InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Actualités MIE > Actualités jurisprudentielles > Cour d’appel de Poitiers – 4ème Chambre Civile – Arrêt N°21/02245 du 11 mai (...)

Cour d’appel de Poitiers – 4ème Chambre Civile – Arrêt N°21/02245 du 11 mai 2022 – Annulation de la mainlevée de tutelle – Minorité et isolement

Publié le : lundi 20 juin 2022

Résumé :

La Cour d’appel annule la mainlevée de la tutelle de l’intéressé, ordonnée par le juge des tutelles sans audience, en violation du principe du contradictoire.

Statuant sur le fond, la Cour d’appel retient par ailleurs la minorité et l’isolement de l’intéressé et en conclut que la tutelle déférée au Président du Conseil départemental doit continuer à s’appliquer.
En effet, le fait que l’intéressé se soit déclaré sous une autre identité, en tant que majeur, auprès des autorités espagnoles, ne peut suffire à établir sa majorité (cette déclaration pouvant être destinée à lui permettre de passer les frontières). En outre, malgré la remise en cause de l’authenticité de ses documents d’état civil par un rapport de la police aux frontières, l’intéressé présente à l’audience un passeport indiquant sa minorité et faisant foi au titre de l’article 47 du code civil. Enfin, le rapport d’évaluation portant sur sa minorité et son isolement retient ces deux éléments.


Extraits de l’arrêt :

« SUR LA DEMANDE D’ANNULATION DE LA DECISION :

Il ressort de la lecture de l’ordonnance déférée qu’elle a été rendue sans audience, ni M.A, ni son conseil n’ont été entendus notamment sur les éléments ayant fondé la décision de mainlevée.

La décision a donc été rendue en violation du principe du contradictoire entraînant la nullité de l’ordonnance déférée.

SUR LE FOND :

[…]

Sur la preuve de la minorité

En application des dispositions de l’article 47 du code civil, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

[…]

[…] il est constant que l’exploitation des empreintes de M.A a fait apparaître qu’elles correspondaient à un individu se nommant X, né le 29 octobre 2000 en Côte d’Ivoire, […], dont les empreintes ont déjà été prélevées en Espagne […]. Toutefois, le seul aveu par M.A, aux autorités espagnoles de cette date de naissance ne peut valoir reconnaissance de sa majorité dès lors que cet aveu peut être le fruit d’une stratégie destinée à lui permettre de passer les frontières.

[…]

[…] M.A a produit un nouvel extrait d’acte de naissance qui cette fois ne présente aucune modification ou surcharge et qui atteste toujours de ce qu’il est né le 17/10/2004 […], et surtout il vient d’obtenir de l’ambassade de Côte d’Ivoire en France un passeport biométrique dont l’authenticité n’est pas remise en cause.

Ce passeport ivoirien duquel il résulte que M.A est bien né le 17/10/2004 […] fait foi et aucune donnée extérieure ne vient utilement combattre la présomption de véracité posée par l’article 47 sus-visé.

Il ressort également du compte rendu d’évaluation « Jeunes étrangers isolés » […] :

- que M.A est apparu comme un jeune calme et respectueux et dont le profil physique était compatible avec celui d’un mineur de 15 ans ;

- que son âge était corroboré par les documents d’identité produits ;

- qu’il a fourni des renseignements spatio-temporels cohérents quant à son parcours migratoire ;

- qu’il est apparu isolé car sans famille ni soutien en France.

En conséquence, il ressort de l’ensemble de ces éléments que l’âge de M.A, et donc sa minorité, sont vraisemblables. Par ailleurs il n’est pas contesté qu’il est seul et sans famille sur le territoire français.

En conséquence […] l’ordonnance […] ayant ouvert la tutelle du mineur M.A et ayant déféré cette tutelle à M. le Président du conseil Départemental […], doit continuer à recevoir application dans toutes ses dispositions.

[…]. »


Voir la décision au format PDF :

CA Poitiers – Arrêt N°21/02245 - 11 mai 2022