Résumé :
Un mineur isolé ressortissant ivoirien, pris en charge par l’ASE à 16 ans, poursuit une formation qualifiante en CAP et bénéficie d’une APJM. A sa majorité, il sollicite la délivrance d’un titre de séjour (TS) mention "salarié" ou "travailleur temporaire" sur le fondement de l’article 313-15 du CESEDA. Le préfet refuse de lui délivrer un récépissé et fait valoir l’absence d’urgence et la nécessité de vérifier la fiabilité des éléments d’identité.
Le juge des référés, statuant sur le fondement de l’art. L. 521-2 du code de justice administrative (« référé-liberté »), rappelle que l’autorité administrative ne peut refuser d’enregistrer une première demande ou un renouvellement de titre de séjour et de délivrer un récépissé sauf si la demande comporte un caractère abusif ou dilatoire ou que le dossier est incomplet. Le juge retient que l’urgence est caractérisée par sa situation irrégulière qui l’expose à une mesure d’éloignement et à la nécessité de justifier de sa régularité pour la poursuite de son apprentissage. Ainsi, le refus de délivrance du récépissé porte une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que constituent la liberté d’aller et venir et le droit à l’instruction et au travail. Le tribunal administratif enjoint au préfet de délivrer un récépissé autorisant à travailler sous 72h.
Voir dans le même sens :
- Tribunal administratif de Nancy – Ordonnance n°1900248 du 1er février 2019
- Tribunal administratif de Nancy – Ordonnance n°1900247 du 1er février 2019
Extraits :
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6. L’article R.311-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit que : "Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l’intéressé sur le territoire pour la durée qu’il précise (...)". Il résulte de ces dispositions qu’en dehors du cas d’une demande à caractère abusif ou dilatoire, l’autorité administrative chargée d’instruire une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour ne peut refuser de l’enregistrer, et de délivrer le récépissé y afférent, que si le dossier présenté à l’appui de cette demande est incomplet.
7. Au cas d’espèce, il est constant que M.X a demandé un titre de séjour par courrier du 11 juillet 2018. Le préfet n’a pas donné suite à sa demande et, par courrier du 15 octobre 2018, lui a demandé de justifier de son état civil et de sa nationalité, par des documents traduits en français. Toutefois, il résulte de l’instruction et notamment des écritures du préfet que M.X a été confié à l’aide sociale à l’enfance par décisions du Procureur de la République et du juge des enfants de Nancy depuis le 20 juillet 2017. Dans ces conditions, en refusant de délivrer à M.X qui justifie d’une situation d’urgence par sa situation irrégulière qui l’expose à une mesure d’éloignement, ainsi que par la nécessité de justifier d’une situation régulière au regard de son employeur qui l’accueille en stage, et alors même qu’il bénéficie d’un contrat jeune majeur, un récépissé de demande de titre de séjour l’autorisant à travailler au motif qu’il doit vérifier son état civil et sa nationalité, le préfet a porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que constituent la liberté d’aller et venir et le droit à l’instruction et au travail.
8. Par suite, il y a lieu d’enjoindre au préfet de délivrer un tel récépissé à M.X dans un délai de 72h à compter de la notification de la présente ordonnance, sans qu’il soit besoin d’assortir cette injonction d’une astreinte.
[…]. »
Retrouvez l’ordonnance en version pdf ci-dessous :