InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Documentation > Articles > Mineurs non accompagnés : de nouvelles dispositions sur l’accès à la (...)

Mineurs non accompagnés : de nouvelles dispositions sur l’accès à la protection de l’enfance

Publié le mercredi 17 août 2016 , mis à jour le mercredi 17 août 2016

Source : Forum Réfugiés

« Les mineurs non accompagnés, des jeunes étrangers de moins de 18 ans présents sur le territoire français sans représentant légal, peuvent bénéficier d’une protection par les services d’aide sociale à l’enfance (ASE) qui relèvent de la compétence des conseils départementaux. Le droit français ne pose en effet aucune condition de nationalité pour bénéficier de cette protection, fondée sur les besoins des mineurs sans considération de leur statut d’étranger.
Une circulaire de 2013 était venue préciser le parcours spécifique d’accès à la protection d’enfance pour ces jeunes en instaurant notamment un dispositif d’évaluation sociale de la minorité et de l’isolement (sur ce thème, voir notre article de la newsletter de janvier 2015 ) et un mécanisme national de répartition afin que la charge financière de l’accueil soit mieux partagée entre les départements. Ce cadre a été consacré dans une loi sur la protection de l’enfance en date du 16 mars 2016, complétée par plusieurs textes réglementaires qui précisent ou modifient sensiblement les dispositions de 2013.

L’évaluation de l’âge

La loi du 16 mars 2016 prévoit que les examens radiologiques osseux fréquemment utilisés pour déterminer l’âge des jeunes étrangers, malgré le manque de pertinence de ces méthodes dénoncées par de nombreuses instances nationales et internationales, « ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur ». La loi indique par ailleurs que « le doute profite à l’intéressé » et qu’il ne peut jamais être procédé à un examen du développement pubertaire comme cela se déroulait dans certains départements en complément des examens osseux. Ces dispositions permettent de rappeler que l’authentification des actes d’état civil présentés par les jeunes doit primer, en conformité avec le Code civil (article 47). Il est également nécessaire de procéder à une évaluation sociale avant tout examen osseux.

Les modalités de cette évaluation de l’âge et de la minorité ainsi que la formation ou l’expérience requise pour y procéder doivent encore être précisées par un arrêté interministériel, mais un décret du 24 juin 2016 pose déjà l’exigence d’une « approche pluridisciplinaire » et d’un entretien « se déroulant dans une langue comprise » par le jeune. Le texte indique également que les départements, qui doivent mener l’évaluation pendant la période d’admission administrative du jeune (qui ne peut excéder cinq jours conformément au droit commun de la protection de l’enfance), peuvent solliciter le concours du préfet « pour vérifier l’authenticité des documents d’identification détenus par la personne ». Il est cependant peu probable que cette sollicitation soit pertinente, d’une part au regard des moyens limités des préfectures dans ce domaine (seul le Bureau de la fraude documentaire, rattaché à la Police aux frontières, détient les outils nécessaires à l’authentification), et d’autre part du fait du délai restreint pour qu’une réponse soit apportée. Au-delà de ce délai de cinq jours, c’est l’autorité judiciaire qui doit être saisie et qui dispose de la possibilité de saisir le Bureau de la fraude documentaire, mais aussi d’ordonner en dernier ressort les examens radiologiques évoqués précédemment.

L’une des avancées de ce décret porte sur l’obligation pour les départements de notifier une décision de refus de prise en charge, lorsqu’ils estiment que la situation de la personne ne justifie pas la saisine de l’autorité judiciaire suite à l’évaluation sociale. Cette notification permet notamment au jeune, qui peut saisir le juge des enfants pour faire valoir à nouveau sa minorité, d’accéder à des dispositifs d’urgence sociale réservés aux adultes.

La répartition territoriale

Le mécanisme de répartition des mineurs non accompagnés entre les départements est consacré dans la loi du 16 mars 2016, permettant ainsi de surmonter une décision du Conseil d’État qui avait rendu inopérant ce système au motif qu’il n’était pas prévu par la loi. Les magistrats doivent cependant toujours prendre leur décision « en stricte considération de l’intérêt de l’enfant » (code civil article L. 375-5), qui peut parfois imposer un maintien dans le département d’arrivée.

Une clé de répartition est définie par le décret du 24 juin, prenant en compte plusieurs critères précisés dans un arrêté du 28 juin 2016 . Au critère démographique (part de la population du département de moins de 19 ans), déjà présent dans la circulaire du 31 mai 2013, s’ajoute notamment une prise en compte du nombre de mineurs non accompagnés pris en charge à la fin de l’année. Le décret impose ainsi aux départements de transmettre au ministère de la Justice, chargé du pilotage de cette répartition à travers une cellule dédiée, le nombre de mineurs non accompagnés présents au sein de l’ASE au 31 décembre. A défaut d’une telle transmission, il sera considéré qu’aucun mineur n’est accueilli ce qui aura pour conséquence d’augmenter la part de mineurs à accueillir pour l’année suivante. Pour l’année 2016, la clé de répartition pour chaque département a été fixée par une décision du 1er juillet 2016 .

Cette évolution réglementaire permettra notamment de connaître le nombre de mineurs pris en charge dans l’ensemble des départements métropolitains au 31 décembre de chaque année. Une telle donnée n’est pas disponible aujourd’hui, laissant place à de nombreuses approximations sur l’ampleur du phénomène et son évolution. Cette connaissance statistique pourrait contribuer à la mise en place d’une véritable politique nationale dans ce domaine, illustrée en partie par les évolutions législatives et réglementaires décrites précédemment mais qui doit encore être consolidée par le biais d’une harmonisation de pratiques encore très disparates selon les territoires et qui sont parfois contraires aux engagements de la France en faveur des droits de l’enfant (voir notre article de la newsletter de février 2016 sur les recommandations adressées par les Nations unies dans ce domaine). »

Voir en ligne : http://www.forumrefugies.org/s-info...


Pour aller plus loin