Cour d’appel de Rouen – Arrêt du 24 août 2021 – L’exigence de double légalisation ne peut être retenue pour permettre à des actes émanant des autorités guinéennes de bénéficier de la présomption de l’article 47 du code civil – Irrégularité du rapport d’évaluation au motif de l’impossibilité de s’assurer du respect des obligations posées par l’arrêt du 20 novembre 2019

Résumé :

Les documents d’état civil guinéens peuvent bénéficier de la présomption de l’article 47 du Code civil en dépit de la seule légalisation par les autorités consulaires guinéennes. L’identité des personnes ayant procédé à l’évaluation de minorité étant inconnue, le rapport doit être écarté pour irrégularité. Les éléments apportés sont insuffisants pour remettre en cause la minorité de X. La Cour d’appel confirme la décision de placement.

Extraits :

S’agissant des actes d’état civil :

  • Les deux documents présentés font l’objet d’une légalisation par les autorités guinéennes mais d’aucune légalisation par les autorités françaises.

Toutefois, le décret n°2020-1370 du 10 novembre 2020 relatif à la légalisation des actes publics établis par une autorité étrangère et entré en vigueur le 1er janvier 2021, dispose que les services consulaires français ne sont pas en mesure de procéder à la légalisation des actes publics en provenance de la République de Guinée. En conséquence, l’exigence de double légalisation ne peut être retenue ; les documents de X. peuvent donc bénéficier de la présomption de l’article 47 du Code civil.

  • Par ailleurs, les Guinéens ne peuvent être pénalisés par les "dysfonctionnements de leur pays au niveau de leur état civil et il n’est pas possible d’écarter systématiquement les actes d’état civil qu’ils peuvent présenter au seul motif d’une fraude généralisée, la Cour se réservant d’analyser au cas par cas la fiabilité des documents produits"

S’agissant du rapport d’évaluation de la minorité :

  • L’identité des évaluateurs demeure inconnue (seules les initiales apparaissent).

Or, selon l’article 5 de l’arrêté du 20 novembre 2019 pris en application de l’article R221-11 du CASF :

"Le président du conseil départemental s’assure que les professionnels en charge de l’évaluation auxquels il a recours justifient d’une qualification ou d’une expérience leur permettant d’exercer leur mission dans des conditions garantissant la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, et d’une formation à l’évaluation sociale.
L’expérience ou la qualification prises en compte peuvent notamment avoir trait aux métiers de la protection de l’enfance, du droit, de la psychologie, de la santé ou de l’éducation. La formation à l’évaluation sociale est d’une durée minimale de 21 heures et donne lieu à la délivrance d’une attestation d’assiduité. Elle porte notamment sur la psychologie de l’enfant, les spécificités de l’approche interculturelle, les techniques d’entretien et le processus d’évaluation dans son déroulement chronologique, le contexte géopolitique et les parcours de migration, ainsi que le droit de la protection de l’enfance, du séjour et de l’asile."
  • L’impossibilité de la Cour de s’assurer du respect de ces obligations, l’oblige à écarter le rapport d’évaluation pour irrégularité.

Ainsi la Cour confirme la décision de placement de X à l’aide sociale à l’enfance.

Voir l’arrêt :

Cour d’appel de Rouen - Arrêt du 24 août 2021
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