Cour d’appel de Lyon – 7ème chambre – Arrêt n°2021/86 du 25 mars 2021 – Expertise osseuse irrégulière en application de l’article 388 du code civil – Le jugement supplétif du tribunal de première instance de Bamako ne comporte aucune anomalie ou trace de fraude – Incompétence du tribunal correctionnel au motif de la minorité du prévenu

Résumé :

Infirmation du jugement par lequel le tribunal correctionnel s’est déclaré à tort compétent et a déclaré coupable de recel de faux documents et de fausse déclaration pour obtenir une allocation ou prestation indue, condamné à 4 mois avec sursis et à payer au département du Rhône la somme de 86 097,82 euros un mineur isolé ressortissant malien présentant un jugement supplétif et un acte de naissance

  • alors qu’en l’espèce il n’est nullement établi à la procédure que le jugement supplétif du tribunal de première instance de Bamako qui ne comporte aucune anomalie ou trace de fraude, l’extrait du registre des actes d’état civil et le passeport délivré par la République du Mali ne sont pas authentiques et ne peuvent faire foi de son identité,
  • alors que l’expertise osseuse ne pouvait être organisée en présence de documents d’identité dont l’irrégularité n’était pas établie et d’un âge allégué n’apparaissant pas invraisemblable, que de surcroit l’expertise osseuse malgré tout pratiquée ne saurait conduire à remettre en cause l’authenticité des documents d’identité produits, l’expert ayant constaté une amplitude de 20 ans, avec un minimum de 15,4 ans sur la radiographie du poignet et un maximum de 35 ans sur la radiographie de la clavicule ce qui enlève tout caractère probant à ces constatations et conclusions.
    Le prévenu était donc mineur à la date des faits qui lui sont imputés et il était en droit de solliciter de la métropole de Lyon sa prise en charge de qualité de mineur étranger isolé.
    Les documents d’identité placés sous scellés seront restitués.

Extraits :

« […].

Qu’en l’espèce, il n’est nullement établi à la procédure, par d’autres actes ou pièces contraires ou d’éléments tirés de l’acte lui-même, que le jugement supplétif du tribunal de première instance de Bamako, l’extrait du registre des actes d’état civil et le passeport délivré par la République du Mali le 19 avril 2019, documents que présente X ne sont pas authentiques et ne peuvent faire foi de son identité ;

Attendu que le principe et les conclusions de l’expertise osseuse sont à juste titre contestés ; qu’en effet, en application de l’article 388 du code civil, les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge sont organisés en l’absence de documents d’ identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable ; qu’ils ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé ; que les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur, le doute lui profitant ;

Qu’en l’espèce, en présence de documents d’identité dont l’irrégularité n’était pas établie, s’agissant particulièrement du jugement supplétif du tribunal de première instance de Bamako ne comportant aucune anomalie ou trace de fraude, et d’un âge allégué n’apparaissant pas invraisemblable, les examens en cause ne pouvaient être organisés  ; que de surcroit, l’expertise osseuse malgré tout pratiquée sur le prévenu ne saurait conduire à remettre en cause l’ authenticité des documents d’identité produits, l’expert ayant constaté une amplitude d’âge de 20 ans, avec un minimum de 15,4 ans sur la radiographie du poignet et de 17,3 ans lors de l’examen dentaire, et un maximum de 35 ans sur la radiographie de la clavicule, ce qui enlève tout caractère probant à ces constatations et conclusions ;

Attendu que pour être né le 25 décembre 2000, était mineur à la date des faits qui lui sont imputés ; qu’il était en droit de solliciter de la Métropole de Lyon sa prise en charge en qualité de mineur étranger isolé ;

Attendu que le moyen tiré de l’incompétence de la juridiction saisie, au motif de la minorité du prévenu, doit être accueilli  ;

Qu’en conséquence, le jugement déféré par lequel le tribunal correctionnel s’est déclaré à tort compétent, sera infirmé ;

[…]. »

Arrêt à retrouver en intégralité ci-dessous :

Retour en haut de page