La procédure de détermination à défaut d’état civil : la détermination médico-légale de l’âge

ATTENTION. Cet article n’est pas à jour. Sur la question des examens d’âge osseux, vous pouvez utilement vous référer à la note publiée ici

  • La détermination médico-légale de l’âge est utilisée par les magistrats au titre de l’article 232 du Code de Procédure Civile (aide à la décision) lorsqu’il y a un doute sur la minorité du jeune - la minorité étant un des critères déclenchant la protection au titre de l’enfance en danger.
  • Cette expertise peut également être menée en vue de déterminer :
  • si le jeune doit être scolarisé de manière obligatoire (mineur de moins de 16 ans)
  • le temps restant pour préparer sa régularisation administrative en France
  • etc...

AUTORITÉS COMPÉTENTES POUR ORDONNER UNE EXPERTISE MÉDICO-LÉGALE

  • Une expertise médico-légale ne peut être ordonnée que par une autorité judiciaire (juge des enfants ou procureur de la République). En aucun cas l’Administration ne peut exiger elle-même la réalisation d’une telle expertise.

Cela a été entériné par la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant qui rappelle en effet que : «  Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire. »
Cette disposition légale a modifié le second alinéa de l’article 388 du Code civil qui prévoit désormais que : « Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé. »

Le décret du 24 juin 2016 relatif à l’accueil et aux conditions d’évaluation de la situation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille rappelle la compétence de l’autorité judiciaire en matière d’expertise médico-légale. En effet, le décret précise que : « Cette évaluation s’appuie essentiellement sur l’autorité judiciaire, s’il y a lieu, dans le cadre du second alinéa l’article 388 du Code Civil. »

  • Ce sont le plus souvent les parquets qui requièrent cette expertise, à la demande de la police aux frontières ou de l’Aide Sociale à l’Enfance. De telles expertises peuvent toutefois également être ordonnées par le juge des enfants.

CONSENTEMENT À L’ACTE

  • En vertu de l’art. 371-1 du Code Civil, les actes médicaux pratiqués à l’occasion de l’expertise visant à déterminer l’âge du jeune doivent être autorisés par les titulaires de l’autorité parentale / représentant légal.

Toutefois, le critère de l’isolement d’un mineur étranger se caractérise par l’absence de ses représentants légaux sur le territoire français.
En conséquence, les titulaires de l’autorité parentale d’un mineur isolé étranger ne peuvent consentir aux actes médicaux pratiqués à l’occasion de l’expertise médico-légale en vue de déterminer l’âge du mineur isolé étranger.

Si le consentement des représentants légaux d’un mineur isolé étranger ne peut être recueilli, le jeune lui-même doit consentir à de tels actes médicaux.

La circulaire interministérielle en date du 25 janvier 2016 prévoit que dans le cadre de l’évaluation de la situation du jeune, un protocole médical en vue de déterminer son âge peut être mis en place. Dans cette perspective, la circulaire préconise que : « Le jeune doit être consentant à l’examen et informé de ses modalités et de ses conséquences en termes de prise en charge, dans une langue dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend. »

La loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfance a modifié l’article 388 du Code Civil qui rappelle la condition du recueil du consentement du mineur afin de procéder à des examens radiologiques osseux. L’article 388 du Code civil prévoit désormais que : « Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé. »

  • En vertu de l’article L.1111-4 du code de santé publique, le consentement du mineur doit systématiquement être recherché s’il est apte à exprimer sa volonté.
  • Art. L.1111-4 al 3 CSP : « Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment »
  • Art. L. 1111-4 al 6 CSP : « Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision »
  • Art. L.1111-2 CSP : « Les mineurs ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée à leur degré de maturité »
  • Si le jeune ne consent pas à ce que soient pratiqués des actes médicaux dans le cadre d’une expertise visant à déterminer son âge :
Informations tirées du Guide AutonoMIE paru en septembre 2013 - page 24 - disponible ici :


L’expertise d’âge n’est jamais obligatoire : le/la jeune peut refuser de s’y soumettre. Elle constitue toutefois dans de nombreux départements l’indice le plus fréquemment utilisé pour déterminer la compétence de l’Aide Sociale à l’Enfance lorsqu’un•e mineur•e est dépourvu•e de tout document d’identité ou d’état civil, ce qui rend très périlleux le fait de refuser de s’y plier (cela peut alors donner lieu à des soupçons, et le tribunal ou le parquet pourra estimer que le/la jeune est majeur•e.)

Effectivement, dans certaines affaires, le fait que le jeune ne donne pas son consentement et refuse l’expertise médicale a pu conduire certains magistrats à déduire de cela la majorité du jeune.

Voir en ce sens Décision de la Cour d’appel de Paris du 18 octobre 2013 N°F13/0086 : dans cette décision la Cour d’appel de Paris considère que le jeune qui refuse de se soumettre à une expertise osseuse se place dans l’incapacité de prouver sa minorité.
Toutefois, certains juges n’utilisent pas le refus de consentement aux tests osseux à l’encontre du jeune.

Voir en ce sens : Décision de la Cour d’appel de Versailles du 21 février 2014 N°13/00241  : dans cet arrêt, la Cour d’appel de Versailles estime que le refus de se soumettre à une expertise osseuse n’est pas un élément de nature à démontrer la majorité du jeune.

En revanche, lorsqu’un mineur est en possession d’un document authentique attestant de sa minorité, les éléments extérieurs, tels que l’apparence physique ou le refus de se soumettre à une expertise osseuse, ne sauraient démontrer qu’il est majeur.

Voir jurisprudence en ce sens : CA Versailles, 21 février 2014, n°13/00241


LA NOTION DE DOUTE DANS L’UTILISATION DE L’EXPERTISE MÉDICALE

  • La circulaire du garde des Sceaux du 31 mai 2013, dont les termes sont repris et précisés par la circulaire interministérielle du 25 janvier 2016, indique que l’évaluation de la minorité doit s’appuyer sur la « combinaison d’un faisceau d’indices », tout d’abord sur les entretiens conduits avec l’intéressé puis sur la vérification de l’authenticité des documents d’état civil, soulignant que l’expertise médicale de l’âge ne peut intervenir qu’en cas de doute persistant et en dernier recours : « si le doute persiste au terme de cette étape et seulement dans ce cas, il peut être procédé à une expertise médicale de l’âge sur les réquisitions du parquet. » La loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant rappelle qu’en cas de doute sur l’âge de l’intéressé : « Le doute profite à l’intéressé. »], dont les termes sont repris et précisés par la circulaire interministérielle du 25 janvier 2016, indique que l’évaluation de la minorité doit s’appuyer sur la « combinaison d’un faisceau d’indices », tout d’abord sur les entretiens conduits avec l’intéressé puis sur la vérification de l’authenticité des documents d’état civil, soulignant que l’expertise médicale de l’âge ne peut intervenir qu’en cas de doute persistant et en dernier recours : « si le doute persiste au terme de cette étape et seulement dans ce cas, il peut être procédé à une expertise médicale de l’âge sur les réquisitions du parquet. »

VALEUR DE L’EXPERTISE D’ÂGE OSSEUX

  • De manière générale, en vertu de l’article 246 CPC, le juge n’est pas tenu par les constats ou conclusions d’un expert (« Le juge n’est pas lié par les constatations ou les conclusions du technicien »)
    DONC : Le juge peut ne pas retenir les conclusions d’une expertise médicale.

Voir jurisprudence en ce sens : Cour de Cassation, 25 janvier 2001 : le juge est libre d’apprécier la validité de cette expertise osseuse et n’est donc pas lié par ses résultats.

  • Il est établi qu’une expertise médicale ne peut pas, à elle seule, permettre de contredire valablement un acte d’état civil établi par une autorité étrangère (Cf. l’article Les documents d’état civil dans la Rubrique détermination de la minorité)

La loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfance a modifié l’article 388 du Code civil concernant la valeur juridique des examens radiologiques osseux. L’article 388 du Code civil dispose désormais que : « les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur. »

1) La position des juges

La Cour d’appel d’Amiens, dans une décision du 28 janvier 2016, N°1505366, précise que : « l’expertise portant sur l’estimation de l’âge ne peut être mise sur le même plan que la vérification de l’authenticité d’acte d’état civil étranger, ne permet de retenir qu’une estimation approximative au motif que l’expertise par examen osseux est très contestée quant à sa fiabilité et reprend différents avis (l’Académie Nationale de Médecine, DDD, HCSP...). »

La Cour d’appel d’Amiens a réitéré son positionnement quant à la procédure de vérification des actes civils étrangers dans une décision en date du 25 février 2016, N°15030331 en rappelant que : « la fiabilité de l’expertise osseuse n’est pas absolue. »

La Cour d’appel d’Amiens, dans une décision du 12 juillet 2016, N°1601743, estime également : « que seuls examens osseux ne peuvent permettre de déterminer l’âge de l’intéressé et qu’en tout état de cause, le doute profite à l’intéressé. »

La Cour d’appel de Dijon s’est positionnée dans le cas où deux expertises osseuses auraient été réalisées. Dans une décision en date du 12 décembre 2014, N°1505527, la Cour prévoit : « qu’il convient de déterminer l’âge de l’appelant en retenant celle des deux expertises qui lui est le plus favorable. »

Voir des jurisprudences en ce sens :

  • CA Versailles, 7 mars 2014, n° 13/00326 : « En l’état aucun élément intrinsèque à ce document ne permet de douter de sa validité ; l’expertise médicale réalisée ne présente pas d’élément suffisant de certitude pour se substituer aux documents d’état civil produits alors même que ceux-ci n’ont fait l’objet d’aucune vérification. [...] La Cour retiendra donc que [...] est mineur. »
  • CAA Bordeaux n° 13BX00428 en date du 11 juillet 2013 : « La seule circonstance que l’examen osseux pratiqué sur M.A..., qui n’a pas été complété par un examen morphologique et une radiographie dentaire, ait fait apparaître un écart entre son âge tel qu’il a été évalué suivant cette méthode et celui résultant de l’acte de naissance, ne suffit pas, par elle-même, à écarter comme dépourvu de valeur probante cet acte, dès lors que, ainsi que le souligne le Défenseur des droits, la détermination de l’âge par examen osseux comporte une importante marge d’erreur »
  • CA Paris 20 mai 2011 n°11/02354 : « Aucune preuve de l’irrégularité de ces actes n’est rapportée et leur validité ne peut dès lors être remise en cause par une expertise osseuse, dont la fiabilité n’est au demeurant pas absolue »
  • CA Metz, 26 septembre 2005 n°05/00115 : « Que cette possibilité de contredire la présomption d’authenticité qui s’attache aux actes de l’état civil s’opère à travers la mise en œuvre d’une procédure de vérification […] ; Que la mise en œuvre d’une expertise portant sur l’estimation d’âge sollicitée par le Juge des Enfants ne peut être mise sur le même plan que cette procédure puisqu’elle ne permet d’obtenir qu’une estimation scientifique de l’âge osseux ou physiologique forcément approximative en raison du caractère imparfait et peu fiable des techniques de détermination d’âge ; Attendu en conséquence qu’il n’y a pas lieu, sur la seule prise en considération de l’estimation d’âge, compte tenu de sa marge d’erreur et de l’absence d’un autre élément de nature à la conforter, de remettre en cause la foi qui s’attache à l’acte d’état civil considéré dès lors qu’il a été rédigé dans les formes usitées dans le pays d’origine.
    […] Qu’en l’absence d’un quelconque élément permettant de douter des énonciations de l’acte, ni de sa conformité aux formes usitées au CONGO, ceux-ci font foi de l’âge de l’intéressé. »
  • CA Lyon, 26 avril 2004, n°0400060 : « La fiabilité de la méthode de Greulich et Pyle pour déterminer l’âge est extrêmement douteuse, notamment pour les populations d’origine africaine »
  • Juge des tutelles de Limoges, 3 octobre 2003, n°2003/121 : « Que les critères retenus par les expertises osseuses établies, au début du 20e siècle à partir des caractéristiques morphologiques d’une population nord-américaine aux fins de traitement médical sont peu fiables et comportent une marge d’erreur de 18 mois ; Qu’une telle expertise ne peut venir par suite contredire un acte de naissance en apparence régulier  »
  • CA Paris, 27 juin 2003 : « Nonobstant l’examen osseux pratiqué le 29 juin 2003, [M. X.] produit devant la cour un passeport en cours de validité venant étayer ses déclarations et les autres documents antérieurement produits selon lesquels il est né le … ; qu’il est ainsi établi, à ce jour, qu’il est âgé de moins de 18 ans »
  • CA de Lyon 18 novembre 2002, n° 02/252 : « Aucun élément ne permettant de douter des énonciations de ces actes, ni de leur conformité aux formes usitées en Angola, ils font foi de plein droit de l’âge de l’intéressé […] »
  • CA Paris, 13 novembre 2001, n° 441 : « Qu’une expertise des urgences médico-judiciaires de l’Hôpital Jean Verdier du 3 janvier 2001 concluant qu’il avait l’âge osseux égal ou supérieur à 18 ans n’est pas suffisante pour contredire valablement cet acte de naissance d’autant qu’un certificat médical atteste qu’à cette période son âge apparent pouvait se situer entre 15 et 16 ans ;  »
  • TGI Créteil, 12 juillet 2000, n°2120/2000/6e : « L’examen auquel il avait été procédé sur la personne de M.B. ne saurait remettre en cause les mentions des actes de l’état civil, dont il y a lieu de considérer qu’ils ont été régulièrement dressés par les autorités Nigérianes »

La Cour d’Appel de Douai a construit une jurisprudence solide et constante qui depuis longtemps condamne l’utilisation des tests osseux à des fins de détermination de l’âge.
En effet, la Cour d’Appel de Douai refuse de se baser sur des tests osseux pour déterminer l’âge d’un intéressé.

Dans une décision du 17 juillet 2013 N°13/004X9, la Cour d’appel de Douai considère que les tests osseux ne suffisent pas à conclure à la majorité du jeune. La Cour se base notamment sur le rapport de l’académie de médecine du 16 janvier 2007 qui révèle un risque d’erreur de deux années pour les individus âgés entre 16 et 18 ans.

De plus, dans une décision 4 mars 2014 N°13/06077, la Cour rappelle que la détermination de l’âge d’une personne est établie en tenant compte des actes d’état civil. Elle reconnaît ainsi que l’extrait d’acte de naissance produit à l’audience suffit à attester de la date de naissance de l’intéressé sur le fondement de l’article 47 du Code civil relatif à la présomption des actes d’état civil établis à l’étranger.

La Cour d’appel de Douai, dans un arrêt en date du 11 mars 2016, N°1600345, précise que : «  Il est à signaler que l’âge osseux, apprécié sur des caractères anatomiques radiologiques, ne coïncide pas toujours avec un âge civil lorsqu’il existe notamment des problèmes de retard ou d’avance exagérés des processus de maturation osseuse.  » La Cour estime, en se basant sur l’article 47 du Code civil, que cet examen n’exclut pas formellement la minorité conclut que les documents produits par la jeune font foi et sa minorité doit être retenue.

Enfin, la Cour d’appel de Douai, dans un arrêt en date du 30 juin 2016, N°1601940 précise que «  la détermination de l’âge d’une personne est établie en tenant compte des actes d’état civil.  »

2) La position des institutions

Le Défenseur s’est également prononcé sur la question de la valeur des expertises osseuses ayant pour but la détermination de l’âge.
Dans sa décision en date du 26 février 2016 relative à l’égal accès au droit et à la justice des mineurs isolés étrangers, le Défenseur des droits condamne pour la première fois l’utilisation des tests osseux. En effet, il mentionne être : «  résolument opposé à l’utilisation de ces examens médicaux, qui, tels qu’ils sont actuellement pratiqués, sont inadaptés, inefficaces et indignes. »


FIABILITÉ DES EXPERTISES D’ÂGE OSSEUX

  • Les expertises médicales sont des outils approximatifs qui se fondent sur des tables de référence anciennes et non adaptées en ce qu’elles ne prennent pas en compte l’histoire ethnique et culturelle du mineur. La méthode de l’expertise osseuse aux fins de détermination de l’âge des mineurs isolés étrangers est très contestée, voire pour certains considérée comme inutilisable à cette fin (ils considèrent que c’est un détournement de la méthode)
  • Une marge d’erreur conséquente de plus ou moins 18 mois est admise. Le caractère approximatif de ces examens d’âge osseux impose qu’une tranche d’âge soit établie et non un âge précis (Voir à ce sujet : Avis du Haut Conseil de la Santé Publique en date du 23 janvier 2014 : « La détermination d’un âge osseux ne permet pas de déterminer l’âge exact du jeune lorsqu’il est proche de la majorité légale. La détermination d’un âge physiologique sur le seul cliché radiologique est à proscrire. »)
    Au vu de cette tranche d’âge c’est l’estimation basse qu’il faudra retenir car le doute doit bénéficier au jeune (Cf. Article La présomption de minorité). Le Protocole d’évaluation du 31 mai 2013 reprend cette exigence en prévoyant que « dans tous les cas, le doute au vu des conclusions de l’examen médical bénéficiera au jeune ».
  • Voir les différentes observations sur les examens d’âge osseux :
  • Avis de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme sur la situation des mineurs isolés étrangers présents sur le territoire national du 26 juin 2014 - Recommandation n° 2 : "La CNCDH recommande qu’il soit mis fin à la pratique actuelle consistant à ordonner
    des expertises médico-légales de détermination de l’âge reposant sur des examens physiques du jeune isolé
    étranger. L’évaluation de l’âge à partir d’un examen osseux, des parties génitales, du système pileux et/ou de la
    dentition doit être interdite
    ".
  • Avis du Haut Conseil de la Santé Publique en date du 23 janvier 2014 : « La détermination d’un âge osseux ne permet pas de déterminer l’âge exact du jeune lorsqu’il est proche de la majorité légale. La détermination d’un âge physiologique sur le seul cliché radiologique est à proscrire.  »
  • Recommandation n° 3 du Défenseur des droits, décision n° MDE/ 2012-179 en date du 21 décembre 2012 : « Le Défenseur des droits recommande que les tests d’âge osseux, compte-tenu de leur fiabilité déficiente eu égard à d’importantes marges d’erreur, ne puissent à eux seuls servir de fondement à la détermination de l’âge du mineur isolé étranger. »
  • Avis du 9 août 2011 de Thomas Hammarberg, ancien Commissaire aux Droits de l’Homme de l’Union Européenne : « Partout en Europe, et notamment au Royaume-Uni, les associations de pédiatres sont catégoriques sur un point : la maturité de la dentition et du squelette ne permet pas de déterminer l’âge exact d’un enfant, mais uniquement de procéder à son estimation, avec une marge d’erreur de deux à trois ans. L’étude sur les mineurs non accompagnés réalisée par le Réseau européen des migrations souligne que l’interprétation des données peut varier d’un pays à l’autre, voire d’un spécialiste à l’autre.
    Le recours aux rayons X soulève par ailleurs de graves questions d’éthique médicale. En 1996, la Faculté royale de radiologie (Royal College of Radiologists) de Londres a déclaré que l’examen radiographique pratiqué pour évaluer l’âge d’une personne était « injustifié » et qu’il était inadmissible d’exposer des enfants à des radiations ionisantes sans un intérêt thérapeutique et dans un but purement administratif.
     »
  • Recommandations du Comité des droits de l’enfant du 12 juin 2009 : « Le Comité note avec préoccupation que, malgré l’avis négatif du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, l’État partie continue de recourir à l’examen osseux pour déterminer l’âge des enfants. Le Comité renouvelle sa recommandation précédente [voir recommandation de 2004 ici] et demande instamment à l’État partie d’introduire des méthodes récentes de détermination de l’âge qui se sont avérées plus précises que les examens osseux actuellement utilisés. »
  • Rapport de l’Académie nationale de médecine sur la fiabilité des examens médicaux visant à déterminer l’âge à des fins judiciaires et la possibilité d’amélioration en la matière pour les mineurs étrangers isolés, 16 janvier 2007 : « La lecture de l’âge osseux par la méthode de Greulich et Pyle universellement utilisée, permet d’apprécier avec une bonne approximation l’âge de développement d’un adolescent en dessous de 16 ans. Cette méthode ne permet pas de distinction nette entre 16 et 18 ans  »
  • Avis CCNE n°88 du 23 juin 2005 sur les méthodes de détermination de l’age à des fins juridiques : « Il est particulièrement inquiétant, à une époque où se développe une médecine “ fondée sur les preuves ”, de voir pratiquer, à des fins judiciaires des examens dont la signification et la validité, par rapport à l’objet même de la demande d’expertise, n’ont pas été évalués depuis plus de 50 ans […] Ainsi, pour répondre aux questions posées, le CCNE confirme l’inadaptation des techniques médicales utilisées actuellement aux fins de fixation d’un âge chronologique. »
  • Voir également la jurisprudence en ce sens :
  • Cour de Cassation, 1ère Civ., 23 janvier 2008, n° 06-13344 : « L’examen radiologique pratiqué sur M. X... ne pouvant être retenu en raison de son imprécision […] »
  • Cour d’appel de Lyon - 6 novembre 2013 - RG n° 13/01698
  • CA Douai - Ch. des libertés individuelles - 10 juillet 2013 - N° RG 13/004X9 (À noter : les nombreux arrêts rendus par la Cour d’Appel de Douai relativement au caractère peu fiable des expertises d’âge osseux ont conduit le Parquet à mettre un terme à l’utilisation de cette méthode pour déterminer l’âge des jeunes se présentant aux services de la protection de l’enfance en danger).
  • TA Lyon 3 février 2015 n°1500700 : Même en l’absence de document établissant l’âge du requérant, le préfet qui se fonde, pour contester sa minorité, sur un simple examen radiographique du poignet, sans recourir à un complément d’examen par une deuxième lecture de ce test osseux, un examen morphologique ou une radiographie dentaire a commis une erreur manifeste d’appréciation.
  • CA Paris 29 juillet 2009 n°09/1303 Ase Paris : « L’examen radiologique pratiqué sur l’intéressé ne peut être retenu en raison de son imprécision et de son insuffisance probatoire »
  • CAA Douai, 8 janvier 2009, n°08DA01199 - Face au résultat contradictoire de deux examens osseux, l’un établissant la majorité et l’autre la minorité du jeune étranger, le juge prend en compte les autres éléments du dossier pour considérer que le jeune étranger est mineur et ne peut donc pas faire l’objet d’un APRF.
  • CA Metz, 26 septembre 2005, n°05/00115 : « La mise en œuvre d’une expertise portant sur l’estimation d’âge sollicitée par le Juge des Enfants […] ne permet d’obtenir qu’une estimation scientifique de l’âge osseux ou physiologique forcément approximative en raison du caractère imparfait et peu fiable des techniques de détermination d’âge  »
  • CA Lyon, 26 avril 2004, n°0400060 : « La fiabilité de la méthode de Greulich et Pyle pour déterminer l’âge est extrêmement douteuse, notamment pour les populations d’origine africaine »
  • TA Rennes, 29 janvier 2009, n°0900239 : « Considérant qu’il résulte de ce qui précède, que l’examen auquel a été soumis M. ne peut être à lui seul déterminant pour connaître son âge […] »
  • TA Lyon, 10 octobre 2003, n° 0304613 : « Le médecin-légiste consulté par l’administration n’ayant pas exposé avec une précision suffisante la méthode l’ayant conduit à estimer que M. C… était majeur et n’ayant pas expressément affirmé que cette méthode pouvait, sans coup frémir, déterminer à un an près, l’âge d’une personne, la preuve que M.C… est majeur, ne peut être regardée comme apportée en l’espèce »
  • Juge des tutelles de Limoges, 3 octobre 2003, n°2003/121 : « Que les critères retenus par les expertises osseuses établies, au début du 20e siècle à partir des caractéristiques morphologiques d’une population nord-américaine aux fins de traitement médical sont peu fiables et comportent une marge d’erreur de 18 mois. »
  • TGI Créteil, 12 juillet 2000, n°2120/2000/6e : « Attendu que par ailleurs il est admis par la communauté scientifique, ainsi qu’en fait foi un article intitulé « Pertinence pour l’enfant d’aujourd’hui des tables GREULICH et PYLE » publié en 1993 dans la revue « American Journal of Diseases of Children » et dont la traduction figure au dossier, que le résultat des examens osseux admettait une marge d’erreur d’environ de 1,8 ans »

LES GARANTIES PRÉCONISÉES PAR DIFFÉRENTES INSTANCES

1. LE HAUT COMMISSARIAT AUX RÉFUGIÉS

  • L’expertise doit être réalisée par un professionnel indépendant connaissant bien le milieu culturel et ethnique de l’enfant,
  • En cas de doute, il doit y avoir présomption que la personne qui prétend avoir moins de 18 ans soit, de manière provisoire, traitée de la sorte,
  • Les examens cliniques ne devront jamais être imposés de force et aller à l’encontre de la culture de l’enfant,
  • Rappelle que « la détermination de l’âge n’est pas une science exacte et qu’il existe en la matière une marge d’erreur considérable »
    En conséquence, le HCR demande que le bénéfice du doute soit accordé aux mineurs isolés.

2. L’UNICEF - Note technique : La détermination de l’âge - Janvier 2013 :

  • La procédure de détermination de l’âge ne doit être menée que lorsqu’elle est considérée comme étant dans l’intérêt supérieur de l’enfant
  • La détermination de l’âge ne doit être effectuée qu’en cas de doute sérieux sur l’âge de l’enfant et comme mesure de dernier ressort
  • Les déterminations de l’âge doivent être menées sans discrimination
  • Il est indispensable de solliciter le consentement éclairé de l’enfant avant d’entamer la procédure
  • Un enfant non accompagné ou séparé doit bénéficier d’un tuteur désigné pour le soutenir au cours de la procédure de détermination l’âge
  • L’évaluation doit avoir recours aux méthodes les moins intrusives possible, qui respectent la dignité et l’intégrité physique de l’enfant en toute circonstance et soient sensibles au genre et à la culture.
  • Lorsqu’il existe une marge d’erreur, celle-ci doit être appliquée en faveur de l’enfant
  • Les procédures de détermination de l’âge doivent adopter une approche holistique
  • L’enfant doit recevoir des informations pertinentes relatives à la procédure de détermination de son âge
  • Il doit exister un droit de recours si l’enfant souhaite contester le résultat de la procédure
  • Les déterminations de l’âge doivent être menées uniquement par des professionnels indépendants et dotés des compétences appropriées

3. La CNCDH - Avis de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme sur la situation des mineurs isolés étrangers présents sur le territoire national du 26 juin 2014
Recommandation n° 4 : « La CNCDH recommande que l’expertise relative à détermination de l’âge :

  • soit réalisée, de manière pluridisciplinaire, par des professionnels expérimentés, spécialement formés, indépendants, impartiaux et sans préjugés sur la personne du jeune ;
  • prenne en compte les facteurs psychologiques, environnementaux, culturels et de développement de l’enfant, ainsi que son parcours éducatif et, plus généralement, ses situations personnelle et sociale. »
    Recommandation n° 1 : « Le mineur ou son représentant légal doit avoir la possibilité d’accéder au contenu du dossier d’évaluation et de demander une contre-expertise ou une nouvelle évaluation de l’âge. »

4. Le Comité consultatif national d’éthique - Avis du Comité consultatif national d’éthique sur les méthodes de détermination de l’âge à des fins juridiques en date de 2005
Le Comité établit que : «  rien ne peut certifier qu’un adolescent n’a pas l’âge qu’il déclare alors même que sa maturation osseuse, sa puberté et/ou ses dents de sagesse indiqueraient le contraire.  »

5. L’Académie nationale de médecine - Rapport de l’Académie nationale de médecine sur la fiabilité des examens médicaux visant à déterminer l’âge à des fins judiciaires et la possibilité d’amélioration en la matière pour les mineurs isolés étrangers
L’Académie nationale de médecine a adopté la même position que le Comité nationale d’éthique en prévoyant que «  rien ne peut certifier qu’un adolescent n’a pas l’âge qu’il déclare alors même que sa maturation osseuse, sa puberté et/ou ses dents de sagesse indiqueraient le contraire.  »

6. Le HCSPAvis du Haut conseil de santé publique relatif à l’évaluation de la minorité d’un jeune étranger isolé du 23 janvier 2014
Le HCSP souligne que : «  la détermination de l’âge d’un individu lorsqu’il est adolescent ou adulte jeune est imprécise ». Le HCSP a réaffirmé que « les outils dont disposent actuellement les médecins légistes ne permettent pas d’estimer l’âge avec un degré de certitude à la hauteur des enjeux » et que «  la détermination d’un âge osseux ne permet pas de déterminer l’âge exact du jeune lorsqu’il est proche de la majorité légale. La détermination d’un âge physiologique sur le seul cliché radiologique est à proscrire ».

7. Le Comité des droits de l’EnfantObservations finales concernant le cinquième rapport périodique de la France du 23 janvier 2016 du Comité droits de l’enfant
Le Comité des droits de l’enfant de l’ONU en charge de contrôler la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant fait part de ses préoccupations et a invité la France à mettre un terme à l’utilisation de ces tests comme méthode principale de détermination de l’âge des jeunes migrants.

L’INCOHERENCE DU RECIT : UN ARGUMENT RETENU PAR CERTAINES JURIDICTIONS

Si l’utilisation de l’expertise médico-légale, aussi controversée soit elle, peut être utilisée à des fins de détermination de l’âge dans le respect des conditions prévues par la loi, les juges retiennent également d’autres arguments en défaveur de la minorité des jeunes.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 11 mai 2016 N° 15-18.731, ne retient pas le fait que l’intéressé ne s’est pas présenté à l’examen d’expertise osseuse ordonnée pour rejeter la minorité du jeune mais retient le critère de l’incohérence du récit afin de dépourvoir de force probante l’acte de naissance produit par l’intéressé reconnue par l’article 47 du Code civil.
En effet, la Cour de cassation considère que : « sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de défaut de motifs, le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation de la cour d’appel qui a souverainement estimé que l’acte de naissance, produit par M. X se disant Mahamadou Y..., était dépourvu
de la force probante reconnue par l’article 47 du code civil, en raison de l’incohérence de ses énonciations avec les déclarations de l’intéressé ; qu’il ne peut être accueilli. »

La doctrine, dans le cadre d’un commentaire de cet arrêt, relève que la Cour de cassation ne dit rien sur l’utilisation des tests osseux et sur le critère de l’allure permettant de considérer le jeune comme majeur. En effet, la doctrine mentionne que : « Économie de moyens oblige : si à ses yeux les déclarations incohérentes sont légitimes à emporter seules la conviction des juges du fond, inutile de se prononcer sur les autres éléments retenus par eux de manière surabondante. Pourtant, le silence de la Cour de cassation en dit long : il dit le peu de considération des juges pour l’éthique du procès et la personne de ces jeunes étrangers qui peuvent bien être « évalués », toisés, radiographiés s’ils demandent protection à l’État français. »
De plus, sur le fait que la Cour de cassation retienne le critère de l’incohérence du récit, la doctrine indique que : « exiger de ces mineurs qu’ils tiennent un discours parfaitement cohérent et livrent une chronologie précise de leur vie lors de l’entretien est un non-sens, et ce, pour plusieurs raisons. D’abord, parce qu’il s’agit de jeunes qui sont souvent épuisés par les conditions de leur voyage et leur vie dans la rue. Ensuite, parce que nombre d’entre eux sont sujets à des troubles post traumatiques. »
Enfin, la doctrine ajoute que « or, selon le Dr Baubet, pédopsychiatre à l’hôpital Avicenne, « ces troubles vont influer sur certains aspects du contenu du discours et la forme qui vont pouvoir faire penser que l’enfant est incohérent, plus ou moins volontairement. L’enfant peut être alors perçu comme menteur ou dissimulateur » » *
* Intervention du Dr Baubet, Comité de rédaction d’Infomie sur « l’évaluation du mineur isolé étranger pour l’entrée dans le dispositif de protection de l’enfance », 1er avr. 2016

Néanmoins, dans un arrêt rendu par la Cour d’appel de Douai en date du 30 juin 2016, les premiers juges, en se conformant à la jurisprudence de la Cour de cassation, ont fondé partiellement leur décision sur des considérations tirées des imprécisions et des contradictions sur le récit de vie du jeune.
La Cour d’appel relève qu’« au regard de leur parcours de vie traumatique et de leurs repères culturels, les repères temporels de certains mineurs isolés étrangers sont nécessairement fragiles. » De ce fait, la Cour d’appel considère que c’est à tort que les premiers juges ont fondé leur décision sur le motif précédemment énoncé.
La Cour d’Appel de Douai, rappelle que « la présomption édictée par l’article 47 du Code civil s’applique sans qu’il n’y ait lieu d’exiger que l’authenticité de ces pièces soit corroborée par des indices supplémentaires venant confirmer les énonciations relatives à l’âge du jeune. » Les juges d’appel infirment la décision rendue par les juges de première instance et confient le mineur jusqu’à sa majorité à l’aide sociale à l’enfance.

Du point de vue médical, lors du Comité de rédaction d’InfoMIE du 1er avril 2016, le Professeur Thierry Baubet, pédopsychiatre, Hôpital Avicenne s’est prononcé sur la question des troubles post traumatiques qui concernent certains mineurs isolés étrangers et leur influence sur l’évaluation.
Monsieur Thierry Baubet insiste sur le fait que : «  ces troubles vont influer sur certains aspects du contenu du discours et de la forme de la relation qui vont pouvoir faire penser que l’enfant est incohérent, plus ou moins volontairement. L’enfant peut être alors perçu comme menteur ou dissimulateur. Les symptômes qui peuvent donner cette impression sont principalement tout ce qui est de l’ordre de l’évitement selon lequel l’enfant cherche, par tous les moyens, à éviter à ce qui pourrait le ramener à ça (récits, endroits…), un état d’alerte permanent et les troubles cognitifs parmi lesquels il y a la dissociation ce qui renvoie à un défaut d’intégration psychique et habituel. Cela provoque une importante amnésie de certains aspects de l’histoire et événements, même importants. L’enfant peut avoir des comportements paradoxaux au niveau des émotions qu’il va montrer ou au niveau d’absence d’émotion. Cela peut être perçu comme un refus de raconter, d’opposition. Quand l’enfant refuse de s’exprimer sur certains points, il en est déduit qu’il cache quelque chose. Alors que ce n’est pas forcément le cas. Les études qui ont été faites il y a quelques années montrent que, lorsqu’il y a un trouble post traumatique et quand on multiplie les interviews sur son patient, plus le trouble est fort, plus il y a des risques qu’il y ait des inconsistances dans le récit entre les entretiens. Cela est considéré comme un indice de la gravité des traumatismes. Ces incohérences portent plutôt sur des évènements périphériques que sur le traumatisme proprement dit. Donc, les incohérences dans les récits entre les interviews répétés ne sont pas un indice de mensonge ou de dissimulation mais plutôt un indice de psychopathologie. »


SI PRATIQUÉS, LES EXAMENS MÉDICO-LÉGAUX DE DÉTERMINATION DE L’ÂGE NE PEUVENT CONSTITUER QU’UN DERNIER RECOURS

  • Des examens médico-légaux de détermination de l’âge peuvent être sollicités par le juge des enfants dès lors qu’il estime l’accomplissement de tels examens nécessaires pour prendre sa décision (article 232 du Code de Procédure Civile : aide à la décision).
    Le recours à de tels examens n’est cependant préconisé qu’en dernier recours lorsqu’il est impossible de déterminer l’âge d’un jeune par d’autres moyens (entretiens, état civil...)

L’article 388 du code civil, modifié par la loi du 14 mars 2016, entérine fermement ce principe :
«  Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé . »

  • Dans le cadre du dispositif national spécifique aux mineurs isolés étrangers mis en place par le Protocole du 31 mai 2013, il ne peut être procédé à des examens médicaux de détermination de l’âge (souvent des expertises de maturation osseuse) qu’après qu’un entretien d’évaluation ait été conduit et, le cas échéant, que les documents d’état civil présentés par le jeune aient été soumis au Bureau des Fraudes Documentaires pour expertise et à la condition qu’à l’issue de ces démarches des doutes subsiste sur la minorité du jeune.

DONC : Lorsque le jeune présente des documents d’état civil et en l’absence d’éléments tendant à remettre en cause l’authenticité de ces derniers, les résultats d’une expertise osseuse ne sauraient servir de base à un refus de prise en charge (Cf. CAA Bordeaux, 11 juillet 2013, n° 13BX00428)


MÉTHODES UTILISÉES DANS LE CADRE D’UNE EXPERTISE MÉDICO-LÉGALE

  • L’expertise médico-légale de détermination de l’âge donne lieu à un ensemble de test clinique composé de :
  • un entretien psychologique avec un médecin :
    • l’entretien a pour but d’évaluer la maturité, le mode de vie, le niveau scolaire de l’adolescent
    • il doit être fait appel à un interprète en cas de besoin.
  • un examen dentaire
  • un examen de l’âge osseux

ATTENTION : depuis la loi du 14 mars 2016, l’article 388 du code civil interdit l’examen des caractères sexuels primaires et secondaires : " En cas de doute sur la minorité de l’intéressé, il ne peut être procédé à une évaluation de son âge à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires".

  • Différentes mesures vont être établies telles que les mensurations, la dentition, la plus connue étant la radiographie de la main et du poignet. Ces radiographies sont ensuite comparées à l’atlas de référence de Greulich et Pyle établie en 1935 (à partir d’une population blanche née aux États-Unis d’origine européenne et de milieu familial relativement aisé).
  • Tous ces tests cliniques doivent obligatoirement être réalisés dans un institut médico-judiciaire et avec le consentement de l’intéressé.

VOIES DE RECOURS CONTRE LES DÉCISIONS SE FONDANT SUR UNE EXPERTISE OSSEUSE

  • Dans l’hypothèse d’une décision administrative de mainlevée de prise en charge suite à une expertise d’âge osseux pratiquée en cours de prise en charge : il est possible de contester l’expertise en effectuant un recours contre la décision de mainlevée de prise en charge (l’expertise d’âge osseux est donc contestée indirectement par le biais d’un recours contre la décision de mainlevée de prise en charge).
    CEPENDANT le jeune étant incapable juridiquement, cette procédure devra être menée par le représentant légal du jeune OR ce représentant légal ne pourrait être que l’Aide Sociale à l’Enfance qui a lui-même levé la prise en charge du jeune et donc ne le soutiendra pas dans cette démarche.
    DONC : Il lui est impossible d’effectuer un recours contre cette décision.
    EN REVANCHE : Il pourra effectuer une saisine directe du juge des enfants afin de solliciter une protection judiciaire au titre de l’enfance en danger (Cf. Articles Saisine des autorités judiciaires et du Défenseur des droits et Recours judiciaires).
  • Dans l’hypothèse où la prise en charge du jeune est refusée ou suspendue par une décision du juge des enfants, le jeune peut effectuer un recours contre cette décision en formant un appel de cette décision. En effet, la possibilité pour le jeune de saisir le Juge des enfants et de faire appel des décisions rendues par ce dernier constitue une exception à l’incapacité juridique des mineurs.
    En application de l’art. 932 CPC, l’appel contre la décision d’un juge des enfants doit se faire au greffe de la Cour d’appel (Cf. Cour de Cassation, 2ème Civ, 8 juillet 2010, n° 09-14459)

Sur la question des examens d’âge chronologique, il convient de noter l’initiative du Bureau d’appui en matière d’asile (EASO) qui a institué un groupe de travail sur cette question et qui devrait prochainement rendre ses recommandations de bonnes pratiques quant à l’évaluation de l’âge des jeunes étrangers.

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