Source : La CIMADE, Médecins du monde, Secours Catholique
Date : 02 août 2017
À l’attention de Monsieur le Président du Conseil Départemental de l’Isère,
Hôtel du Département
7 rue Fantin-Latour
BP 1096
38022 Grenoble
Copie à Madame la Directrice de la Direction Départementale de la Cohésion
Sociale en Isère,
Copie à Monsieur le Préfet de l’Isère,
Copie à Monsieur le Maire de Grenoble,
Grenoble, le 2 Août 2017
Objet : Refus de mise à l’abri d’urgence et de prise en charge des mineur·e·s isolé·e·s étranger·e·s arrivé∙e∙s dans le département de l’Isère depuis le 1er Juillet 2017.
« Monsieur le Président,
Nous tenons à attirer votre attention sur la situation inquiétante à laquelle font face les mineur·e·s isolé·e·s étranger·e·s non pris·es en charge par le Conseil Départemental de l’Isère depuis le 1er juillet 2017.
Conformément à la loi, « Le président du conseil départemental du lieu où se trouve une personne se déclarant mineure et privée temporairement ou définitivement de la protection de sa famille met en place un accueil provisoire d’urgence d’une durée de cinq jours, à compter du premier jour de sa prise en charge (…) Au cours de la période d’accueil provisoire d’urgence, le président du conseil départemental procède aux investigations nécessaires en vue d’évaluer la situation de cette personne au regard notamment de ses déclarations sur son identité, son âge, sa
famille d’origine, sa nationalité et son état d’isolement ».
Il en résulte que le Conseil Départemental du département où le/la jeune, potentiellement mineur·e isolé·e, est trouvé·e a pour obligation de le/la mettre à l’abri d’urgence avant toute évaluation. Cette mise à l’abri d’une personne mineure en danger doit être effectuée dans un établissement de service social ou médico-social. Elle est assurée par les services sociaux du département où se présente le/la jeune ou elle peut être confiée à des associations habilitées.
Ainsi, jusqu’à présent, l’association ADATE s’occupait, par délégation du Conseil Départemental, de la mise à l’abri d’urgence et de l’évaluation des mineur·e·s isolé·e·s étranger·e·s arrivant dans le département de l’Isère.
Or, lors de la présentation du rapport d’orientations Protection de l’Enfance en séance publique du département de l’Isère du 30 Juin 2017, Madame Frédérique Puissat a déclaré que « le dispositif de la protection de l’enfance [était] embolisé par l’accueil des mineur·e·s non accompagné·e·s » et que par conséquent « [le Département ne pouvait] plus accueillir de mineur·e non accompagné·e ».
C’est ainsi que le Conseil Départemental a décidé de suspendre l’accueil des personnes mineures isolées étrangères arrivées dans l’Isère à partir du 1er Juillet 2017.
Nous constatons qu’aucune solution alternative n’a été proposée.
Plusieurs mineur·e·s isolé·e·s étranger·e·s arrivant dans le département de l’Isère se trouvent à la rue en situation de danger, sans possibilité d’accéder à un dispositif d’hébergement d’urgence. Ils/Elles sont également privé·e·s du suivi socio-éducatif adapté à leur jeune âge et à leurs besoins.
En désespoir de cause, ces mineur∙e∙s se tournent vers les associations pour demander un accompagnement juridique et social, alors que l’accès effectif à leurs droits fondamentaux doit être garanti par l’Etat.
Les personnes mineures que nous avons rencontrées au sein de nos permanences témoignent du fait qu’elles se présentent à l’ADATE qui n’est plus en mesure de les accueillir. Elles se dirigent alors vers la police nationale pour demander une protection.
Celle-ci les réoriente vers l’ADATE qui réitère son refus. Elles racontent qu’elles sont de ce fait forcées de dormir aux alentours de la gare et du parc Paul Mistral où elles sont confrontées à des menaces et à des risques d’autant plus importants du fait de leur jeune âge et de leur isolement.
En dépit des difficultés que le Conseil Départemental de l’Isère rencontre face à l’augmentation des demandes émanant de mineur·e·s isolé·e·s étranger·e·s, nous, associations, sommes convaincues qu’une réponse immédiate doit être trouvée afin de garantir le respect du droit : toute personne mineure en danger a droit à une protection en France.
Nous demandons à ce que soient apportées, sans délais, des solutions à cette situation d’urgence, qui renforce la vulnérabilité des mineur·e·s et les risques inhérents à l’absence de protection. Ces solutions doivent assurer une mise à l’abri et une prise en charge en accord avec les obligations prévues par la loi.
Nous nous tenons bien entendu à votre disposition pour vous rencontrer et vous apporter tous les éclaircissements ou compléments d’informations qui vous paraîtraient utiles.
Compte tenu de l’importance des enjeux qui s’attachent à cette question, vous comprendrez que nous souhaitions rendre public le présent courrier.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Président, en l’assurance de notre plus
haute considération.
Associations signataires :
La Cimade Auvergne-Rhône-Alpes – Groupe local de Grenoble
Médecins du Monde – Missions France Grenoble
Secours Catholique (délégation à Grenoble) »
Lettre disponible en format pdf ci-dessous :