simple garantie procédurale ou sert-il aussi de norme substantielle ? Les décisions des tribunaux sont-elles d’une quelconque façon influencées par les observations et rapports émis par le Comité des droits de l’enfant et les autres organes de traités au sujet du principe de l’intérêt supérieur ?

Afin de répondre à ces questions, le Bureau régional Europe du HCNUDH a organisé un colloque judiciaire sur l’application de l’article 3 de la CDE dans les procédures qui impliquent des enfants migrants, en particulier des enfants ayant un statut d’immigration irrégulière et des enfants non accompagnés ou séparés de leurs parents. Organisé en coopération avec l’UNICEF et avec le soutien du HCR, de Save the Children, de l’ECRE et de la Cour suprême de Catalogne, ce colloque s’est déroulé à Barcelone le 8 juillet 2011 et a rassemblé des juges de tribunaux nationaux et régionaux d’Europe. Les débats du colloque ont été étayés par un document de référence dans lequel des affaires judiciaires nationales (de différents juridictions et niveaux d’appel dans différents pays) illustraient les aspects essentiels traités par les tribunaux pour prendre des décisions relatives aux enfants migrants et à la protection de leur intérêt supérieur : a) procédures d’évaluation de l’âge, b) décisions concernant des solutions durables pour les enfants, c) accès aux services sociaux de base et exercice des droits y afférents, et d) garanties procédurales à mettre en place pour assurer le respect des droits des enfants, notamment le droit des enfants à participer aux procédures judiciaires, dans la mesure où des décisions importantes pour leur avenir sont prises dans ces circonstances.

Cette étude se fonde sur le document de référence de ce colloque judiciaire et sur les débats menés pendant celui-ci. Elle analyse une série de décisions judiciaires prises par la CJEU et la CouEDH et par certains tribunaux nationaux d’Europe qui ont appliqué le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans des affaires impliquant des enfants migrants en situation irrégulière, y compris des enfants non accompagnés et des enfants séparés de leurs parents. Ces affaires ont été sélectionnées pour illustrer le type de questions portées devant les tribunaux nationaux et la façon dont ceux-ci interprètent l’obligation qui leur est faite, au titre de l’article 3 de la CDE, de traiter l’intérêt supérieur de l’enfant comme une considération primordiale. Enfin, cette étude met en évidence plusieurs affaires qui se réfèrent explicitement à l’intérêt supérieur de l’enfant et peuvent servir de bonnes pratiques pour orienter la jurisprudence future partout en Europe.

Etude disponible en PDF en français et en anglais :

Etude version française
Etude version anglaise

Sur le colloque judiciaire organisé par le Bureau régional Europe du HCNUDH sur l’application de l’article 3 de la CDE dans les procédures qui impliquent des enfants migrants, en particulier des enfants ayant un statut d’immigration irrégulière et des enfants non accompagnés ou séparés de leurs parents, en coopération avec l’UNICEF et avec le soutien du HCR, de Save the Children, de l’ECRE et de la Cour suprême de Catalogne, voir au lien suivant : http://www.europe.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/Judicial_Colloquium.aspx