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Cour administrative d’appel de Nancy – 4ème chambre – Arrêt N°22NC00311 du 21 juillet 2022 – Absence d’exigence de double légalisation d’un jugement supplétif guinéen – L’établissement sur support ordinaire et la présence de cachets présentant des anomalies ne suffisent pas à établir le caractère irrégulier, falsifié ou inexact des mentions – L’article 423-22 du CESEDA n’exige pas que le demandeur soit isolé dans son pays d’origine

Publié le : mardi 16 août 2022

Résumé :

C’est à tort que le préfet a refusé un titre de séjour à un jeune anciennement pris en charge par l’ASE, au motif que les documents d’état civil présentés seraient faux.

En effet, le préfet ne renverse pas la présomption de validité posée par l’article 47 du code civil. L’obligation de légalisation du jugement supplétif doit tout d’abord être regardée comme remplie dès lors qu’il a été légalisé par l’ambassade de Guinée en France, les services consulaires français en Guinée ne procédant plus à cette légalisation. Par ailleurs, ni le fait que les actes soient établis sur un support sans sécurité documentaire (en l’absence d’élément sur la qualité des supports et les sécurités que doivent comporter ces actes selon la loi guinéenne), ni l’existence de cachets secs et humides présentant des anomalies, ne suffit à établir le caractère irrégulier, falsifié ou inexact de leurs mentions.

S’agissant de la délivrance du titre de séjour sollicité, la Cour retient par ailleurs que l’article L.423-22 du CESEDA (carte de séjour "vie privée et familiale") n’exige pas que le demandeur soit isolé dans son pays d’origine.


Extraits de l’arrêt :

« 6. Pour refuser de délivrer à M. A le titre de séjour qu’il avait sollicité sur le fondement de l’article L.423-22 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le préfet du Doubs s’est fondé sur la fraude commise par le demandeur en produisant des documents d’état civil présentant le caractère de faux en écriture publique et que par conséquence, son identité et son âge n’étaient pas établi. Le préfet s’est alors fondé sur le rapport rédigé par la cellule de lutte contre la fraude documentaire interdépartementale des services de la police aux frontières […] , qui, après avoir souligné l’impossibilité de procéder à une analyse de l’authenticité des supports non sécurisés des documents produits, relève notamment que le jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance est incomplet au regard des dispositions de l’article 196 du code civil guinéen, supporte des cachets humides dont les caractères sont irréguliers et des cachets secs pratiquement illisibles qui présentent des anomalies et n’a pas été légalisé par les autorités consulaires françaises en Guinée.

7. Toutefois, l’obligation de légalisation à laquelle est soumise le jugement supplétif guinéen, qui permet d’attester de la véracité de la signature, de la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, de l’identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu, doit être regardée comme remplie par la légalisation effectuée par l’ambassade de Guinée en France dès lors que les services consulaires français dans ce pays ne procèdent plus à cette légalisation. Par ailleurs, en l’absence de tout élément sur la qualité des supports des actes d’état civil guinéens et les sécurités qu’ils doivent comporter selon la législation guinéenne, la circonstance que les actes présentés par M. A sont établis sur un support ordinaire grand public sans sécurité documentaire n’est pas de nature à établir que les mentions relatives à son identité et notamment à sa date de naissance sont irrégulières, falsifiées ou inexactes. Les seules circonstances que les cachets secs et humides présentent des anomalies ne sauraient également suffire à établir que ces actes d’état civil seraient irréguliers, falsifiés ou inexacts. Enfin, le préfet du Doubs a lui-même produit une attestation d’authenticité des autorités guinéennes en France des documents d’état civil produits par le requérant. Ainsi, au regard de tout ce qui précède, le préfet du Doubs ne renverse pas la présomption de validité qui s’attache, en vertu notamment de l’article 47 du code civil, aux mentions contenues dans les actes produits par M. A.

[…]

9. Si le préfet du Doubs fait valoir en appel que M. A n’est pas dépourvu de tout lien familial ou social dans son pays d’origine, les dispositions de l’article L. 423-22 précité n’exigent pas que le demandeur soit isolé dans son pays d’origine.

[…]  ».


Voir l’arrêt au format PDF :

CAA Nancy - 21 juillet 2022 - N°22NC00311